Épinglé par la commission d’enquête du Sénat en janvier 2022, le rapport de McKinsey sur l’évolution du métier d’enseignant destiné au ministère de l’Éducation nationale est désormais accessible en ligne. Un concentré de langage managérial insipide qui pousse à la libéralisation de l’école et à son adaptation au marché du travail. Une opération à 486 800 euros pour un résultat plus que discutable […]
« Renforcer le leadership pédagogique des directeurs d’école primaire et secondaire en élargissant leurs prérogatives. […] La responsabilité de piloter l’auto-évaluation de l’établissement pourrait être confiée à son directeur. Celui-ci pourrait aussi se voir attribuer des pouvoirs étendus dans l’allocation de ressources financières et humaines, tout en bénéficiant d’une formation approfondie aux méthodes de leadership (par exemple, le coaching) » […]
« Encourager les méthodes d’enseignement différencié et personnalisé. Les méthodes d’enseignement différencié et personnalisé – comme par exemple adapter les lectures suggérées aux élèves en fonction de leur niveau – pourraient être davantage valorisées dans la formation initiale des professeurs. Par ailleurs, elles pourraient faire l’objet d’échanges de bonnes pratiques plus systématiques entre collègues. » (sic)
Presse / Le Monde du 08/12/2020 / Mathématiques : la France, dernière élève des pays développés (Violaine Morin)
D’après les résultats de l’enquête Trends in International Mathematics and Science Study (Timss), réalisée en mai 2019 sur un échantillon de 4 186 enfants de CM1 et 3 874 adolescents de 4e, la France se classe bonne dernière dans les pays de l’Union européenne, avec des résultats similaires à ceux de la Roumanie. Elle est aussi avant-dernière dans les pays de l’OCDE, devant le Chili. […]
Le plan de formation, sur lequel insiste l’institution, pourra-t-il suffire à renverser la tendance lourde d’une baisse généralisée en mathématiques ? Il est encore trop tôt pour le dire. Mais sur le terrain, on craint parfois que le mal soit plus profond : « Les heures de mathématiques au collège ont baissé depuis quinze ans », rappelle Sébastien Planchenault, président de l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (Apmep) qui souligne aussi la structure « pyramidale » de l’apprentissage des mathématiques : [...] « un élève qui arrive trop fragile en 6e va voir ses difficultés s’accentuer. »
Manifestation laïque à Paris (collectif Sauver les lettres, 12/2005) La nécessité d'enseigner la littérature des Lumières (Agnès Joste, 06/2012)
Il existe […] une étroite relation entre notre combat pour l’enseignement de la littérature et la défense de la laïcité. La laïcité est la condition d’existence d’un espace public commun et démocratique qui privilégie ce qui nous réunit et nous permet de vivre ensemble au delà de nos particularismes et de nos communautés.
Mais un espace public n’a de sens que s’il est habité. Or, seule l’instruction que nous défendons permet de créer chez chacun d’entre nous une autre dimension que celle qui nous définit comme éléments d’un groupe particulier. Cette dimension est plus large et plus abstraite que celle de la communauté culturelle ou religieuse, c’est celle de l’existence politique.
L'enseignement des Lumières : accéder aux fondements de la laïcité.
L'effort des écrivains des Lumières est d'arracher l'homme à toutes les entraves à l'exercice de la raison (« Ecrasons l'Infâme !»), pour lui donner ou lui rendre sa liberté de pensée. La première entrave est la religion, qui asservit les esprits. Dans un contexte scolaire, les philosophes les plus accessibles et les mieux à même de le montrer sont Montesquieu et Voltaire. Leur étude, pendant la classe de Première, montre comment l'idée de séparer l'Eglise et l'Etat a pu mûrir et se faire jour, sans que la notion soit encore théorisée.
Analyse / Sauver les lettres du 16/04/2021 / Bac de crise... ou crise du bac (Mireille Kentzinger)
Entre improvisation et annulation : le triomphe du contrôle continu
[…] Ce choix arbitraire du contrôle continu et le régime d’improvisation permanente seraient peut-être un peu moins inquiétants si on pouvait nous garantir qu’ils se limiteront à la période houleuse actuelle, mais on peut craindre qu’ils ne soient devenus la règle du fonctionnement général de l’institution en régime Blanquer : en effet, déjà en juin 2019, le Ministère, confronté àune forte opposition à sa réforme de la part des enseignants, avait réglé le problème des notes de bac retenues par des professeurs grévistes en se livrant à différents tripatouillages et procédures d’exception lors des jurys de bac, pour maintenir coûte que coûte une apparence de déroulement normal et pour faire taire les critiques.
Presse / Le Monde du 28/03/2020 / Ecole à distance, semaine 2 : « Je ne crois pas que j’y arriverai » (Mattea Battaglia, Chloé Ripert)
« Chez nous, on n’a pas d’ordinateurs, pas de mails… En quinze jours, je suis allée chercher les devoirs deux fois à l’école », raconte une mère de cinq enfants qui a requis l’anonymat. Dans cette famille serbe - la maman est au foyer, le père au chômage -, installée en Rhône-Alpes, on met sur le même plan les obstacles matériels et linguistiques. « Je ne parle pas très bien le français, parfois je ne comprends pas les exercices, alors j’appelle la maîtresse, explique la mère. On fait comme on peut, mais c’est très difficile. »
Presse / Marianne du 01/04/2020 / Numérisation de l'école : « On ne fait pas un cours de philosophie par courriels » (Harold Bernat)
Qu'est-ce qui, dans ma discipline, échappe à la continuité quand l'absence des corps interdit la rencontre des esprits ?
C'est une question fondamentale, aujourd'hui tabou car elle dérange les administrateurs du contrôle intégral et des big data sans conscience. C'est une question réflexive qui suppose une maîtrise que l'on ne peut pas transmettre n'importe comment. On ne fait pas un cours de philosophie par courriels.
Presse / Le Monde du 07/04/2020 / Ecole à la maison : qui sont les 800/000 élèves « perdus » ? (Pascal Plantard)
L’expérience du confinement est intense et massive. C’est un « fait social total », pour reprendre l’expression de Marcel Mauss (1923). La reproduction à distance de la norme scolaire classique et de ses attendus, avec les contradictions, la charge mentale et les conflits de légitimité qu’elle représente, est une voie sans issue. Non, ces élèves n’ont pas été « perdus » par les enseignants, mais laissés pour compte par l’ensemble de la société.
Tribune / Le Monde du 03/03/2020 / « Le bac est mort. Vive le... quoi ? » (Fanny Capel, Professeure de lettres
modernes au lycée Paul-Eluard (Saint-Denis). Présidente de l'association "Sauver les Lettres"
Quel sens profond donner à cette révolution d’un examen emblématique de notre pacte républicain ? Jean-Michel Blanquer avait annoncé un bac plus juste, moins lourd, moins stressant, plus moderne jusque dans ce sigle branché des « E3C ». Or, dans la novlangue ministérielle, les mots signifient le contraire de ce qu’ils recouvrent. Jamais, de mémoire de professeure principale en exercice depuis vingt-deux ans, je n’ai vu mes élèves de 1ère aussi angoissés. Ils s’avouent paniqués par la multiplication d’échéances courtes. Jusqu’alors, l’année de 1re était celle où on
laissait les lycéens mûrir et étudier tranquillement. Les épreuves de français et de TPE passées en juin représentaient pour eux une sorte de galop d’essai du bac. Leur orientation roulait sur des rails.
Cette année, au bout de trois mois de cours, on les sonde déjà pour leur demander laquelle des trois spécialités choisies en fin de 2e ils vont abandonner [...], et au bout de quatre mois, ils passent déjà la première session de la vingtaine d’épreuves de bac échelonnées sur leur cursus.
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Tribune / Le Monde du 15/08/2019 / Le classement de Shangai n'est pas fait pour mesurer la qualité des universités françaises (Hugo Harari-Kermadec, interrogé par Eric Nunès)
A Paris-Dauphine, on ne trouve pratiquement pas d’enfants des classes populaires. A l’inverse, certaines universités d’outre-mer ou des Hauts-de-France ont très peu d’enfants de cadres, alors qu’ils constituent 40 % de la population étudiante à l’université. Et, surprise, les universités à la population étudiante la plus aisée sont celles qui sont les mieux classées par Shanghaï, et qui reçoivent les financements IDEX. Les financements des politiques publiques de « l’excellence » renforcent donc indirectement la polarisation sociale du système universitaire, en donnant plus de moyens pour l’éducation des étudiants favorisés. Finalement, adapter le système universitaire français au classement de Shanghaï, c’est lui faire adopter une logique de concurrence et de rationalisation économique, au détriment de l’esprit de service public et des missions académiques.
Analyse / Mezetulle, 23/08/2019 / Libéralismes et éducation : Quand le loup libéral entre dans la bergerie scolaire (Sébastien Duffort)
En défendant à la fois l’innovation pédagogique (libéralisme culturel) et la libéralisation du système scolaire (libéralisme économique), de nombreux acteurs du système éducatif qui se disent « modernisateurs », « progressistes », autrement dit « de gauche », ont en réalité contribué à l’accentuation des inégalités de réussite scolaire au détriment des élèves les plus défavorisés.
Presse / Libération du 03/12/2019 / Rapport PISA : bulletin et tintamarre (Marie Piquemal)
«Malgré des bases solides, le système éducatif français présente des faiblesses structurelles : le poids de l’origine sociale pèse davantage qu’ailleurs sur les performances scolaires des élèves.» C’était la vraie inconnue de cette enquête Pisa, et certainement l’indicateur que chercheurs et politiques attendaient avec le plus d’appréhension : l’écart de points entre les élèves venant de familles favorisées et ceux issus de milieux défavorisés. Avec une différence de 107 points (contre 89 en moyenne dans l’OCDE), la France reste l’un des pays de l’OCDE où l’origine sociale a le plus fort impact sur les résultats scolaires. En France, les élèves de familles défavorisées ont cinq fois plus de risques que les autres de ne pas atteindre le niveau minimal de lecture.
Analyse / Mezetulle, 25/01/2020 / Éléments pour réinstituer l’élitisme républicain – L'égalité chez Condorcet (Charles Coutel)
L’égalité d’instruction doit lutter à la fois contre le retour subreptice de l’inégalité dans l’accès aux savoirs (dans le préceptorat privé par exemple), mais aussi contre la tentation de l’égalitarisme qui, à partir de l’égalité morale et politique des hommes, en arrive à haïr les talents et les lumières, à condamner l’excellence et à interdire l’admiration et toute défense héroïque de la République.
Tribune / Le Monde du 11/07/2019 / À l'université, les passions égalitaristes rendent la langue illisible et imprononçable (Yana Grinshpun, Céline Masson et Jean Szlamowicz)
Tribune. La surveillance linguistique a pris en quelques mois une tournure d’une virulence inédite. Des « inclusivistes » (partisans d’une écriture qui éviterait toute discrimination entre les femmes et les hommes) signalent le féminin partout où ils peuvent. Ils confondent ainsi les signes de la langue qui servent à distinguer des types de mots avec ce qu’ils désignent dans l’extralinguistique (ce qu’on nomme le « réel » en psychanalyse) : « masculin » et « féminin » en grammaire ne signifient pas « homme » et « femme ». Par ailleurs, les polarités du masculin et du féminin, ce que Freud nomme bisexualité psychique, ne sont-elles pas inhérentes à la vie psychique de chaque individu, qu’il soit femme ou homme ? Prenons un exemple : on pourra dire « c’est un ange, cette fille ! », et « c’est une brute, ce type ! », sans que cela pose aucune question de représentation sociale, alors que le genre newdes mots ne correspond pas au genre sexuel – et pour cause : le genre grammatical n’est pas le sexe.
Analyse / Le Monde du 16/07/2019 / Résultats du baccalauréat 2019 : « L’idéal sacré d’égalité vient d’être bafoué » (collectif)
Des ordres contraires à la loi.
Il y a quelques jours à peine, un événement exceptionnel est intervenu dans l’histoire de notre profession et dans l’histoire récente de notre démocratie : un ministre n’a pas respecté la loi. Il a donné des ordres contraires à la loi, contraires à l’esprit de notre institution. Une note de service annoncée par voie de presse a considéré que l’on pouvait destituer des jurys pourtant définis comme « souverains » par le code de l’éducation. Elle a donné la possibilité à des personnels administratifs – chefs de centres d’examens, proviseurs ou adjoints – de remplacer des enseignants et de définir des résultats à leur place, sans même avoir une connaissance des copies et des règles spécifiques d’évaluation propres au baccalauréat.
Analyse / AOC Média du 10/07/2019 / Pourquoi j'ai fait la grève pendant le bac (Marjorie Galy, enseignante agrégée de sciences sociales)
En juin 2021, il n’y aura plus que 3 épreuves organisées nationalement : le français en épreuve anticipée de première, la
philosophie et le « Grand oral » en terminale (contre 12 épreuves en moyenne actuellement sans compter les options).
À partir de la prochaine rentrée, toutes les autres disciplines vont être évaluées localement, dans chaque lycée, en cours
d’année, dès la classe de première, soit avec des « examens partiels » en décembre et au printemps pour les disciplines
du tronc commun, soit, pour les spécialités, avant ou après les vacances de printemps, afin que les notes puissent être
prises en compte dans Parcoursup.
L’économie budgétaire réalisée est donc énorme pour le ministère mais le transfert de la charge supplémentaire de
travail gratuit, effectuée localement, dans chaque établissement, par les équipes de direction, de vie scolaire et les
enseignants sera considérable. […] Le « bac Blanquer » impose un régime permanent d’évaluation qui peut être
contraire aux apprentissages et à l’épanouissement des élèves.
[…] La liberté de choix proposée aux élèves n’est qu’un leurre, et les élèves et parents de seconde cette année le savent
parfaitement. Toutes les spécialités ne sont pas proposées dans tous les lycées, le nombre de places par spécialité est
contingenté du fait de la taille des salles de classe et des dotations budgétaires en baisse dans chaque lycée. Sur le
terrain, toutes les combinaisons de spécialités ne sont pas possibles. Les élèves peuvent être amenés à changer
d’établissement ou à recourir à l’enseignement à distance du CNED en cas d’offre de spécialité manquante ou
insuffisante dans leur lycée d’origine.
