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Petite chronique d’une manipulation avortée.

Toulouse le 13 juin 2001.

Chère collègue, cher collègue,

Comme je me suis récemment adressé à vous à propos de la réforme des collèges et que je me suis beaucoup engagé dans cette affaire, je vous écris à nouveau aujourd’hui pour vous dire que je suis très heureux d’avoir appris avant-hier soir que le directeur de la DESCO, Jean-Paul de Gaudemar, s’était engagé au nom du ministre devant quatre membres de la CNARELA, dont la Présidente, Isabelle Lejault à maintenir en l’état dans le " nouveau collège " les options de latin et de grec. C’est une victoire, n’en doutez pas, il reste à confirmer cette victoire sur deux points sur lesquels je reviendrai. Le simple rappel des faits montre qu’il s’agit bien d’une victoire.

  • 5 avril : publication des décisions de J. Lang sur les collèges. Rien sur les options, notamment de latin et de grec.
  • 25 avril : annonce de mesures en faveur des Langues Régionales, possibles comme langues vivantes dès la sixième et en option ultérieurement.
  • 27 avril : le C. A. de l’Artela demande à la Présidente de la CNARELA d’obtenir avant l’A. G. de la CNARELA du 12 mai, un éclaircissement à propos du sort réservé aux options de latin-grec au collège.
  • 12 mai : le ministère n’a pas voulu répondre, ni même accordé un rendez-vous. L’A. G. est inquiète, partagée entre " optimistes " (dont j’étais alors, car cela paraissait très gros) et " pessimistes ". L’A. G. mandate la Présidente pour qu’elle obtienne le fameux éclaircissement, avec une audience si possible, avant la réunion publique du 23 mai à la Bourse du Travail. Le ministère, usant encore de manoeuvres dilatoires, refuse de donner sa réponse par téléphone, et propose deux dates : le 30 mai (ou 31 ?) ou le 11 juin. Le 23 mai, il annonce que l’audience aura lieu le lundi 11 juin. Et, lors de la réunion publique du 23 mai, les menaces sur les options sont clairement annoncées à l’assistance.
  • Inquiet de voir le temps passer, je m’adresse aussi, directement et à plusieurs reprises, aux services du ministère (cf mon courrier précédent), et estime, à partir des réponses qui me sont faites, que l’on se moque copieusement de nous : insistance suspecte du ministère à refuser de répondre à une question simple par une réponse simple. J’ai même demandé à des collègues appartenant à trois grandes centrales syndicales (SNES, SNLC-FO, SNALC) de faire poser cette question par l’intermédiaire de leurs délégués nationaux: là encore, aucune réponse ! Je suis alors convaincu que les pessimistes ont raison. C’est pourquoi je décide, aidé de deux autres professeurs, de rédiger dans l’urgence une lettre pour alerter mes collègues de l’Université de Toulouse (le lundi 28 mai) et toutes les ARELAs (le mardi 29 mai, par mail ou par courrier), avec une analyse précise du texte de J. Lang et de la situation. Je demande par cette lettre informations, conseils, avis et corrections : cela donnera ensuite, en fonction des réponses des collègues, un texte un peu modifié.
  • Il me semble que le ministère " tâte le terrain ", et que sa réponse dépendra de la réaction des intéressés : il faut donc absolument réagir vite et fort avant l’audience, et avant l’été, et pour cela toucher le grand public, que cette information sorte de notre petit cercle.
  • C’est pourquoi, lorsque mes textes ont fait le tour des ARELAs, et que j’ai reçu des échos positifs, des soutiens, j’ai décidé de faire circuler ces deux textes d’information sur la " toile " grâce à divers sites (par ex. " Sauver les Lettres ", " Reconstruire l’école ", etc..), pour " sonner le tocsin ". J’ai aussi sollicité les collègues des Universités de Toulouse, de Bordeaux et de Montpellier pour que cette question soit abordée au Congrès de l’APLAES.
  • Le jeudi 7 juin, au Conseil Supérieur de l’Education Nationale, un délégué du syndicat SNLC-FO, André Yon, interpelle les représentants du ministre sur un point qui n’était pas à l’ordre du jour (les options de latin et de grec dans la nouvelle réforme) et obtient la réponse suivante de M. l’Inspecteur Maccario, faite au nom de J. Lang : "Cette question fait partie de celles qui n’ont pas encore été arrêtées définitivement. L’option latin débute en 5ème, la réforme du collège ne s’appliquant qu’en 6éme en septembre 2001, ce sont les anciens programmes qui perdurent. Les modalités d’application de la réforme pour le cycle central, 5ème et 4ème, restent à élaborer pour l’an prochain. "

