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Télécharger ce texte : anaeaf2002.rtf Très bientôt devraient sortir les textes officiels définissant les épreuves du Bac de Français pour 2002, qui concernent les actuels élèves de Seconde. Le projet qui les définit pour l’instant fait nourrir les plus vives inquiétudes sur le niveau de la certification qu’elles proposent, le contenu proprement disciplinaire qu’elles sanctionnent, et les formes d’évaluation auxquelles elles vont donner lieu, le tout masqué par une duplicité de vocabulaire dont on n’avait encore jamais eu l’équivalent. Voici ce qu’elles seront : A l’écrit, le candidat aura à travailler sur un corpus de textes constitué de textes et de documents dont un iconographique. Une première partie comportera des questions de compréhension notées de 6 à 8 points. Une deuxième partie, notée de 12 à 14 points lui permettra de choisir entre: • une " écriture de commentaire " d’un texte du corpus d’une " qualité d’écriture " suffisante. • " une écriture d’invention ", " production écrite selon une consigne explicite à partir d’un ou plusieurs éléments du corpus ".
Un niveau imprécis de certification.
Un corpus de niveau indéfinissable. Le " corpus " comprendra des " textes " et des " documents, y compris iconographiques ". Le dossier de l'évaluation de la rentrée 2000 de Seconde, de composition semblable, semble avoir donné un avant-goût de ce genre d'ensemble : des documents informatifs sans intérêt, deux extraits de la Bible et de Brecht non contextualisés, une bande dessinée mal reproduite, une nouvelle traduite, un document iconographique de circonstance, non signé et non daté. Pour l’analyse de ce dossier, on se reportera au travail d’Hélène Merlin-Kajman, " Des élèves et des rats ", publié dans Le Monde du 6.12.2000. On en retiendra que ce corpus était peu littéraire, sans souci de langue, de qualité iconographique médiocre, profondément irrespectueux de la liberté de l’élève, et surtout, pour une épreuve de français, dénué du moindre texte littéraire français de qualité. On remarquera que la dénomination extrêmement floue du projet d’EAF, " un corpus de textes et de documents, y compris iconographiques " autorise une dérive vers ce type de médiocrité, en ne définissant rien de la nature ou de la qualité du corpus, ce qui est inadmissible pour une épreuve d’examen présentée dans un Bulletin Officiel de l’Education Nationale. N’est officielle ici que l’inconsistance, inacceptable pour fixer un niveau d’enseignement, renseigner des élèves, certifier des exigences de fin d’études. Le parallèle entre une épreuve d’évaluation de Seconde et les épreuves d’EAF n’est pas forcé : l’introduction au baccalauréat d’une " écriture d’invention " proche du " sujet d’imagination " du brevet des collèges induit la confusion des deux niveaux. Dans les deux cas d’ailleurs, évaluation de début de Seconde et épreuves certificatives de fin de Première, le corpus inclut " une œuvre intégrale brève ". On craint qu’à leur insu, les élèves de Seconde n’aient servi à tester des " annales zéro " qui ne disaient pas leur nom.
Des questions imprécises. Des questions de compréhension du corpus seront posées. Leur niveau d’exigence est lui aussi consternant : " les questions proposées aux élèves vérifient qu’ils ont pris connaissance de l’ensemble du corpus " ! Cette consigne de base est confondante, au niveau de la Première. Par ailleurs, ces questions étant liées à " un ou des objets d’étude du programme de Première ", on peut supposer qu’elles ne seront que techniques, le programme étant lié à un étiquetage desséchant de " genres " et de " registres ". On vérifiera que le bon texte est dans la bonne case. Est-ce une certification digne de ce nom ? A-t-elle un rapport quelconque avec les qualités d’analyse et d’expression que doit vérifier un examen de français ?