Analyse / Le Monde du 15/07/2019 / « Baccalauréat : « C’est l’entêtement du ministre qui a généré ce chaos » (Fanny Capel, Professeure au lycée Paul Eluard de Saint-Denis)
Professeure de lettres à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) et présidente de l’association Sauver les lettres, Fanny Capel,
dans une tribune au « Monde », s’insurge contre le « gigantesque retournement des rôles » qui voit les grévistes du bac
accusés d’avoir perdu le sens du service public.
Qui a été sacrifié ? Les quelques milliers d’élèves qui risquaient de voir leur inscription à la fac retardée – ou les
centaines de milliers de lycéens qui, dès l’an prochain, plancheront sur le bac six fois en deux ans, sans qu’on leur laisse
le temps de progresser, sur des épreuves élaborées localement, au mépris de la plus élémentaire égalité républicaine ?
Qui a pris les lycéens « en otages » Nous, ou cette réforme qui les contraint désormais de construire leur « parcours » à
l’aveugle, sans information fiable sur les attentes du supérieur, de choisir des spécialités virtuelles car leur lycée ne les
ouvrira pas faute de moyens ?
Qui a perdu « le sens du service public » ? Nous, ou ce gouvernement qui va supprimer 2 600 postes de profs dans le
secondaire, grâce à un tour de passe-passe qui consiste à supprimer les filières pour bourrer toutes les classes dites
générales à plus de 30 élèves, pour « inclure » les élèves handicapés sans aide, pour orienter sans personnels qualifiés,
pour faire passer des nouveaux programmes à l’ambition démesurée sans les horaires nécessaires ?
Texte complet : C'est l'entêtement du ministre qui a généré ce chaos.pdf
L'intempestif / 22/08/2019 / L'arnaque du projet Voltaire (Florence Costa-Chopineau)
Parmi les 37 projets proposés au financement lors du dernier conseil d’administration de mon lycée, l’un des plus scandaleux, et aussi les plus coûteux , concerne le projet Voltaire (2080 euros, une paille, pour un lycée de 2800 élèves). Qu’est-ce que cet objet qui s’affuble d’un nom bien rassurant ? Pensez ! Un philosophe des Lumières ! C’est une florissante entreprise privée, en ligne, créée en 2008, qui propose, moyennant finances, des exercices en ligne d’orthographe à tous ceux qui veulent progresser. Puis, en payant encore, qui délivre une certification, reconnue par les entreprises.
Action / 21/03/2019 / Sauver les lettres a signé le manifeste de l'APMEP (Association des professeurs de
mathématiques de l'enseignement public) et de la SMF (Société mathématique de France), « Pour des mathématiques
dans le socle commun au lycée ».
Les élèves de première générale n’ont qu’une possibilité pour apprendre des mathématiques : celui d’une spécialité qui sera la même pour toutes et tous. Or le programme de cet enseignement est conçu pour des élèves désirant une formation scientifique approfondie. En effet, il est enrichi par rapport à l’actuelle première S, voie pourtant dédiée à la formation des futurs scientifiques, alors que l’horaire hebdomadaire de 4 heures est inchangé. Pour les élèves souhaitant
continuer à se former en mathématiques sans pour autant en faire le coeur de leurs études, par exemple celles et ceux qui s’orientent préférentiellement vers les sciences économiques et sociales et les sciences humaines, il n’y a pas d’alternative. C’est donc du tout ou rien : soit on s’engage dans une spécialisation en mathématiques, soit on n’en fait plus du tout.
Communiqué de presse / Sauver les lettres / 16/04/2019 / Pour le théâtre vivant, contre la censure
Ironie du sort, si Philippe Brunet se contentait de mises en scène plates et ronronnantes, s’il ne s’appuyait pas sur un travail de recherche approfondi sur le jeu d’acteur et les conditions de représentation dans l’Antiquité, il contribuerait sans doute fort peu à la connaissance de la tragédie grecque et n’y intéresserait sans doute personne, mais il n’aurait pas attiré les foudres du CRAN et consorts. C’est parce que Démodocos dépoussière le théâtre antique et le sort de l’entresoi douillet des philologues pour en faire un spectacle vivant qu’il est devenu la cible d’attaques aussi violentes qu’erronées.
Pour que tous les spectateurs, antiquisants ou profanes, puissent profiter d’un regard à la fois libre et érudit sur le théâtre grec, Sauver les lettres demande que Les Suppliantes soient reprogrammées et que les représentations se déroulent en toute sérénité.
Tribune / Le Monde du 11/04/2019 / « Blackface » à la Sorbonne : « Ne pas céder aux intimidations, telle est notre responsabilité »(collectif)
Des personnalités du monde de la culture, dont Ariane Mnouchkine et Wajdi Mouawad, s’insurgent contre une « logique de censure intégriste et identitaire », après les accusations de racisme ayant motivé la perturbation d’une pièce.
Les faits sont connus. Le 25 mars, à la Sorbonne, des activistes se réclamant de l’antiracisme (militants de la Ligue de défense noire africaine, de la Brigade antinégrophobie, etc.) ont bloqué l’accès à la représentation de la pièce Les Suppliantes, d’Eschyle, mise en scène dans le cadre du festival Les Dionysies par l’helléniste et homme de théâtre Philippe Brunet.
[…] « Le théâtre est le lieu de la métamorphose, pas le refuge des identités. » Philippe Brunet, en une phrase, exprime l’enjeu de cet art – de tout art : pouvoir se sentir être autre que « soi-même » – à travers des personnages, des histoires, et rejoindre ainsi toute l’humanité. « L’acteur, sur une scène, joue à être un autre, devant une réunion de gens qui jouent à le prendre pour un autre. »
Tribune / Le Monde du 29/03/2019 / « Non, le masque grec n’est pas un “blackface” (Anne-Sophie Noël)
Doit-on juger les oeuvres du passé, qu’elles soient progressistes ou non d’ailleurs, à l’aune des errances nauséabondes des esclavagistes américains ? S’il ne faut pas ignorer cette histoire-là non plus, doit-elle devenir un étalon universel pour toutes les oeuvres artistiques, y compris celles qui datent d’une époque antérieure ou s’inscrivent dans un contexte culturel entièrement déconnecté ?
Tribune / Le Monde du 11/04/2019 / « La liberté académique est de plus en plus menacée en France » (Olivier Beaud)
En l’espace de quinze jours sont survenus divers événements qui ont pour point commun de révéler l’existence de sérieuses menaces pesant sur la liberté académique (les libertés universitaires, dit-on en France). Cette liberté, assez méconnue chez nous, en raison de la faible place sociale qu’occupent les universités et les universitaires dans l’espace public, peut se définir comme une liberté professionnelle. [...]
Il faut désormais faire reconnaître cette liberté académique pour mieux la faire respecter et comprendre. La justice administrative assure mal, à ce jour, la défense d’une liberté qui n’est pas proclamée en tant que telle par un texte de rang élevé. […] L’intérêt de cette question déborde le seul cadre d’une liberté corporative : il en va de la liberté de la pensée et de la liberté de la science, dont dépend le niveau de civilisation d’un pays.
Humeur / Le billet de François Morel du vendredi 12 avril 2019 / « C'est quoi le théâtre si ce n'est pas le droit de jouer ce qu'on n'est pas ? »
Humeur / Libération / La lettre politique de Laurent Joffrin du 15/04/2019 / Eschyle, le « blackface » et la censure.(collectif)
Le metteur en scène, Philippe Brunet, proteste de ses convictions ouvertes et égalitaires. Mais c’est un individu
éminemment louche puisqu’il est animé de valeurs humanistes et travaille depuis des lustres sur la langue grecque
ancienne, cherchant à mettre en lumière – et à réhabiliter – les influences africaines sur la culture grecque de
l’Antiquité. Un raciste qui s’ignore, donc, qui a eu la criminelle idée de rappeler que les «Suppliantes» avaient sans
doute la peau cuivrée et qu’il a envisagé de leur brunir le visage avec un onguent, avant d’opter pour des masques de
cuivre.
Usant d’un raisonnement péniblement capillotracté, ces censeurs agressifs ont imaginé que ce déguisement de scène
rappelait de manière insoutenable la pratique du «blackface» (se grimer en noir) en usage aux Etats-Unis aux temps de
l’esclavage – ou après - pour se moquer des populations noires. Dans son inconcevable inconscience, Eschyle, vivant au
Ve siècle avant Jésus-Christ, avait omis de prévoir que ses didascalies heurteraient un jour la conscience de certaines
minorités.
Tribune / Le Monde du 18/03/2019 / Lorsque les enseignants courent après le temps » (Fanny Capel)
A quoi ressemble la journée type d’une classe de lycée ? Dans une tribune au « Monde », la professeure de lettres
et membre de l’association Sauver les lettres Fanny Capel raconte ce « fléau de l’école qu’est le manque de temps, le temps perdu, le temps mal employé ».
Rue de Grenelle, la réflexion sur la question des horaires est considérée comme de la basse cuisine. Impossible de faire entendre à des experts qui n’ont jamais mis les pieds dans une classe qu’il s’agit du point névralgique qui détermine le succès ou l’échec de notre enseignement, et qui transforme les programmes successifs, aussi mirifiques soient-ils, en coquilles vides. Sur le pont, profs et élèves n’en ont pas fini avec les cadences infernales. Aujourd’hui, l’école fait parfois appel à des sophrologues en classe, pour lutter contre un stress qu’elle génère elle-même. En parallèle, les cours de soutien privés prospèrent, eux qui proposent aux élèves, contre monnaie sonnante et trébuchante, ce temps d’étude efficace que l’éducation nationale leur refuse.
Presse / Libération du 10/02/2019 / «On demande très tôt aux élèves de se comporter en consommateurs éclairés de l’offre scolaire» (Jean-Yves Rochex)
Interview. Jean-Yves Rochex est professeur en sciences de l’éducation à l’université Paris-VIII et spécialiste des
questions d’inégalités scolaires, de politiques éducatives et de l’éducation prioritaire.
L’objectif de donner plus de liberté aux élèves n’est-il pas louable ?
La cohérence entre la réforme du lycée et celle de Parcoursup conduit à demander très tôt, dès l’entrée au lycée, aux
élèves de se comporter comme des consommateurs éclairés de l’offre scolaire, à même de construire un parcours de
formation individualisé et cohérent. Cela aurait pu être un point positif de lier le parcours au lycée au premier cycle
universitaire. Mais, d’une part, une telle individualisation contribue à nier la conception de l’école comme service
public se référant à des valeurs et objectifs communs pour en faire une offre de services aux individus et aux familles.
D’autre part, ces derniers ne disposent pas des mêmes ressources économiques et culturelles pour être à armes égales
face à cette logique accrue de l’offre et de la demande ou pour faire valoir leurs expériences hors école.
Presse / Le Monde du 25/02/19 / La réforme Blanquer relance la concurrence entre les disciplines (Violaine Morin)
[…] Les changements induits par la réforme ont généré des tensions. Chaque année, les professeurs du lycée se répartissent une enveloppe d’heures. Cette question est particulièrement épineuse avec les nouvelles spécialités : pour pouvoir proposer tous les enseignements promis (entre sept et neuf spécialités en moyenne dans chaque lycée, et jusqu’à douze pour certains), les proviseurs sont obligés de rogner sur la marge horaire, qui permet en temps normal d’enseigner en demi-groupe en langues, en SVT, en physique-chimie… Et qui finance certaines options comme les langues rares ou les arts. De là, naît une concurrence pour se répartir les heures restantes.
Analyse / Café pédagogique du 11/03/2019 / Lycée : Le "libre choix" des élèves soumis à la gestion des moyens
" Vous avez la liberté de choisir en suivant vos goûts et vos centres d'intérêts". C'est ce que JM Blanquer promet aux lycéens dans une vidéo diffusée par le ministère de l'éducation nationale pour justifier la réforme du lycée. Or une note de la Dgesco en date du 6 mars 2019 éclaire "le traitement des choix des enseignements de spécialité de 1ère générale" par les établissements. Le principe du libre choix des élèves est en fait cadré par une règle bien plus forte : la gestion
administrative. Les élèves ne sont libres de choisir que dans les spécialités que l'administration veut bien leur offrir et s'ils le méritent par leurs notes.
Note DGESCO mars_2019 Traitement des choix de _enseignements
Presse / Vousnousils du 19/03/2019 / Plan « Bienvenue en France » : un risque pour l’attractivité
En novembre dernier, le gouvernement annonçait l’augmentation des frais de scolarité dans les universités pour les étudiants extra-communautaires. Ainsi, dès la rentrée 2019 et la mise en place du plan « Bienvenue en France », les étudiants étrangers devront s’acquitter de 2770 euros de frais d’inscription en Licence et de de 3770 euros en master. Le rapport parlementaire présenté mercredi 13 mars déplore la mise en oeuvre « précipitée » de cette réforme. D’après les auteurs, « tous les acteurs du monde universitaire s’accordent (…) pour indiquer que la mesure devrait produire, dans le court terme, un effet d’éviction aux conséquences potentiellement importantes ». En d’autres termes, cela signifie que l’attractivité de la France dans l’enseignement supérieur risque de souffrir du plan « Bienvenue en France ». Pour illustrer cela, les auteurs prennent en exemple les cas de la Suède et du Danemark, pays ayant également mis en place des politiques similaires en 2011 et 2006. Dans ces deux pays, le nombre d’étudiants étrangers a baissé de 30% en 3 ans en Suède et de 35% au Danemark dès la première année.
Réforme / Bulletin officiel spécial n°1 du 22/01/2019 / Nouveaux programmes du lycée général et technologique
Presse / Le Figaro 18/12/2018 / Réforme du lycée : «Des déserts scolaires vont se constituer»
Interview. Professeur agrégé de lettres, Fanny Capel est membre du collectif «Sauver les lettres». Elle dénonce une réforme du baccalauréat à visée «purement économique».