Il est donc clair que la possibilité de supprimer ces options était tout à fait envisagée… comme une option possible ! Cf. le commentaire d’André Yon : " peut-on refuser plus nettement d’indiquer que, pour le moins, on n’a pas résolu de maintenir les options de latin et de grec ? Nos craintes sont donc amplement justifiées. "

  • samedi 9 juin : C. A. de l’ARTELA. Je rappelle toutes ces informations à mes collègues, j’en recueille de nouvelles, et tout le monde tombe d’accord pour juger que le ministère tente de faire passer sa mesure " incognito " et que le seul moyen de l’en empêcher est de publier la plus largement possible ce que nous savons, et de nous mettre en ordre de bataille pour pouvoir livrer le combat si nécessaire : nous envisageons différentes stratégies, certaines restant secrètes.
  • Le temps joue contre nous, estimons-nous, et toute mobilisation forte et rapide ne pourra qu’être utile, pour le cas où le ministère serait tenter de reporter l’audience, ou de rester dans le flou…
    Nous attendons le mercredi suivant, pour tenir compte des résultats de l’audience accordée à la CNARELA le lundi 11 juin.


-Aujourd’hui, le résultat de l’audience me satisfait, et on ne peut écarter l’idée que le début de mobilisation générale a pu aider le cabinet et le ministre à mettre un terme à son indécision et à ses atermoiements sur le sort de nos options.

Il reste toutefois à régler, aux yeux du C. A. de l’ARTELA, deux points décisifs, qui ont été clairement soulevés samedi dernier, avant l’audience.

Le C. A a décidé d’attendre la confirmation publique, par le ministre, du maintien des options de latin et de grec dans le nouveau collège (tel que le définiront les futurs textes réglementaires), ainsi que son engagement de principe sur les moyens financiers ("hors DGH" ou autre modalité acceptable), avant de considérer que l'affaire est entendue.

En effet, les collègues ont rappelé un précédent fâcheux à propos des Langues Anciennes : Claude Allègre, ou l’un de ses conseillers, avait promis à J. de Romilly et à J. P. Vernant de rétablir la prise en compte des notes des options de latin ou de grec au Brevet des collèges… mais cet engagement n’avait pas été tenu ! D’où l’article cinglant paru ensuite à l’époque dans Le Monde sous le titre On nous a trompés, signé des deux illustres professeurs. A qui la faute si la base est méfiante ?

Tant que nous n’aurons pas obtenu cette garantie officielle –qui ne saurait être repoussée sans devenir elle-même suspecte- nous considérerons que rien n’est réglé et maintiendrons, voire accentuerons notre pression. Nous écrivons dès aujourd’hui au Ministre et à J. P. de Gaudemar, pour qu’il demande une confirmation du ministre et nous fournisse quelques compléments d’information. La convocation de notre Assemblée Générale extraordinaire du samedi 23 juin est maintenue et les courriers adressés aux députés, aux paretns d’élèves et aux médias sont suspendus.

 

Je tiens enfin à ajouter quelques précisions, à l’intention de ceux qui diront peut-être que j’ai inutilement ou trop précipitamment " sonné le tocsin ", puisque tout semble s’arranger :

1) il est indéniable que l’amorce de mobilisation n’est certainement pas pour rien dans la réponse donné à la CNARELA : c’est en créant un rapport de force sur le terrain que l’on pris en considération et que l’on crée les conditions d’une audience favorable.

2) J’aurais été très heureux de ne pas consacrer autant de temps et d’énergie à cette affaire, dans laquelle nous n’avons été que des victimes : il ne faudrait tout de même pas confondre la réaction de défense de l’agressé avec la violence, fût-elle feutrée et hypocrite, de l’agresseur.

3) Je souhaite que l’on me pardonne les quelques maladresses que j’ai pu commettre, si tel a été le cas.

4) La bataille menée en 1992 à Toulouse par l’ARTELA et le groupe HERACLES, mais aussi dans plusieurs autres académies, doit rester dans nos mémoires comme un exemple de résistance victorieuse : c’est à ce prix que nous continuons d’essayer d’enseigner au plus grand nombre et de faire vivre ces langues dont nous connaissons la valeur formatrice.

Voici toutes les informations et points de vue que je tenais à vous transmettre et que le bureau de l’Artela a transmis aujourd’hui à ses adhérents.

 

Jean-Pierre Aygon, Président de l’artela ( jpaygon@univ-tlse2.fr)

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