Sur les douze spécialités proposées aux élèves dans le cadre de la réforme, trois intègrent la littérature. Est-ce satisfaisant ?
La suppression des filières et la mise en place des spécialités mettent inévitablement les disciplines en concurrence. Dans les établissements, on va assister à une véritable bataille de chiffonniers qui ne sera pas forcément profitable aux lettres. Si les filières S et ES pourront aisément se recréer, ce ne sera pas le cas pour la filière L. Qui va choisir la spécialité «Humanités, littérature et philosophie»? Cela ressemble à de la culture générale molle. Les professeurs de philosophie estiment qu'ils vont y perdre. Quant au programme, il renvoie une image plutôt rébarbative. Surtout, il sera directement en concurrence avec la spécialité «Langues, littératures et cultures étrangères», plus attractive pour les élèves. Que dire, enfin, de la spécialité «littérature, langues et cultures de l'Antiquité» qui ne sera sans doute pas proposée dans tous les lycées?
Réforme / 13/01/2019 / Lycée et post-bac, spécialités et options : effets d'annonce et de seuils (SNES-FSU)
Les lycées ruraux, les petits établissements ou les moins favorisés socialement ne pourront pas assurer le maximum de possibilités de parcours. Pour enrichir sa formation, le lycéen sera condamné à aller voir ailleurs pour une partie de ses enseignements, dans un autre lycée, en visio-conférences ou au CNED. Certaines spécialités sont affichées comme implantées dans un lycée alors que les cours auront lieu ailleurs. Il faut avoir en tête que ces cartes de formations (…) ne sont finalement qu’indicatives car il faut s’attendre à des ouvertures conditionnées par des effectifs minimum.
Presse / Le Monde / 29/01/2019 / Choix des spécialités en première : l’ombre du supérieur (blog de Claude Garcia)
Officiellement, la réforme du lycée doit le simplifier et donner plus de souplesse au parcours des lycéens, qui ne seraient plus enfermés dans des filières. [...] Théoriquement, un élève, si les spécialités sont ouvertes dans son établissement peut prendre: physiques, arts et langues. Il est normal de rencontrer un élève qui prendrait ce menu pour savoir, s’il est suffisamment cohérent et si cela ne débouchera pas sur une sévère crise de foi, quant à son futur parcours dans le supérieur. Ce qui est plus déplaisant, c’est que les professeurs et bientôt les familles se rendent compte que les dés sont pipés. Au moins, l’UPA (Union des professeurs des classes préparatoires aux grandes écoles agronomiques, biologiques, géologiques et vétérinaires) ne s’embarrasse pas de scrupules. Leurs recommandations sont très claires. Les élèves doivent choisir dans l’ordre qu’ils veulent… uniquement trois spécialités parmi les trois spécialités:maths, SVT, physique. L’UPA en appelle donc à la reconstitution de la série S
Presse / Libération / 04/02/2019 / Réforme du lycée : tohu-bohu dans les bahuts (Marie Piquemal)
On a vite su que cette réforme allait aggraver les inégalités territoriales. Bien sûr, jusqu’ici, la situation n’était pas géniale, les élèves n’avaient pas les mêmes chances selon leurs origines territoriales et sociales. On sait bien que dans notre système éducatif, les différences sociales déterminent la réussite. [...] Mais quand même. L’offre restait comparable, il y avait un minimum de démocratisation. Tous les jeunes, y compris dans notre lycée rural, pouvaient choisir S, L, ES ou STMG [sciences et technologies du management et de la gestion, ndlr]. On les préparait le mieux possible au bac, pour leur ouvrir les portes de la fac au moins. Avec la réforme, les élèves n’auront le choix qu’entre sept spécialités maximum sur les douze existantes. Les cinq autres, ils en sont privés.
Action / 03/02/2019 / Communiqué de presse (associations littéraires APFLA-CPL, APLAES, CNARELA, SEL, SLL)
Les associations signataires réunies autour de la CNARELA saluent la parution, au JORF du 25 janvier 2019, de l'arrêté du 31 décembre 2018 consacré aux épreuves du nouveau baccalauréat général de 2021 : « Le cas échéant, les points excédant 10 sur 20 de l’évaluation des résultats de l’élève au cours du cycle terminal pour chaque enseignement optionnel « Langues et Cultures de l’Antiquité », retenus et multipliés par un coefficient 3,s’ajoutent à la somme des points obtenus par le candidat à l’examen. »
Ce texte offre des garanties claires aux élèves de lycée qui étudient le latin et le grec en option […] Cependant, la mise en oeuvre de la réforme du lycée soulève de très nombreuses inquiétudes. [...] Dans nombre d'académies, il sera difficile aux élèves de trouver un lycée comportant ces enseignements.
Analyse / Mezetulle, 10/01/2019 / Programme « Humanités, Littérature et Philosophie » : Jean-Michel Blanquer digne héritier de ses prédécesseurs. Où est passé l’enseignement de la philosophie ? (Jean-Michel Muglioni)
La nouvelle matière HLP – Humanités, Littérature et Philosophie –, qui n’est pas une discipline, a nécessairement donné lieu à un programme improbable, un fourre-tout, où la spécificité de l’enseignement philosophique français est remise en cause. Ses auteurs ont beau s’en défendre, ce n’est que de la culture générale au plus mauvais sens. Mais que pouvaient-ils faire d’autre une fois cette pseudo-discipline imposée ? [...]
Je pose seulement une question : de quel droit une commission peut-elle non pas renouveler un programme de philosophie, mais proposer une nouvelle discipline qui ne correspond à aucune discipline universitaire, avec un programme qui remet en question tous les principes sur lesquels repose l’enseignement philosophique dans le second degré et en classe préparatoire, enseignement spécifique qui, comme l’a dit le ministre, fait (ou faisait !) l’originalité du secondaire français.
Action / 01/01/2019 / Pétition / Appel des 113 - Ne modifiez pas la Loi de 1905 de séparation des Eglises et de l'Etat
Depuis 113 ans, la Loi de séparation des Églises et de l’État est un texte fondateur de notre République. Cette loi et nulle autre, assure la liberté de conscience et affirme sans ambigüité ni faux-semblants que la République ne reconnaît, ne salarie, ne subventionne aucun culte. Elle garantit le libre exercice des cultes assuré par des associations dont l’objet et le patrimoine doivent être strictement cultuels.
Par l’esprit et la lettre, elle œuvre au rassemblement des êtres humains par-delà leurs différences. Avec la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, elle est au cœur du fonctionnement de notre vie collective, elle est le moteur du développement de nos libertés, elle contribue de manière décisive à l’égalité entre tous les citoyens quelles que soient leurs convictions.
Manifestation laïque à Paris (collectif Sauver les lettres, 12/2005)
Nous tenons à rendre hommage à la loi de séparation de l’église et de l’état, dont on commémore le centenaire. Car l’école républicaine, partant du postulat d’Helvetius (" tant qu’ils s’obstineront à regarder les cieux, les hommes trébucheront sur terre "), a patiemment donné aux hommes les moyens d’observer avec raison, méthode, et rigueur, la terre et les hommes qui les entouraient, ainsi que leur passé. [...]
La revendication de la laïcité est l’exigence d’un lieu ouvert à l’échange libre, rationnel, et sans exclusive. Car il est arrivé que la littérature rende hommage à la portée littéraire - c’est à dire créatrice d’un univers imaginaire - de certains textes religieux ; il est même arrivé que des écrivains défendent par leur art, la liberté religieuse, ou la foi. Mais il n’est jamais arrivé que la religion, quelle qu’elle soit, défende la littérature.
La nécessité d'enseigner les Lumières (Agnès Joste, 06/2012)
L'enseignement des Lumières : accéder aux fondements de la laïcité.
L'effort des écrivains des Lumières est d'arracher l'homme à toutes les entraves à l'exercice de la raison (« Ecrasons l'Infâme !»), pour lui donner ou lui rendre sa liberté de pensée. La première entrave est la religion, qui asservit les esprits. Dans un contexte scolaire, les philosophes les plus accessibles et les mieux à même de le montrer sont Montesquieu et Voltaire. Leur étude, pendant la classe de Première, montre comment l'idée de séparer l'Eglise et l'Etat a pu mûrir et se faire jour, sans que la notion soit encore théorisée.
Tolérance et laïcité (Didier Guilliomet, 12/2013)
La laïcité est une sorte de catharsis du politique et du religieux : la séparation des Eglises et de l’Etat conduit à une autonomisation et à une affirmation de la souveraineté populaire et permet, d’autre part, de dégager la religiosité de tout l’aspect statique et étatique dans lequel il arrive que les religions perdent leur âme.
Tribune / Le Monde du 29/01/2019 / « Dans un salon consacré au livre, et à la littérature française, n’est-il plus possible de parler français ? » (collectif)
Dans une tribune collective au « Monde », une centaine d’écrivains, d’essayistes, de journalistes et d’artistes s’indignent de voir le « globish », un sous-anglais, supplanter notre langue dans les médias, à l’université et jusqu’au prochain salon « Livre Paris ». « Pour la deuxième année consécutive, la littérature Young Adult est mise à l’honneur au salon Livre Paris », lit-on sur le site Internet de cette manifestation qu’on appela longtemps le Salon du livre, et qui se tiendra du 15 au 18 mars. […] Nous savons fort bien qu’il s’agit au fond de commerce et de mercatique, d’impérialisme linguistique pour mieux vendre partout les mêmes produits, de colonialisme culturel accompagnant la mondialisation économique. Pervertissant jusqu’à l’inconscient de la responsable de la programmation de la « scène YA », qui écrivait à l’un d’entre nous trouver spontanément le mot « bookroom » plus « dynamique » que n’importe quel équivalent français.
Défense_du_français.pdf
Action / 15/11/2018 / Communiqué de presse / Programmes et baccalauréat de français au lycée : des avancées dans un champ de ruines. (Sauver les lettres)
L'amélioration sensible des études de français au lycée va se perdre dans des conditions de vie scolaire qui vont électriser établissements et élèves. […] Nous ne considérons pas l'enseignement du français comme une oasis qui serait préservée au sein d'un lycée et d'un baccalauréat en ruines. Nous nous élevons contre les conditions d'étude faites aux lycéens dans une massification brutale de leurs parcours, contre les inégalités de leur orientation, contre l'injustice territoriale des « déserts scolaires » qui vont se constituer faute d'offre de spécialités, et contre la perte du caractère terminal, national et anonyme de leur baccalauréat, qui va les assigner à leurs origines et déterminer par avance leur entrée dans le supérieur.
Réforme / Conseil supérieur des Programmes, 15/10/2018 / Élaboration des projets de programme du nouveau lycée / Projets de programme des classes de seconde et de première (voies générale et technologique)
La réforme du baccalauréat et du lycée (voies générale et technologique) annoncée le 14 février 2018 par le ministre de l’Éducation nationale appelle l’élaboration de nouveaux programmes ainsi que de nouvelles modalités d’évaluation des élèves qui s’inscrivent dans l’esprit de cette réforme.
Actions / 10/10/2018 / Déclaration de 44 professeurs de philosophie de l'académie de Rouen.
Contrairement à ce que les commentateurs répètent à l’envi, une réforme ne répond jamais seulement, ni d’abord, à des exigences techniques, ni même économiques. Elle vise essentiellement des effets d’ordre politique, au sens le plus large du terme : les formes de conscience et les conduites qui déterminent l’organisation de la société. C’est de ce point de vue qu’il faut donc d’abord la juger. L’enjeu est d’autant plus grave que ce projet concerne l’école, c’est-à-dire la
jeunesse. Nous ne voulons pas d'une école d'inspiration ultra-libérale, «territorialisée», qui flatte hypocritement le consumérisme, s'appuie trompeusement sur une idéologie du libre choix accordé à des élèves de 14/15 ans, fait miroiter des perspectives mirobolantes de réussite et aboutit à une réduction drastique des possibilités réelles d'enseignement au lycée et à une compétition dans laquelle les familles (parents et enfants) en seront pour leurs frais.
Actions / 08/10/2018 / Menace de fermeture des Lettres Classiques à Pau (Julie Gallégo)
En proie à des problèmes budgétaires, l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (UPPA) compte sacrifier certaines formations du nouveau Collège Sciences Humaines et Sociales au nom de la « rentabilité ». Lettres Classiques, Histoire de l’Art et LEA Anglais-Allemand ont ainsi été pointés du doigt comme les mauvais élèves dont il faudrait se débarrasser. Une « hypothèse de travail » nous a été brutalement dévoilée ces derniers jours : pas d’ouverture de la première année de Licence (L1) Lettres Classiques à la prochaine rentrée, pour « faire mourir » en deux ans maximum ce parcours de la filière Lettres.
Actions / 10/10/2018 / Après les promesses rassurantes du ministre, nous attendons des actes (associations littéraires APFLA-CPL, APLAES, APLettres, CNARELA, SEL, SLL)
Nos associations se réjouissent d’avoir été entendues sur le point crucial que représente le maintien du « bonus »
(triplement des points au-dessus de 10) accordé aux candidats qui présentent l’option de latin et/ou de grec ancien au baccalauréat. […] Mais la plus grande prudence est de mise. Nos associations rappellent que les attaques de l’administration contre les langues anciennes perdurent, au collège comme au lycée ; ainsi, la récente note de service signée par le Directeur général de l’enseignement scolaire réduit-elle la nouvelle spécialité « Littérature, Langues et Cultures de l’Antiquité » à une portion congrue que se partageraient quelques lycées par académie.
Analyse / Mediapart du 28/09/2018 / L'enfant chargé de chiffres (blog de Stella Baruk)
Contribuant aux hautes températures de la rentrée, et pour qui l’ignorerait, depuis le 17 septembre et jusqu’au 12 octobre ceux de nos écoliers qui entrent en CP et en CE1, ont été ou seront soumis à des « évaluations ». Ce qu’il s’agit d’évaluer, ce sont leurs « compétences » dans les matières reines, français et mathématiques. La démarche d’ensemble concernant plus de un million et demi de « petits » élèves, elle ne peut laisser indifférent quiconque s’intéresse à l’école ; et une fois examinée de plus près, ne peut manquer de donner le désir d’intervenir. [...]
Ce que ces évaluations semblent laisser prévoir, c’est qu’avec les meilleures intentions du monde, le petit sujet connaissant qui entre en classe aujourd’hui a toute chance d’être regardé par l’institution scolaire comme un « sujet neurocognitif » qui, plutôt qu’un apprentissage, subira un entraînement, sur le mode sportif de la recherche de performance. Ce qui serait une erreur, elle, grave, éthique, psychologique, pédagogique, épistémologique. Et qui laissera nombre d’enfants en chemin.
Presse / Le Monde du 17/10/2018 / La Cour des comptes signe l’aveu d’échec des politiques d’éducation prioritaire.
C’est un constat déjà ancien, et pourtant d’une criante actualité : les politiques d’éducation prioritaire ne parviennent pas à accomplir leur mission première, qui est de réduire les inégalités de départ dans la réussite scolaire des enfants.
Dans un rapport publié mercredi 17 octobre, la Cour des comptes dresse un bilan négatif de cette politique de « différenciation » des moyens, née en 1981 avec les « zones d’éducation prioritaire » (ZEP). La conclusion est sans appel : l’écart de résultat au diplôme national du brevet entre un enfant scolarisé dans un collège relevant du réseau
d’éducation prioritaire (REP) et un enfant d’un collège favorisé reste situé entre 20 et 30 % en français et en mathématiques alors que l’objectif est de « limiter à 10 % ces écarts de niveau ». Certes, admet la Cour, les dispositifs prioritaires ont permis de les stabiliser, et la situation serait probablement plus préoccupante encore s’ils n’avaient pas existé.
Presse / Libération du 24/10/2018 / L'Éducation nationale donne-t-elle vraiment plus aux élèves défavorisés ?
L’Education nationale ne s’en vante pas, mais elle a de plus en plus recours à des enseignants contractuels, c’est-à-dire des personnes titulaires d’un niveau licence ou master mais qui n’ont pas passé le concours d’enseignant, et n’ont donc pas suivi la formation initiale de deux ans. [...]
Les écarts sont saisissants : il y a trois fois plus de contractuels dans les territoires défavorisés que dans les beaux quartiers. Avec des différences encore plus accentuées à l’intérieur même des départements. Ainsi par exemple, dans les territoires les plus pauvres du Val d'Oise, les collèges comptent près de 18% d’enseignants contractuels, alors que dans les banlieues favorisées du 93, la proportion tombe à 7%. A Paris, qui à l’exception de quelques poches de pauvreté, est socialement favorisé, le recours aux contractuels est faible, mais là encore avec des différences : 5,4% dans la plupart des quartiers et 8,2% dans les lieux cumulant le plus de difficultés économiques.
Réforme : Bulletin Officiel, n°32 du 06/09/2018 / Lycées d'enseignement général et technologique – Enseignements de spécialité.
Le recteur d'académie ou le vice-recteur arrête la carte académique des enseignements de spécialité. […] Les enseignements de spécialité plus spécifiques (arts, littérature et LCA, ainsi que numérique et sciences informatiques, et sciences de l'ingénieur, dont l'offre sera amenée à progresser dans les prochaines années) feront l'objet d'une carte académique, voire nationale pour les plus rares d'entre eux. (sic)
Réforme / Publications du CSP du 18/06/2018 / Projets d'ajustement et de clarification des programmes de quatre enseignements pour la scolarité obligatoire (cycles 2, 3 et 4)
Projet d'ajustement et de clarification des programmes de français des cycles 2, 3 et 4
Étude de la langue (grammaire, orthographe, lexique).
L’étude de la langue s’appuie sur l’observation et la manipulation d’énoncés oraux et écrits issus de corpus soigneusement constitués. [...] Les connaissances se consolident dans des exercices réguliers et répétés et des situations de lecture et d’écriture. La mémoire a besoin d'être entretenue pour que les acquis constatés étape après étape se stabilisent dans le temps et deviennent automatisés, facilités par des exercices de copie et de dictée. Des activités ritualisées fixent et accroissent les capacités de raisonnement sur des énoncés et l'application de procédures qui s’automatisent progressivement. (p. 14)
Réforme / Le Point du 30/06/2018 / Programmes : Je ne pense pas que la grammaire soit négociable (Souâd Ayada, présidente du Conseil supérieur des Programmes, propos recueillis par Émilie Trevert)
Quant au passé simple, temps jugé « discriminant » – qui n'était plus enseigné qu'aux troisièmes personnes du singulier et du pluriel jusqu'en sixième –, vous le réhabilitez.
L'enjeu est majeur. Ce qui se joue dans ce traitement du passé simple, c'est l'idée que ce qui règle l'enseignement, ce sont nos manières de plus en plus appauvries de parler. C'est un parti pris, extrêmement contestable, qui renvoie à un autre parti pris : la langue orale serait la norme de la langue écrite. C'est un renversement inquiétant ! Jusqu'à il y a peu, c'était l'écrit qui constituait la norme de l'oral. On assiste à un nivellement par la langue orale, qui est soumise à l'impératif de communication, qui cède à la rapidité, à la simplification. Toutes les subtilités temporelles disparaissent dans l'expression orale ! [...]
Je ne comprends pas le choix, dans les programmes actuels, de n'enseigner le passé simple qu'aux troisièmes personnes. Comme si, en mathématiques, on apprenait 2 x 4 et pas 2 x 6 ! On interdit ainsi l'accès à des pièces maîtresses de notre littérature. Un élève qui n'a jamais appris le passé simple, comment pourra-t-il lire des oeuvres écrites à la première personne du passé simple ?
L'Intempestif du 11/06/2018 / Révision des programmes de collège : encore un effort Monsieur Blanquer ! (Virginie Blanchet)
Comment enseigner la grammaire dans ses subtilités et ses richesses, de manière progressive et spiralaire à raison d’une heure trente par semaine tout en faisant écrire régulièrement des textes longs, et lire et étudier suffisamment d’oeuvres exigeantes (et non pas seulement des oeuvres « brèves, simples, à la mode » pour que les élèves aient accès à un véritable bain culturel ? La mission est impossible et ces injonctions pédagogiques, pourtant de bon sens, ne feront que renforcer la culpabilité et le mal-être des enseignants si on ne leur donne pas le moyen de les appliquer. Et c’est d’autant plus vrai que les élèves d’aujourd’hui ont déjà manqué d’heures de français en primaire et arrivent au collège le plus souvent désarmés face aux mots.
Presse / Le Monde du 04/09/2018 / Faut-il brûler l'accord du participe passé ?
« Nous n’avons pas le temps nécessaire pour enseigner la grammaire ».
Sans être hostile à la proposition des Belges Arnaud Hoedt et Jérôme Pitron concernant la simplification de la règle sur l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir, Fanny Capel, présidente de Sauver les lettres, pense que celle-ci est hors sujet, car il faudrait déjà que les élèves comprennent vraiment ce qu’est un participe passé.
Si les élèves, au collège et au lycée, comprenaient vraiment ce qu’est un participe passé et cessaient de l’écrire avec une terminaison en « er » (« le professeur est entrer ») ou en « ez » (« les professeurs sont entrez »), ce serait déjà un grand pas !
Alors, pourquoi dites-vous que c’est « hors sujet » ? Parce que dans les classes, nous ne disposons pas du temps nécessaire pour enseigner le participe passé, ni même la grammaire en général. Pour maîtriser la grammaire, il faut systématiser et intégrer des automatismes. Ce qui est le plus difficile et le plus long à enseigner, c’est la grammaire de phrase. Les élèves ne peuvent pas maîtriser leur expression s’ils ne peuvent pas repérer les différentes fonctions dans une phrase. Non seulement, il faut apprendre les règles, mais aussi, pour reconnaître ces différentes fonctions, il faut prendre le temps de manipuler les phrases.
Or, aujourd’hui, pour les élèves, la grammaire est une sorte de mangrove inextricable dans laquelle ils ne se retrouvent pas. Ils ne possèdent que des lambeaux de grammaire. Nous enseignons sur des sables mouvants. Il faut savoir quel est le trouble des élèves quand nous reprenons, en classe de seconde, la règle de l’accord du participe passé ! Mais tout cela
vient de loin. Jusqu’au début des années 1980, il y avait six heures de français par semaine au collège, aujourd’hui c’est 4 heures ou 4 heures 30. Entre le CP et la seconde, les élèves ont perdu 600 heures d’enseignement du français par rapport aux années 1970.
Presse / Vousnousils du 25/04/2018 / Certains médias parlent de l'école sans la connaître (Danielle Manesse)
J’ai travaillé pendant 40 ans en banlieue populaire et ce qui me frappe, c’est la désinformation, la manière dont certains
médias parlent de l’école sans la connaître.
Y aurait-il une désinformation au sujet des établissements de banlieues populaires ?
Cette désinformation résulte d’une vision préalable dramatisante. En banlieue, il y a certes des classes difficiles mais aussi des classes et des élèves qui marchent très bien ! J’ai vu des classes tenues d’une main de fer avec des profs experts, qui travaillent en équipe et qui s’intéressent aux enfants sans brader l’enseignement. Dans bien des médias, il y a un regard homogénéisant sur ces établissements. Quand on ne connaît pas, on lisse la réalité. Cette représentation dramatisante des établissements, ça participe de la peur des pauvres, dont on parle depuis le 19ème siècle (par exemple par Victor Hugo). Parce que l’on sait qu’il y a des casseurs qui brûlent des voitures la nuit de Noël, parce que l’économie de la drogue fait des ravages, que des enfants décrochent… mais il n’y a pas que cela !
Presse / Libération du 10/06/2018 / La sélection au mérite renforce-t-elle les inégalités sociales ? (Claude Obadia)
Les politiques de démocratisation du système éducatif n’ont fait que renforcer le phénomène de la reproduction des élites. Alors que 15 % des lauréats des trois concours les plus sélectifs (ENS, ENA, Polytechnique) étaient issus de la classe ouvrière en 1969, cette proportion est tombée à 7 % en 1999, soit après trente ans de politique de démocratisation du système éducatif ! La ségrégation sociale n’est donc aujourd’hui aucunement le fait des politiques méritocratiques. Et si la France, au sein de l’OCDE, est aujourd’hui la triste championne des inégalités sociales en matière de politique éducative, ce n’est pas parce qu’on y sélectionne les élèves mais au contraire parce qu’en cessant de les sélectionner dans l’enceinte de l’école, nous avons renforcé la sélection la plus cynique, la «sélection sociale» qui s’opère hors les murs lorsqu’on cesse de faire valoir les mêmes exigences pour tous les élèves quel que soit leur milieu socioculturel.
Presse / Le Monde du 06/08/2018 / Paul Devin : « Pour améliorer la formation des enseignants, il ne suffira pas d’être “ inventif ” »
Une […] prise en compte du mérite conduit à produire des réussites superficielles, essentiellement centrées sur la volonté de satisfaire les indicateurs mais incapables de répondre aux enjeux d’une éducation émancipatrice et d’une réelle égalité de réussite. Ensuite parce que, installant des concurrences entre les agents, elles se développent au mépris des dynamiques de l’action collective.
Enfin parce que l’impossibilité d’identifier la part précise de chaque enseignant dans les résultats des élèves conduit à fonder l’évaluation davantage sur des attitudes de conformité à la demande qui sont loin d’être, par nature, porteuses d’une amélioration de la réussite scolaire des élèves. Les évaluations des élèves prévues en CP, CE1, sixième et seconde seront-elles capables de faire la preuve de leur objectivité pour rompre avec l’expérience de l’évaluation CP 2017 ? Celle-ci était davantage apparue aux enseignants comme l’instrument de prescription pédagogique du ministre que comme un outil au service de l’organisation des enseignements.
L’expression de la volonté d’une nouvelle culture de l’évaluation nécessitant la création d’une instance interroge sur ses enjeux réels : le Conseil national d’évaluation du système scolaire n’est-il pas déjà, aujourd’hui, une instance permettant une évaluation transparente et publique ?
Presse / Marianne du 10/09/2018 / Pendant que Parcoursup déraille, les établissements privés sont à la fête
Alors que Parcoursup vient d'en finir avec la phase principale d'admission, [...] (le) 5 septembre, sur 812.000 candidats à une poursuite d'études au mois de mars, ils étaient encore 113.062 bacheliers ou étudiants en réorientation à ne pas savoir où diable ils allaient étudier cette année… Où en sont-ils aujourd'hui ? Impossible de le savoir, le ministère ayant interrompu la communication de statistiques jusqu'au 21 septembre. Ce que l'on sait, c'est qu'en six mois, près de 180.000 jeunes ont quitté la plate-forme sans que l'on connaisse leurs motivations. Soit un peu plus de 20% des personnes qui s'y étaient initialement inscrites sur la plate-forme. Reste à retrouver leur trace… Ont-ils été poussés dans
les bras des établissements privés, découragés par la lenteur du successeur d'APB ?
Augmentation des demandes d'inscription
"Dans l'enseignement supérieur privé, une tendance se dégage, explique à Marianne Christine Fourage, secrétaire générale de la SNPEFP-CGT. Très clairement, il y a eu une augmentation sensible des demandes d'inscription pour cette rentrée 2018… Que ce soit dans les écoles privées (d'ingénieurs, de commerce ou de management par exemple) ou dans les universités catholiques qui proposent quelques formations hors Parcoursup". Une affirmation qui se vérifie auprès des établissements qui veulent bien communiquer leurs chiffres
Presse / Le Monde du 16/09/2018 / Blanquer annonce la suppression de 1 800 postes dans l’éducation nationale
en 2019
Il se dit dans la communauté éducative que Jean-Michel Blanquer a mis un coup de volant à gauche avec les mesures sociales de la rentrée – montée en puissance des classes dédoublées, mise en chantier d’une réforme de l’éducation prioritaire… Mais en matière d’emploi, c’est plutôt à droite que le ministre de l’éducation se classe, affirmaient lundi 17
septembre, d’une même voix, les syndicats d’enseignants, réagissant à l’annonce de 1 800 suppressions d’emploi pour l’année scolaire 2019-2020 faite, la veille. Un virage, après les 60 000 postes créés sous la gauche – dont 54 000 dans l’éducation nationale.
L'Intempestif du 11/06/2018 / Feu, flamme, erreurs, coquilles, « oublis »... Le ministère et les langues anciennes : je
t’aime, moi non plus ! (Agnès Joste)
Dans les arrêtés définitifs une malencontreuse coquille (une regrettable confusion entre un « f) » et un « g) » dans les notes de bas de page) retirait aux langues anciennes leur statut particulier d’option supplémentaire en Première.
Le diable se niche vraiment partout, jusque dans l’alphabet. [...]
Le collectif Sauver les lettres réclame donc de toute urgence une publication fidèle aux textes officiels promulgués par arrêté, et la suppression de toute version fautive du site ministériel.
Presse / Le Point du 18/06/2018 / Bac 2018 - Consignes, pressions, menaces : comment on gonfle les notes du bac (Emilie Trevert)
« Le niveau baisse et on nous demande sans arrêt de tirer les élèves les plus faibles vers le haut aux dépens des plus
forts, témoigne Jean*, prof en série technologique dans l'académie de Caen. Si je mets un 5/20 à une copie nulle et
un 19 à une très bonne, on me dit : Ce n'est pas possible, il n'y a pas tant de différence que ça entre les élèves ! On doit
donc les noter entre 8 et 14, et non pas de 0 à 20. Je ne parle même pas des académies comme la Polynésie, Mayotte ou
la Guyane, où le taux de réussite est fixé à l'avance, et après, seulement, on harmonise ! » Jean a été vice-président de
jury en Polynésie avant de se faire « éjecter » : « J'ai refusé de bidouiller. »
Réforme / Juin 2018 / Transformer le lycée professionnel : former les talents aux métiers de demain. (Jean-Michel Blanquer)
Télécharger le dossier
Réforme / Site SNUEP-FSU du 28/05/2018 / Réforme voie Pro 2018 – Projets de grilles horaires.
Après la perte d’une année de formation en 2009, la formation des élèves est de nouveau tronquée. Les grilles horaires proposées le 28 mai 2018 viennent contredire le discours du ministre autour des savoirs fondamentaux, qui font son fond de commerce depuis sa nomination au ministère de l’Éducation nationale.
Les matières générales sont les premières concernées par une baisse de volume [-138 heures soit 18 %] . La globalisation de la PSE et de l’éco-gestion/éco-droit constitue un point de vigilance particulier : l’absence de fléchage pour ces disciplines peut sous-tendre une menace pour leur maintien.
Presse / Libération du 05/06/2018 / Blanquer porte le coup de grâce à l'enseignement professionnel (Tribune de V.
Durey et E. Joshua).
Qui peut imaginer donner une formation correcte à nos élèves en les privant sur trois ans de 16% d’heures de mathématiques, 13% en lettres-histoire ? On s’en remet à l’apprentissage qui serait la solution de tous nos maux et on abandonne les fondamentaux. On abandonne l’égalité des chances. Ces futur.es salarié.es n’ont donc pas besoin de
savoir ; il suffit de leur apprendre les gestes de l’exécution. Qui voudrait d’une telle école pour ses enfants ? [...]
En 2009, pour «revaloriser l’image de la voie professionnelle» – l’obsession de nos gouvernants – le gouvernement de M. Sarkozy décide la réforme du bac pro en trois ans. Jusque-là nous avions quatre années pour amener nos élèves au bac pro. […] Au final, cette réforme a permis de supprimer de nombreux postes d’enseignants mais de bilan pédagogique, il n’a jamais été question… Le bac pro a 30 ans. 30 ans c’est un bel âge, celui des premiers bilans et de tous les espoirs possibles. Votre réforme, M. Blanquer, est en train de les tuer.
Presse / Le Monde du 18/06/2018 / Parcoursup se limite à assurer la réussite des bons candidats (Monique Canto-Sperber))
En dépit de ses promesses initiales, Parcoursup ne tardera pas à apparaître comme un dispositif d’orientation peu apte à assurer la réussite du plus grand nombre d’étudiants ; il se limitera à assurer celle des candidats qui ont déjà le plus de chances de réussir. Que ces bons étudiants fassent leurs études dans des groupes de niveau homogène, n’a rien d’illégitime ; c’est même la condition pour que les cursus universitaires attirent les lycéens les plus brillants, qui aujourd’hui vers les classes préparatoires. Mais il est désolant que les candidats qui ont eu un parcours scolaire moins régulier ne disposent pas eux aussi des meilleures offres de formation.
Presse / Le Monde du 18/06/2018 / Pierre Mathiot : « Il faut intégrer le bac à Parcoursup pour lui redonner tout son sens »
Un autre sujet concerne le cadrage des enseignements de spécialités que les lycéens auront à choisir en première et en terminale, à côté de leur tronc commun. S’il est difficile d’imaginer que chaque lycée aura les moyens de proposer toutes les matières, il est important que l’institution garantisse une forme d’équité à tous les lycéens sur le territoire. Le ministre a évoqué en février le fait que les lycées souffrant d’un déficit d’image, les établissements « défavorisés », soient soutenus pour proposer une offre attractive. Cela me semble fondamental.
Presse / Le Monde du 31/08/2017 / Les 60% d'échecs à la fac cachent une réalité plus complexe (Camille Stromboni)
Ces 60 %, issus des enquêtes annuelles du ministère, apparaissent largement gonflés par rapport à une réalité bien plus complexe dans les amphis. [...]« Ces indicateurs doivent être remis en question, prévient François Sarfati, chercheur au Centre d’études de l’emploi et du travail. On ne peut parler d’échec ou de décrochage pour des jeunes qui n’ont jamais accroché à l’université. » « En mettant en avant seulement ces chiffres pour justifier l’action publique, le gouvernement fabrique une dramaturgie sur les jeunes à l’université, observe-t-il.
Analyse / Economie et statistique (INSEE) du 13/06/2018 / 50 % à la licence... mais comment ? Les jeunes de familles populaires à l’université en France (Y. Brinbaum, C. Hugrée, T. Poullaouec).
Au moment où les débats concernant l’entrée et la réussite à l’université sont au plus vif, notre analyse identifie un des principaux noeuds du problème : d’un côté, des familles et des jeunes aspirant de plus en plus à un diplôme de niveau bac + 3, y compris dans les classes populaires, de l’autre des inégalités d’orientation et de réussite qui prennent principalement racine dans les premières années de scolarité. Plus que jamais, l’objectif de démocratisation de l’enseignement supérieur est indissociable de la lutte contre les inégalités scolaires dès l’enseignement primaire.
INSEE_499_Brinbaum-Hugree-Poullaouec-FR.pdf
Analyse / Le Monde du 03/06/2018 / Il faut lutter contre cet anglais simplifié qui formate la pensée. Vidéo (Barbara Cassin)
Élue à l’Académie française le 3 mai, Barbara Cassin explique pourquoi il ne faut pas céder au « global english », une langue anglaise simplifiée qui véhicule, selon elle, des valeurs contestables. Il ne s’agit pas de protectionnisme de la langue mais bien au contraire d’une volonté de défendre la diversité et de lutter contre le « ranking » (« classement ») et le « formatage de la pensée ». « Il n’y a pas un langage, explique la philosophe, mais des langues. » Contre cette pensée unique, une arme efficace et belle : la traduction.
Analyse / Blog, Le Monde 17/06/2018 / De quelle éducation aux médias avons-nous besoin (Danah Boyd)
L'obession autour des fake news relève du même type de conflit. D’un côté les experts accusent les gens « stupides » de ne pas comprendre ce qui est réel. On invite les experts à étiqueter ce qui est réel de ce qui ne l’est pas. Et on en appelle à une meilleure éducation aux médias. Tant et si bien qu’il suffirait de couper certaines sources de FB ou des réseaux sociaux pour résoudre le problème. Le problème est que les gens croient en l’information qui confirme leurs croyances. « Si vous leur présentez des données qui les contredisent, ils recourront à leurs croyances plutôt que d’intégrer de nouvelles connaissances dans leur mode de compréhension ». C’est pourquoi, souligne Danah Boyd, montrer aux gens du contenu labellisé qui contredit leurs opinions risque surtout d’augmenter leur haine de Facebook en tant qu’institution, plutôt que corriger leur croyance.
Réforme / Ministère de l’Éducation nationale, mai 2018 / Projets d'arrêtés pour la classe de Seconde et le cycle terminal des voies générale et technologique.
01_Arrete_organisation_et_horaires_classes_de_seconde_GT.pdf
02_Arrete_organisation_et_horaires_cycle_terminal_voie_generale.pdf
03_Arrete_organisation_et_horaires_cycle_terminal_voie_technologique.pdf
Réforme / Conseil Supérieur des Programmes, mai 2018 / Note d’analyses et de propositions sur les programmes du
lycée et sur les épreuves du baccalauréat.
1.4. Français. [...] Le calendrier anticipé des épreuves impose de soumettre les élèves à un rythme soutenu d’apprentissage afin qu’ils construisent une culture et une réflexion spécifiquement littéraires, et qu’ils s’approprient les méthodologies d’un nombre important d’exercices (quatre pour l’épreuve écrite et deux modalités de prise de parole
pour l’épreuve orale). Il serait donc bienvenu de réduire à la fois les dimensions du programme et le nombre des exercices figurant à l’épreuve écrite.
Plus précisément, le débat concerne les exercices suivants :
pour l’écrit, la question sur corpus, confuse pour les élèves, et l’écriture d’invention. Cette dernière, étrangère à la formation initiale des professeurs de lycée, suscite chez nombre d’entre eux des réticences dans l’évaluation, notamment sur le caractère subjectif de l’appréciation de la créativité. [...] Le commentaire et la dissertation ne sont pas critiqués, paraissant aux professeurs consubstantiels à la discipline.
Réforme / Ministère de l’Éducation nationale, 10/05/2018 /Arrêté modifiant le CAPES de Lettres Classiques.
« 2° Épreuve écrite à partir d'un dossier : épreuve de latin et de grec.
« L'épreuve permet d'évaluer les compétences en langues et cultures de l'Antiquité des candidats.
[…] « L'épreuve se déroule en deux temps :
« a) Le premier, noté sur 15 points, consiste en une version dans chacune des langues, latine et grecque (7,5 points par
version) ;
« b) Le second, noté sur 5 points, invite le candidat à proposer un projet de lecture pour une classe donnée, en
mobilisant ses connaissances historiques, littéraires, culturelles, voire stylistiques, et celles des programmes de collège
et de lycée, à partir de la mise en relation de l'un des deux textes de langues anciennes choisi par le jury et du document
textuel ou iconographique inclus dans le dossier.
« Durée : six heures ; coefficient : 1..
Action / 09/04/2018 / Communiqué de presse / Apprentissage et enseignement du latin et du grec. Double langage, triple peine (Associations littéraires APLettres, CNARELA, Sauver les lettres)
Qu'en est-il du « retour du latin et du grec » annoncé par le nouveau ministre pour « les cinq années à venir » ?
Paroles.
Certes, le ministre restitue leurs noms au latin et au grec ancien ; un arrêté en juin 2017, puis une circulaire en janvier dernier, redonnent explicitement aux langues anciennes leur statut d'enseignements facultatifs au collège, ainsi qu'un horaire défini nationalement. Mais en réalité, ces textes officiels n'apportent pas de changement car aucun établissement n'est tenu de les appliquer : l'horaire nécessaire ne figure pas dans les « grilles » des enseignements mais dépend des « marges » laissées à l'autonomie des collèges. Sa définition perverse, reprise du ministère précédent, permet de minorer cet horaire. Les situations pour la rentrée 2018 restent donc analogues à celles de la rentrée 2017 sur l’ensemble du territoire, où les heures « retrouvées » relevaient déjà de la fiction.
Analyse / Le Monde du 28/04/2018/ Pourquoi Homère reste d'une brûlante actualité (Pierre Judet de La Combe)
S’intéresser à Homère aujourd’hui, le lire avec passion, en faire la base d’oeuvres nouvelles, l’enseigner, c’est aller à
contre-courant. D’abord, c’est affronter la violence de la guerre dans tous ses aspects, personnels, économiques et
sociaux, et donc aller au-delà d’un tabou. Les démocraties modernes, depuis les horreurs des deux guerres mondiales,
ne savent pas parler de la guerre. Elles la condamnent avec vigueur, mais la font ou la font faire sans l’expliquer, ou en
recourant à l’idée de guerre juste, libératrice ou même morale. Il n’y a rien de tel chez Homère : la guerre est là et,
patiemment, il l’analyse dans ses aspects les plus concrets, de manière à offrir à ceux qui vont la faire ou la subir un
symbole authentique et poignant de leur expérience. [...]
C’est s’opposer à ce fondamentalisme technocratique qui partage avec tous les obscurantismes le même refus de
prendre en compte l’Histoire, son opacité, sa complexité dans le long travail de réflexion qui a dessiné les traditions,
leurs conflits. Or ce sont les langues, dans leur diversité et leur profondeur historique, et ce sont donc des textes majeurs
qui ont fait aussi l’état du monde, que trop de dirigeants n’envisagent même pas de comprendre. On connaît les
catastrophes militaires, politiques, culturelles qu’a produites récemment cette ignorance.
Analyse / Cnesco, mars 2018 / Écrire et rédiger : comment guider les élèves dans leurs apprentissages
L’élève doit commencer à écrire très tôt dans sa scolarité – il n’est pas nécessaire d’être un lecteur expert pour se lancer
dans l’écrit. Plus l’élève produit des textes, plus il développe des automatismes, plus il progresse dans l'écrit,
l’enseignant doit donc fournir des occasions fréquentes aux élèves d’écrire. L’écriture doit se construire comme un
processus ; elle doit être préparée (brouillon, schéma, tableau, dessin, carte mentale...), révisée, seul ou à plusieurs
élèves. Les recherches montrent qu’être lu par d’autres élèves améliore la qualité du travail de révision de l’élève. […]
Par ailleurs, pour appliquer les règles de la langue, il faut tout d’abord la comprendre. L’étude de la langue
(orthographe, grammaire...), enseignée explicitement, doit donc être pensée dans cet objectif.
Analyse / Mezetulle, 18/03/2018/ L’école des illettrés, ou L’école malade d’elle-même (Tristan Béal)
À la suite de tests conduits auprès de 760 000 participants à la Journée Défense et Citoyenneté
en 2016, la DEPP a publié une note d’information au titre inquiétant : « JDC 2016 : environ un jeune Français sur dix en difficulté de
lecture ». […] À la suite de cette brève étude de la note d’information de la DEPP, il ne nous semblerait donc pas outré
de conclure que ce sont 36,4% des jeunes gens évalués lors de la JDC de 2016 dont les mécanismes de base de lecture
sont insuffisamment automatisés, voire nullement automatisés pour 5,1% d’entre eux. Autrement dit, près de quatre
jeunes sur dix ont des difficultés en lecture plus ou moins sévères.
Analyse / Les blogs du Diplo, Le Monde Diplomatique du 15/03/2018 / De quelques propositions pour un plan livre
pour la France (Guillaume Basquin)
C’est en effet en se basant sur ce qui s’est pratiqué depuis l’après-guerre dans le cinéma en France, avec le succès que
l’on sait (la France est devenue l’abri pour tout le cinéma de recherche mondial et a réussi à imposer la notion
d’exception culturelle), que l’on pourra tenter de sauver la Littérature de recherche française : imposition de quotas aux
librairies qui bénéficient de subventions publiques avec un label bien identifiable. […] Sans quotas drastiques, c’est
toujours la main aveugle du marché (et des lecteurs,qui risquent de ne connaître que les produits soutenus par le
marché) qui dicte sa voix. Rien à faire ?… Si ! Comme dans le cinéma, où il est de notoriété publique que les salles
« art & essai » n’ont pas accès aux gros films ni même aux « films du milieu », il faut, sous peine de perte des
subventions d’État, qu’un lecteur qui entrera dans une librairie de type « Art & Essai » soit sûr de n’y pas trouver les
mêmes livres qu’ailleurs !
Presse / Marianne du 25/03/2018 / Cliché. Une étude universitaire conclut que les écoles privées n'enseignent pas mieux que les écoles publiques (Hadrien Mathoux)
Une étude universitaire s'est intéressée aux résultats obtenus par les élèves français entre le CP et le CE2. Les conclusions remettent en cause de tenaces préjugés : l'avance de l'école privée sur le public s'explique uniquement par l'écart de classe sociale entre les élèves, et les élèves du privé ne progressent pas plus que leurs homologues.
Presse / Le Monde du 12/04/2018 / « Dans les quartiers populaires, nos enfants n’ont droit qu’à un enseignement
de moindre qualité » (propos recueillis par Mattea Battaglia)
Qu’attendez-vous, précisément, du ministre de l’éducation ?
Nous lui demandons qu’une loi en matière de mixité scolaire puisse s’appliquer dans des territoires identifiés comme
ségrégués, loi impliquant les écoles privées, afin de garantir aux familles que tous les établissements se valent bien.
Nous lui demandons aussi de rééquilibrer les moyens, notamment humains et financiers, entre les territoires. Quand on
voit la faible dépense éducative pour un jeune défavorisé scolarisé en ZEP qui s’arrête au CAP comparée à celle d’un
jeune de centre-ville qui ira jusqu’à bac + 5 en bénéficiant d’options en plus et à d’enseignants plus expérimentés, on se
dit qu’on peut faire beaucoup mieux sur le plan de l’équité.
Analyses / Groupe Jean-Pierre Vernant / 19/04/2018 / Parcoursup, le niveau qui baisse et la théorie des mariages stables (Partie 1/2).
En imaginant que l’on puisse classer un candidat en passant 5 minutes sur son dossier, le classement des 7 millions de
voeux déposés sur ParcourSup consommerait en pure perte deux siècles de travail — 80 000 journées de 7 h. On réalise
alors que le CV et les lettres de motivation ne serviront pas à classer les candidatures: elles ne sont exigées que pour
imposer l’image d’un recrutement professionnel et faire disparaître le baccalauréat comme certification nationale
ouvrant droit aux études universitaires. L’anxiété que ces éléments aussi absurdes qu’inutiles ont générée dans les
familles des lycéens a donc été pensée pour marquer les esprits.
Analyses / Groupe Jean-Pierre Vernant / 18/05/2018 / Parcoursup, le niveau qui baisse et la théorie des mariages stables (Partie 2/2).
Les réformes en cours suppriment de facto le baccalauréat, qui procédait d’une volonté de certification homogène à
l’échelle nationale et constituait un rituel de passage vers l’âge adulte. Dans ParcourSup, ce diplôme est remplacé par
une évaluation du “capital humain” des élèves — de leur “portefeuille de compétences” mais aussi de leur origine
sociale, de l’emplacement et de la réputation de leur lycée, de leur capital culturel et social, etc. Par compétence, il
convient ici d’entendre ici des éléments de technicité ou de conformité comportementale qui soient potentiellement
évaluables en se passant d’enseignants : la dévalorisation des diplômes nationaux vise ainsi à déposséder les
enseignants d’un de leurs rôles : la certification qualitative de l’acquisition de savoirs et de grammaires de pensée.
Presse / Le Monde du 30/04/2018 / Sélection à l’université : « Nous, professeurs, demandons le retrait de la loi
orientation » (Tribune)
La loi sur l’orientation et la réussite des étudiants (ORE) […] aggrave les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur.
Elle méprise l’autonomie des élèves qu’elle prétend par ailleurs « responsabiliser » en ne leur permettant plus de
hiérarchiser leurs voeux. Elle permet aux établissements de classer (chacun à leur guise) les dossiers des lycéens en
fonction de leurs résultats scolaires de première et de terminale.
Les formations les plus réputées (à tort ou à raison) attireront donc les meilleurs élèves, et les moins recherchées se
retrouveront mécaniquement avec les publics les plus fragiles. Le marché universitaire ainsi créé produira bientôt une
hiérarchie des établissements, une valeur différentielle des diplômes et, à moyen terme, rien n’empêchera les universités
de facturer librement les diplômes qu’elles délivrent.
Presse / Libération du 21/05/2018 / Témoignage. Parcoursup : « Il y a un côté hyperviolent à opérer un classement
» (Marie Piquemal)
"L’autonomie des universités mise en avant est très relative, les éléments les plus importants nous ont échappé. Par
exemple, nous avons appris le taux de sectorisation seulement le 14 mai : ce qui veut dire que beaucoup de dossiers que
nous avons épluchés et pris soin de classer seront écartés automatiquement car ils sont hors secteur… Les élèves
ignoraient ce critère au moment de faire leurs voeux. C’est honteux ! En définitive, je n’ai aucune idée des élèves qui
seront dans mon amphi à la rentrée. Est-ce ceux qui sont en haut de mon classement ? Ou, au contraire, ceux qui sont
tout en bas, car les autres auront préféré aller ailleurs ? On lance nationalement des grandes réformes, en demandant à
tous les fonctionnaires de se plier en quatre, mais pourquoi au bout du compte ? Cela me met en colère.»
Analyse / Sauver les lettres, 14/03/2018 / Contribution adressée au Conseil Supérieur des Programmes à la suite
de l'entrevue du 09/03/2018.
Les « bénéfices » attendus de la réforme par le gouvernement ne concernent pas les élèves ni la qualité de leurs acquis, mais les économies et le statut des professeurs (étranglement à l'entrée du supérieur, baisse des heures de cours des lycéens au niveau de la moyenne européenne, diminution du nombre de postes de professeurs, annualisation de leurs services, effacement de leur qualification d'origine dans des enseignements mal définis). Mettre en avant la nécessaire évolution du baccalauréat pour produire en retour un ébranlement majeur du métier d'enseignant et de la qualité des apprentissages scolaires est une opération biaisée qui ne peut susciter l'adhésion.
Analyse / Sauver les lettres, 17/03/2018 / Version longue » du communiqué de presse du 25/02/2018,
Ce nouveau bac n’aura de valeur que pour les élèves issus d’établissements haut de gamme et réputés tels, non parce que ces lycées seraient plus performants, mais parce qu’ils ont bénéficié d’un régime d’affectation des élèves qui a hypocritement favorisé les processus de tri et donc de ghettos. […] Dans cette configuration déjà inégalitaire et hypocrite, il est évident que le nouveau bac, avec l’augmentation de la part d’autonomie laissée aux établissements, ne fera qu’accroître les inégalités de niveau entre ces mêmes établissements.
Analyse / Sauver les lettres, 19/03/2018 / Brevet 2018, sujet « zéro » : une épreuve en dépit du (bon) sens (Virginie Blanchet)
Voilà comment, à partir de réelles bonnes idées, comme la suppression d’une étude systématique d’image et la réintroduction de questions précises de grammaire, la nouvelle mouture du sujet de brevet, parce qu’elle n’a pas su trouver la voie médiane entre l'écueil de la séquence, qui instrumentalise les textes et atomise la grammaire, et celui d'une grammaire déconnectée de toute réflexion sur la langue dans ses manifestations les plus fines, comme le sont les textes littéraires, finit par ne servir ni la grammaire, ni la compréhension des textes.
Réforme / Ministèrede l'Éducation nationale, 13/03/2018 / Projets d'arrêtés concernant le baccalauréat 2021
Comparaison_code_bac_G_et_T2.pdf
Projet_arrêté_EA_bac_G_et_T_modif.pdf
Projet_arrêté_Controle_continu.pdf
Projet_arrêté_épreuves_bac_G.pdf
Projet_arrêté_épreuves_bac_T.pdf
Projet_décret_dispositions_bac_voies_G_et_T.pdf
Presse / Le Monde du 13/03/2018 / Enjeu majeur du futur bac, le contrôle continu interroge. (Soazig Le Nevé, Mattea Battaglia, Violaine Morin)
Réduire le nombre d’épreuves terminales du baccalauréat en multipliant le nombre d’épreuves anticipées va-t-il dans le sens de la « simplification » de l’examen promise par le candidat Macron à l’horizon 2021 ?
A la lecture d’une première version des textes législatifs qui devaient leur être présentés mardi 13 mars au matin, tous [les syndicats enseignants] – ou presque – ont sorti leur calculatrice. Pour le SE-UNSA, organisation dite réformiste, le bac « nouvelle formule » pourrait compter une vingtaine d’épreuves au total, estime sa porte-parole, Claire Krepper. Le SNES-FSU, majoritaire, qui devait boycotter la réunion de mardi, a, lui, comptabilisé « 28 voire 29 futures épreuves ».
Une « usine à gaz », redoute Claire Guéville, la responsable du secteur lycée de ce syndicat qui, dans un communiqué lundi 12 mars, a demandé une « remise à plat totale du projet de réforme ». La secrétaire générale du syndicat réformiste SGEN, Catherine Nave-Bekhti, regrette une réforme « incohérente et bâclée ».
Presse / Le Monde du 09/03/2018 / Parcoursup, un nouveau marché pour les acteurs privés du conseil en orientation (Sébastien Graveleau)
Les acteurs privés du coaching et du conseil en orientation se frottent les mains. Les nouvelles règles à l’entrée de l’université, qui entrent en vigueur vendredi 9 mars, leur ont amené, racontent-ils, de nouveaux clients.
La fondatrice du cabinet Tonavenir.net, Sophie Laborde-Balen, estime ainsi la hausse de son activité « de 25 % à 30 % » par rapport à 2017. « Le tirage au sort en 2017 et les nouveautés de Parcoursup ont rendu les parents inquiets », observe-t-elle. Ici, parmi les forfaits vendus dans le coffret cadeau « Yes future », le « Pass sérénité » à 560 euros permet une « prise en charge totale » des inscriptions postbac : définition avec le futur étudiant de son projet d’études, écriture avec lui des lettres de motivation… Et à ce prix-là, le conseiller se charge d’entrer les voeux sur la plate-forme.
Presse / Le Monde du 12/02/2018 / L’inspection générale alerte sur « les difficultés philosophiques ou techniques » de Parcoursup (Soazig Le Nevé)
La loi réformant l’accès à l’enseignement supérieur est promulguée, mais la partie n’est pas gagnée. Dans une note de suivi de la réforme de l’accès à l’enseignement supérieur, que Le Monde s’est procurée, l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) met en garde contre une loi qui « pose des difficultés philosophiques ou techniques liées à l’examen des candidatures ». [...]
Dans leur document présenté le 6 mars aux recteurs d’académie, les inspecteurs généraux relèvent que « dans beaucoup d’établissements visités, les procédures d’examen des candidatures sont loin d’être formalisées » et que « certains établissements ou communautés universitaires affichent une opposition ou une réserve à l’idée d’examiner et de classer
des candidatures ».
Presse / Le Monde du 24/02/2018 / Réforme du bac : vers la fin du sujet d'invention à l’épreuve de français (Violaine Morin)
Fanny Capel, présidente de Sauvez les lettres et enseignante au lycée Paul-Eluard de Saint-Denis, déplore […] : « Les élèves moyens ont tendance à choisir l’invention, alors que c’est l’exercice le plus difficile. » […] Difficile parce qu’elle est « impossible à noter », ce qui a provoqué une « sous-notation » des copies. Les critères de correction sont flous, et le simple « respect des consignes » ne permet pas de déterminer la note. « Je ne sais jamais comment noter une copie d’invention, jamais », assure Fanny Capel, qui planche précisément sur celles du bac blanc au moment où nous nous parlons. […] « La seule chose que je puisse noter, c’est la cohérence des personnages. Tout le reste est implicite. » Or, c’est là que le bât blesse : la part d’implicite est la bête noire des élèves des lycées défavorisés, qui ne maîtrisent pas les codes pour placer « la petite allusion qui va bien, au bon moment ». Ces lycéens se repèrent mieux dans des exercices aux règles claires. De ce point de vue, selon la présidente de Sauvez les lettres, la dissertation devrait rester « l’exercice roi », avec sa méthode et ses objectifs affichés. « C’est mal connaître les élèves de croire qu’ils sont rebutés par l’exigence. Ils le sont au début, parce que c’est difficile. Mais bien préparés, ils sont capables de maîtriser un exercice intellectuellement exigeant, alors que l’invention reposera toujours sur une part de code. »
Analyse / La Vie Moderne, 28/10/2017 / La grande braderie de « Lilie », le fiasco du plus coûteux des ENT (Loys Bonod)
[...] À quoi bon une première interface, même libre et gratuite pour les établissements, si elle ne propose pas les services élémentaires qui sont ceux d’un ENT et s’il faut lui adjoindre une seconde interface propriétaire payante ? Entendons-nous bien : ce n’est pas le caractère libre de Lilie qui pose ici problème mais le caractère erratique des politiques publiques en matière de numérique scolaire. D'ailleurs la rente globale versée chaque année – pour des solutions propriétaires souvent médiocres– à de multiples sociétés privées, en l’absence de toute coordination nationale, constitue un autre scandale.
Communication, précipitation, absence de concertation avec les principaux intéressés : « Lilie » n’est qu’un exemple – parmi bien d’autres– d’une certaine irrationalité de l’école numérique confinant parfois à la plus atterrante des gabegies.
Presse / Blog Profs mis en examen du 12/02/2018 / Parcoursup : 5 effets pervers (Claude Garcia)
Le marché du « coaching scolaire » va prospérer.
L’argent est de plus en plus présent dans le système scolaire. Outre les prépa privées, on voit se multiplier les services payants proposés aux parents à qui ont fait croire (et c’est loin d’être totalement faux) que la réussite scolaire demande une véritable stratégie. Le nouveau système Parcoursup ne rassure pas en ouvrant encore un peu plus la porte à l’argent dans le parcours scolaire.
Analyse / Le Monde du 26/02/2018 / Orientation : la nouvelle loi risque de renforcer les différences entre filles et garçons (Tribune)
À appétences équivalentes pour les matières scientifiques et à notes égales à celles des garçons, les filles sont toujours
moins orientées que ces derniers vers la filière scientifique du bac. Or la loi ORE risque d’entretenir, voire de renforcer,
cette différenciation sexuée des orientations, par le biais des « attendus » désormais affichés sur la plate-forme
« Parcoursup » pour chaque formation universitaire. En effet, ces attendus se fondent largement sur des compétences
supposées déjà acquises par les candidats, qui renvoient à des dispositions inégalement valorisées – et suscitées – chez
les filles et les garçons.
Réforme / Ministère de l’Éducation nationale, 22/02/2018 / Rapport : La voie professionnelle scolaire : viser l'excellence. (20 Mo)
Au terme de la mission confiée par le ministre à Céline Calvez, députée des Hauts-de-Seine et Régis Marcon, chef étoilé, un rapport a été remis le 22 février 2018.
Presse / Le Monde diplomatique, mars 2018 / Les lycées professionnels, parent pauvre de l'éducation (Jean-Michel Dumay)
Elle est la face cachée de la planète éducative, invisible dans les discours officiels, qui lui préfèrent l’apprentissage. La voie professionnelle scolaire instruit pourtant un tiers des lycéens et les trois quarts des jeunes qui s’orientent vers des métiers d’ouvrier ou d’employé. Jadis instrument d’émancipation, cette « école du peuple », promise à une « rénovation », souffre d’une double relégation : scolaire et sociale.
Réforme / Information - Jean-Michel Blanquer - 14/02/2018 / Baccalauréat 2021 : un tremplin vers la réussite (Première version)
Presse / Le Monde du 08/02/2018 / Réforme du bac : vers la fin du sujet d’invention à l’épreuve de français
« Ceux qui n’aiment pas tellement le français et pensent s’en sortir à moindres frais, c’est vrai, choisissent
l’invention. » De son côté, Fanny Capel, présidente de Sauvez les lettres et enseignante au lycée Paul-Eluard de Saint-
Denis, déplore peu ou prou la même tendance : « Les élèves moyens ont tendance à choisir l’invention, alors que c’est
l’exercice le plus difficile. » [...]« Je ne sais jamais comment noter une copie d’invention, jamais », assure Fanny
Capel, qui planche précisément sur celles du bac blanc au moment où nous nous parlons. « Là, par exemple, il faut
écrire une scène comique à partir d’un texte de Ionesco. Déjà, qu’est-ce qui est drôle, qu’est-ce qui ne l’est pas ? On
est déjà dans le subjectif. La seule chose que je puisse noter, c’est la cohérence des personnages. Tout le reste est
implicite. »
Or, c’est là que le bât blesse : la part d’implicite est la bête noire des élèves des lycées défavorisés, qui ne maîtrisent pas
les codes pour placer « la petite allusion qui va bien, au bon moment ». Ces lycéens se repèrent mieux dans des
exercices aux règles claires.
Action / 09/02/2018 / Compte rendu de la rencontre de Sauver les lettres avec la DGESCO
Nous refusons que pour régler des problèmes d'affectation somme toute réduits (les problèmes imputés à APB n'ont concerné que 0,5% des bacheliers), le ministère propose de désorganiser et détruire les trois années de lycée en amont. Pour Fanny Capel, la réponse n’est pas dans des épreuves placées en avril, mais dans des épreuves clairement définies, et dans des programmes aux contenus ambitieux, capables de donner toutes leurs chances aux lycéens dans leurs études supérieures. Elle demande ce qu’il en est de la filière L: autrefois, il existait une filière lettres/maths. Qu’en sera-t-ildans la réforme ?
Lire aussi : Réflexions sur la réforme du baccalauréat par l'association Sauver les lettres, transmises à la commission Mathiot
Presse / Le Monde du 08/02/2018 / Le bac est un rite institutionnel et politique (Entretien avec la sociologue Annabelle Allouch)
Le bac n’est pas seulement un rite individuel : c’est aussi un rite institutionnel et politique. En passant ses épreuves, l’élève rencontre la transcendance de l’Etat. Sa copie, anonyme, porte la mention « ministère de l’éducation nationale » : tout lui indique qu’il passe un examen national. Au baccalauréat, le candidat n’est pas jugé par un professeur, mais par l’Etat. L’anonymat de la copie est la promesse que tous les candidats seront jugés sur la même base - même si ce grand principe égalitaire et méritocratique ne se traduit pas dans la réalité. Depuis le XIXe siècle, le baccalauréat est le symbole du monopole de la République sur la certification des diplômes.
Actions / 29/01/2018 / Lettre ouverte à M. Jean-Michel Blanquer – Pétition. (Conférence des associations de professeurs spécialistes)
Aucune réforme d’une telle ampleur ne peut se faire à marche forcée. Les délais annoncés conduiraient, en l’état, à définir des épreuves, et à écrire des programmes dans la précipitation. Un tel calendrier est manifestement déraisonnable. C’est pourquoi nous vous demandons un moratoire sur la réforme du baccalauréat et du lycée.
Actions / Février 2018 / Décryptages
« Il ne servirait à rien de proposer une réforme que sa complexité intrinsèque ou son illisibilité rendrait caduque » (Rapport Mathiot p. 22)
Décryptage 1 de l'illisibilité : https://www.snes.edu/IMG/pdf/projet_mathiot_decryptage.pdf (site du SNES/FSU)
Décryptage 2 de l'illisibilité : Réforme du lycée en synthétique (Lycée Claude Monet, Le Havre)
Presse / Le Monde du 15/12/2017 / Parcoursup, qui succède à APB, risque de créer du stress continu pour les candidats et leurs familles (Entretien avec Bernard Koehret, créateur d'Admission post-bac [APB])
La plate-forme APB a-t-elle dysfonctionné cet été ?
La procédure a fonctionné normalement cette année. Mais lorsqu’on a 808 000 candidats inscrits en début de procédure sur APB, pour 654 000 places proposées dans l’ensemble des formations, je ne vois pas comment on a pu penser une seconde que la demande pouvait être satisfaite. Ce n’est pas APB qui explose, c’est l’enseignement supérieur qui manque de places, en particulier l’université.
Analyse / Le Sup en maintenance, 28/01/2018 / ParcourSup du virtuel au réel, lettre ouverte à ma ministre et ma
chère collègue conseillère formation (Yann Bisiou)
À cause des capacités d'accueil, les 1000, 2000 ou 3000 dossiers devront être classés. Les 250 premiers seront admis,
les suivants « en attente » le temps que certains renoncent parmi les 250 premiers libérant des places pour les 750, 1750
ou 2750 autres… c'est "l'absence de sélection sélective". Et là ça va prendre beaucoup plus d’une minute. Combien ?
[…] Pour lire tout ça il faudrait 10 mn par dossier. Entre 166 et 500h de travail, 5 à 14 semaines à temps plein pour
dire OUI dans l’ordre. Vous l’aviez fait ce petit calcul ?
Réforme / 25/01/2018 / Mise en oeuvre de l'enseignement facultatif de langues et cultures de l'Antiquité. (BO n°4 du 25 janvier 2018)
Au titre de l'enrichissement qu'apportent les LCA à toute étude des langues, notamment celle de la langue française, l'accès à cet enseignement ne saurait être refusé à des élèves volontaires en tirant argument de leurs résultats scolaires, de leur comportement ou d'éventuelles difficultés entravant leurs apprentissages, quelles qu'elles soient. Aucune procédure de sélection ou de tirage au sort ne saurait être envisagée : les LCA doivent pouvoir bénéficier à tous les élèves intéressés.
Actions / 30/01/2018 / Communiqué de presse des associations littéraires APFLA-CPL, APLAES, APLettres, CNARELA, SEL et SLL.
La CNARELA, Sauver les Lettres, l’APLettres, Sauvegarde des enseignements littéraires, l’APFLA-CPL et l’APLAES renouvellent donc instamment leurs demandes : que les horaires de latin et de grec ancien en vigueur avant la réforme du collège soient rétablis en tant qu'horaires plancher au niveau national et qu'ils soient enfin financés
par des moyens « fléchés » (c'est-à-dire réservés) dans les dotations horaires des collèges et des lycées, sans quoi les textes officiels resteront sans effet.
Action / 07/12/2017 / Le bac a du sens ! Pétition du SNES-FSU
Le gouvernement veut réformer le baccalauréat dans l'urgence, sans prendre le temps d'un bilan sérieux ni de discussions approfondies. Le projet est verrouillé par son objectif : 4 épreuves et du contrôle continu. Nous voulons une réforme du baccalauréat et du lycée, mais non un diplôme maison qui renforce les inégalités entre les lycées et les élèves.
Actions / 15/12/2017 / Compte rendu de l’audience au ministère de l’éducation nationale des associations littéraires APFLA-CPL, APLAES, APLettres, CNARELA, SEL et SLL
Bien que la mission porte sur le lycée et le bac, la question de la maîtrise de la grammaire, entre autres, à l’école primaire et au collège, et celle des liens entre le collège et le lycée, ne peuvent être mises de côté. Promettre aux élèves une réussite dans n’importe quelle filière sans maîtriser correctement la langue, c’est leur mentir. […] Il ne faudra pas oublier que, moins l’institution joue un rôle prescripteur, plus le niveau baisse. Par conséquent, on ne saurait amoindrir les exigences en série littéraire ni laisser cette série se fondre dans un menu à vaste choix. […] Nous tenons par ailleurs à rappeler une opposition de principe sur le contrôle continu, car cette pratique reviendrait à faire fluctuer la valeur du baccalauréat en fonction de l’établissement qui prépare et délivre le diplôme, ce qui l’empêchera d’être un titre national.
Réforme / BO n°1 du 4 janvier 2018 / Diplôme national du brevet - Modalités d'attribution à compter de la session 2018
1.1 - Épreuve écrite de français (100 points) [...]
1.1.4 - Composition de l'épreuve
L'épreuve, d'une durée de trois heures, prend appui sur un corpus de français, composé d'un texte littéraire et éventuellement d'une image en rapport avec le texte. La maîtrise de la langue française à l'écrit est évaluée dans l'ensemble des exercices composant l'épreuve
Analyse / Alchimie du collège, 14/12/2017 / Plaisir d'apprendre, joie de rédiger (Maya Goyet)
L’on pourra disserter pendant des heures sur les compétences, les neurosciences, le magistral, l’inversé, le bonifié, ce
sera en pure perte. Si l’on ne place pas au coeur de toutes ces questions le désir et le plaisir (les élèves ont trouvé ces
arides considérations stimulantes, ils aiment ce qui est rare, abstrait, compliqué, érudit), le lien (ils ont vu que j’avais
envie de leur raconter un truc un peu technique, que je prenais en considération leur curiosité intellectuelle) et la
dimension personnelle de la transmission (ils ont vu que j’adorais raconter des trucs comme ça).
Analyse / 29/12/2017 / Faut-il sauver le soldat grammaire ? (Véronique Marchais))
Avec le passé simple sont portés disparus le COD, remplacé par la notion scabreuse de complément essentiel, ou pire,
par celle de prédicat, l'analyse grammaticale, l'analyse logique, qui porte si bien son nom, et, dans une large mesure,
toute idée d'un enseignement structuré et progressif de la grammaire. Cette disparition ne s’est pas faite en un jour.
C’est le résultat de réformes successives menées aussi bien par la droite que par la gauche, et qui ont toujours été
guidées, en ce qui concerne le français du moins, par une seule logique (outre la logique comptable), celle d’une
approche purement utilitaire de la langue, réduite à quelques compétences immédiatement employables
Analyse / La Sociale du 21/01/2018 / La destruction du baccalauréat et l'offensive générale contre l'école de la République (Denis Collin)
Plusieurs conséquences s’en déduisent.
La première étant que l’importante part de contrôle continu fera que le baccalauréat ne sera plus un diplôme national et donc ne donnera pas les mêmes droits à tous suivant l’établissement où ils ont obtenu cet examen. Entre autres conséquences, cela percutera directement les conventions collectives de branche qui déterminent les salaires « plancher » en fonction d’une grille de qualifications reconnues nationalement, le baccalauréat étant aujourd’hui encore l’une de ces qualifications.
Deuxième conséquence : le système majeures/mineures privera le baccalauréat de sa valeur d’examen évaluant une culture générale et donc la suppression des filières aura pour conséquence directe de déterminer en bonne partie le parcours supérieur des élèves dès l’entrée en classe de première, sans vraie possibilité de bifurquer.
Troisième conséquence : le nouveau système permettra une « optimisation » des moyens qui dégradera sévèrement les conditions de travail des professeurs.
Parution / Novembre 2017 / Réparer le monde. La littérature française face au XXIe siècle (Librairie José Corti), Alexandre Gefen
Alexandre Gefen montre que "la littérature française d'aujourd'hui a l'ambition de prendre soin du moi, mais aussi des
individus fragiles, des oubliés de la grande histoire, des communautés ravagées et de nos démocraties inquiètes ; sauver,
guérir ou du moins faire du bien, tels sont les mots d'ordre, souvent explicites, placés au coeur des projets littéraires
contemporains. »
Agenda / Prix de la Nouvelle Jacqueline de Romilly
L'association Sauvegarde des Enseignements Littéraires (www.sel.asso.fr) propose une quatrième édition de son concours de nouvelles, le Prix de la nouvelle Jacqueline de Romilly . Il s'adresse aux lycéens et aux étudiants (CPGE ou Licence). Le texte écrit doit avoir un rapport, même distancié, avec l’antiquité grecque ou romaine. De nombreux prix sont à gagner (remise des prix à l’Institut de France) et les meilleurs textes seront publiés dans le magazine Phosphore et sur le site de S.E.L. Date limite : 14 mars 2018 à minuit.
Analyse / Libération du 10/09/2017 / Méthode globale ou syllabique : de quoi parle-t-on ? (Jérôme Deauviau, Janine Reichstadt, Jean-Pierre Terrail)
Au-delà des querelles politiques, réhabiliter la méthode syllabique nous semble indispensable. Par la règle du «tout déchiffrable», elle exclut la lecture devinette sans pour autant s’opposer au travail sur la compréhension. Il faut ne jamais avoir appris à lire à quiconque pour méconnaître la propension des élèves à se précipiter pour deviner, imaginer, et éviter un décodage toujours pénible au début. Plutôt que d’encourager ce réflexe, l’apprentissage syllabique ramène constamment et précisément au texte écrit, dont il propose une appropriation progressive, méthodique, systématique.
Puisqu’il y a avec elle tout à déchiffrer et rien à deviner, apprendre à lire peut contribuer à enrichir un lexique qui peut donc être découvert et pas seulement reconnu.
Analyse / Blog Mediapart du 11/09/2017/ Concurrence scolaire et inégalités : quelles leçons du Québec ? (Jean-Pierre Véran)
Une étude québécoise, analysant les résultats du développement de la concurrence au sein du marché scolaire depuis le
début des années 2000, éclaire utilement les orientations données à notre propre système éducatif.
Quand le ministre français de l’éducation nationale pourfend l’égalitarisme comme facteur d’inégalité scolaire et
affirme le 27 juillet sur France Culture que « c'est par plus de liberté que l'on peut aller vers plus d'égalité [1]», la note
socioéconomique documentée de l’IRIS[2], publiée en septembre 2017, observe la détérioration de la qualité des
enseignements offerts à la majorité des jeunes québécois par un marché scolaire caractérisé par la concurrence entre
privé et public et entre établissements publics.
Analyse / Alchimie du collège, 09/10/2017 / L'ignorance organisée (Maya Goyet)
[L’évaluation par compétences] m’a toujours semblé une manière pseudo-savante, laborieuse, faussement attentive
d’appréhender le « niveau » des élèves. C’est une façon de pixeliser l’image pour ne plus la voir telle qu’elle est. […] Et
donc, c’est, à terme, une façon de paumer tout le monde, enfants, parents et enseignants. L’évaluation par compétences,
en ce sens, me semble participer à une certaine forme d’ignorance. Je me demande pourquoi, entre mille autres débats
secondaires, on n’aborde pas celui-ci qui est, à mes yeux, majeur.
Analyse / Philosophie d'appartement, 09/11/2017 / Epuration poétique (Quamel Pusati)
Je suis de plus en plus sidéré, choqué même par le conservatisme de nos grands écrivains. Si nous tenons vraiment à
créer une société ouverte sur le monde, dans laquelle les futures générations puissent s’épanouir et vivre en harmonie, il
me paraît urgent de corriger certains textes afin d’en effacer les honteux stigmates sexistes, racistes, réactionnaires ou
transphobes.
Imaginez quel message d’espoir nous transmettrions à nos enfants si nous parvenions à leur léguer une littérature
bienveillante, intersectionnelle, pluraliste et moins offensante.Voici ce que deviendrait, dans un monde idéal, l’un des
poèmes les plus connus et les plus étudiés en classe de Paul Verlaine, « Mon rêve familier ». [...]
Presse / Vousnousils du 01/08/2017/ Aux USA, l’écriture cursive fait son come-back à l’école
Après avoir préféré le clavier d'ordinateur au stylo, les USA font machine arrière. Selon des chercheurs, l'écriture
cursive a une grande importance pour apprendre.
Depuis 2016, l’apprentissage de l’écriture cursive n’est plus obligatoire en Finlande. […] avec l’idée que le numérique
prend une place toujours plus importante dans nos vies, que les jeunes adultes écrivent de moins en moins à la main, et
que l’écriture cursive serait donc désuète. Pourtant, des scientifiques soulignent depuis longtemps l’importance de
l’écriture cursive pour améliorer le développement du cerveau et de la motricité. Selon Edouard Gentaz, chercheur au
CNRS, l’apprentissage de l’écriture cursive participe au développement d’une « motricité fine » que l’ordinateur ne
permet pas, et a une place essentielle dans l’apprentissage de la lecture.
L'Intempestif / 08/06/2017 / Sous le masque du consensus (Mireille Kentzinger)
C’est donc à une instance soumise à son chef qu’il reviendra de décider si au collège X on fera du latin ou un EPI sur le
régime alimentaire de Gargantua ou bien si dans le collège Y on proposera des classes bilangues ou un projet de
découverte de l’entreprise… A chacun donc un enseignement différent, perpétuellement mis en concurrence et soumis à
négociation, voué donc à la variation en fonction des forces en présence. Une sorte de « loi-travail » de l’éducation où
ce sont les décisions de telle ou telle entreprise scolaire locale qui auront force de loi localement, en lieu et place de la
loi générale.
Action / 21/06/2017 / Compte rendu de l'audience à l'Élysée (Associations littéraires APFLA-CPL, APLAES, APLettres, CNARELA, SEL, SLL)
Le 16 juin 2017, un nouvel arrêté a été pris par le nouveau ministre, Jean-Michel Blanquer. Cet arrêté témoigne
manifestement d’un changement d’orientation dans la politique éducative par rapport au dernier quinquennat. Nous
nous en félicitons et prenons acte de la volonté de redonner leur place légitime aux langues anciennes dans la scolarité
et de proposer une première traduction de l’un des engagements du Président de la République à ce sujet.
Cependant, vu la date à laquelle cet arrêté a été publié, nos inquiétudes subsistent : la rentrée est préparée depuis
longtemps dans les établissements et un tel texte crée l’effet inverse de celui que l’on pourrait espérer.
Analyse / Mezetulle / 17/04/2017 / OCDE et Terra Nova : une offensive contre l'école républicaine (Fatiha Boudjhalat)
Le Think Tank libéral « Terra Nova » a livré en 2016 un rapport Que doit-on apprendre à l’école ? Savoirs scolaires et
politique éducative. […] Il n’est guère surprenant que les propositions d’Emmanuel Macron reprennent les
préconisations de ce rapport qui salue les réformes entreprises aussi bien par la droite que par l’actuel gouvernement de
gauche, parce qu’elles vont toutes dans le même sens. [...]
On retrouve ce que le sociologue François Dubet avait déjà préconisé en incitant le monde de l’éducation à adapter les
programmes à ce que l’élève le plus faible était en mesure d’acquérir. Lui et sa collègue Marie Duru-Bellat évoquaient
dans leur livre Dix propositions pour changer d’école la « discrimination par le diplôme ». C’est l’inversion de la
norme, « l’adaptionnisme scolaire», terme créé par Laurent Jaffro et Jean-Baptiste Rauzy dans leur ouvrage L’École
désoeuvrée pour désigner « la pente actuelle dominante dans les réflexions sur l’école et dans l’institution elle-même qui
incline à adapter l’école à l’élargissement de ses publics plutôt que de persévérer à amener ses nouveaux publics à des
savoirs déterminés ».
Analyse / La Vie moderne / 7/07/2017 / Le métier en berne (Loys Bonod)
Les enseignants eux-mêmes sont de plus en plus dépossédés de leur métier : une formation parfois infantilisante, une
liberté pédagogique de plus en plus écornée, une « posture » enseignante de moins en moins reconnue, des disciplines
elles-mêmes de plus en plus remises en cause dans le secondaire. Le tout dans une déconsidération générale : les
enseignants doivent désormais être « managés » comme des chevaux au manège.
On le voit : il faut bien du courage pour se lancer aujourd’hui dans la carrière enseignante. Et, à vrai dire, les
perspectives offertes par la nouvelle majorité sont malheureusement de nature à aggraver davantage cette crise.
Presse / Le Monde / 12/06/2017 / Bac 2017 : Faire des dissertations a-t-il encore un sens ? (Isabelle Dautresme)
Epreuve de questionnement et d’engagement personnel, la dissertation, particulièrement de philosophie, encourage
aussi une certaine liberté de pensée. Elle oblige à sortir de son propre point de vue et à adopter celui de l’autre. « Il faut
faire comme si on n’était pas d’accord avec soi-même. Dans une démocratie laïque où il est tellement facile de dire ce
que l’on pense et de le faire savoir, la dissertation de philosophie nécessite de penser ce que l’on ne pense pas
spontanément, et ainsi de transformer ses croyances en opinion dont on peut discuter avec les autres. C’est un exercice
encore plus important aujourd’hui », souligne Pierre-Henri Tavoillot.
Un éclairage rétrospectif : Eloge politique de la dissertation (Robert Wainer, 2000)
Pourquoi la dissertation et le commentaire composé - formule rédigée et composée de l'" explication de texte " - ont-ils
sous la Troisième République, remplacé au lycée les anciens exercices d'imitation de l'ancien régime ? Parce qu'il
s'agissait justement de créer des citoyens libres penseurs.
Héritiers de la pensée rationaliste et des Lumières, les pédagogues républicains savaient ce que la révolution devait aux
philosophes des Lumières, et ce que ces derniers devaient à Descartes : qu'il n'y a pas de pensée libre et autonome sans
l'exercice du doute ; que la simple affirmation d'une opinion ne relève pas de la pensée, mais du préjugé et de la
croyance ; qu'on ne peut s'opposer à une opinion qu'on juge dangereuse qu'après avoir démontré qu'elle était fausse.
Presse / Le Monde / 04/07/2017 / Le premier ministre annonce un bac entièrement réformé en 2021 (Aurélie Collas)
Le projet s’articule autour de deux idées. La première est de « resserrer les épreuves finales autour d’un plus petit
nombre de matières et [de] définir ce qui relève du contrôle continu », a déclaré M. Philippe. Pendant la campagne
présidentielle, Emmanuel Macron s’était engagé à limiter le nombre d’épreuves finales obligatoires à quatre, et à faire
passer les autres en contrôle continu. Le chef de l’État entend « moderniser » l’examen bicentenaire. Le « remuscler »,
pour reprendre l’expression de son ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer.
Abrogerez-vous la dernière réforme du collège, qui retire 540 heures de cours aux élèves sur
l'ensemble de leur parcours de la 6e à la 3e (soit l’équivalent d’une demi-année) ?
Abrogerez-vous, dans le primaire, la réforme des rythmes scolaires, qui déstabilise les écoles et
épuise les élèves ?
Défendrez-vous la transmission des savoirs comme la mission principale de l’école ?
Rétablirez-vous dans le primaire et dans le secondaire les heures nécessaires aux différentes
disciplines, heures perdues1 au fil des réformes au profit de dispositifs à l’utilité contestable
(TPE, EPI, AP2, etc.) ?
Actions / Communiqué de presse / 14/03/2017 Réforme du collège : moins de latin pour tous !
(Associations littéraires APFLA-CPL, APLAES, APLettres, CNARELA, SEL, SLL)
L’enseignement public est frappé de plein fouet par la perte d’élèves en latin (moins 4 920 élèves), le privé étant pour
un moment encore bien loti (moins 1 451 élèves). Il faut préciser qu’il ouvre grand les bras pour récupérer les ouailles
qui n’auraient pas encore succombé à ses appels après les réformes et refontes qui se succèdent depuis le début de ce
siècle. La fuite dans le privé, que refuse de voir le ministère, est réelle. Car de nombreux établissements privés
proposent ce que le public ne propose plus. [...]
La ministre ignore complètement les conséquences de ses choix en matière d’éducation, qui se révèlent catastrophiques
tant les collègues du secondaire sont épuisés. Elle croit qu’il suffit de dire pour faire, mais ne connaît rien aux réalités
du terrain : sans moyens clairement fléchés et dédiés pour les langues anciennes, ces dernières sont toujours plus
fragilisées. Or, ses services ont choisi de les financer sur une marge de fonctionnement, les reléguant ainsi bien loin
derrière les dédoublements de classes nécessaires dans les disciplines de SVT ou de sciences-physiques par exemple.