Des " questions portant sur le corpus " qui balaieront un ensemble de textes (jusqu’à cinq) ne pourront faire entrer dans la subtilité de chacun, alors que jusqu’à présent les épreuves d’EAF certifiaient une qualité d’analyse fine, en commentaire et en dissertation littéraires, et jusque dans l’étude de texte argumentatif de sujet 1, s’il était de qualité et le questionnaire pertinent. Plus rien de ce genre ici : le projet ne parle que d’" engager un travail d’interprétation " ; il ne s’agit même pas de le mener à bien ; de plus cette formule ne fait appel à aucune méthode d’analyse répertoriée, sauf peut-être la " lecture analytique " dont parlent programmes et documents d'accompagnement, sans d'ailleurs jamais dire ce qu'elle doit être, voire la " lecture cursive ", qui ne se définit que par sa rapidité, et non sa compréhension. Ne pas définir, c’est refuser une épreuve de qualité et des exigences d’enseignement, faire du baccalauréat le lieu de l’à peu près et du niveau relatif. Encore une fois l’inconsistance du texte sidère, surtout si on le compare aux définitions antérieures des programmes, de 1994 par exemple, qui à propos des questions des sujets 1 et 2, comportaient un méritoire souci de précision.
Des " travaux d’écriture " peu identifiables. Malgré les noms canoniques dont on les affuble, triste tour de passe-passe, les contenus du " commentaire " et de la " dissertation " n’ont plus rien à voir avec la définition qu’on leur connaît. Ils perdent tout d’abord leur qualificatif " littéraire " : ce silence est éloquent, on constatera que la littérature a disparu de l’examen écrit, du moins sous la forme vivante et vivifiante qui justifie son étude. Le texte qui sera commenté n’est lui-même pas défini comme littéraire, mais comme doté d’ une " qualité d’écriture " qui " justifie cet exercice ". Qui la fixera ? Quelles qualités de langue et de profondeur de sens – les seules justifications de l’exercice – auront les textes ici proposés aux élèves ? Ne pas les définir, c’est encore une fois refuser les règles mêmes d’un examen que l’on prétend fixer, et faire de l’épreuve un ectoplasme déformable à l’envi. (1) L’exercice n’est pas plus déterminé que son support. L’ " écriture de commentaire " n’est pas codifiée, sauf par l’expression " le candidat… rend compte de sa lecture ", ce qui ouvre la voie à toutes les interprétations et justifie la paraphrase, voire le contresens. Il " met en valeur la singularité du texte " ; on retrouve ici le terme des programmes, où cette " singularité " n’est pas un apport décisif de sens et d’écriture, mais simplement la différence avec les " contraintes usuelles " (la coïncidence avec une " situation ", un " projet " et une " réception " comme le disent les programmes), ce qui est là aussi un étiquetage par élimination qui induit une vision desséchée des œuvres. " L’écriture de dissertation " n’en a plus que le nom. Elle porte non sur une œuvre, mais sur " une problématique fondée sur le corpus ". Quelle sera la qualité et le niveau de cette " problématique " ? Elle ne peut être que floue, étant fondée pour le candidat sur une extrême ampleur : "le corpus… les éléments du programme de première… ses lectures et sa culture personnelles ". Lorsque l’on sait que " ses lectures " peuvent n’être que des lectures cursives, donc éminemment superficielles ou peu vérifiées, on voit la qualité assignée à l’épreuve et au travail demandé. A contenu indéfini notation indéfinie aussi, niveau de certification de même. Quant à " l’écriture d’invention ", son absence de définition (" élaborer une production écrite selon une consigne explicite " est la codification minimale de toute rédaction !, " l’exercice raisonné de la faculté d’invention ", curieux oxymore, ne correspond à aucun contenu reconnaissable) la condamne comme épreuve d’examen. C’est une épreuve qu’on ne peut, par nature, préparer, sans la remplacer par une application desséchée de recettes (la mise en oeuvre d’ingrédients des " genres " et des " registres " des " objets d’étude " de Première) qui n’a aucune valeur certificative, ou donner l’élève en pâture au correcteur, dans la mesure où ce sujet favorise l’évaluation subjective, la notation de la personne du candidat, de son milieu socio-culturel, de son brio, de son " imagination " (note-t-on cette faculté ?) et non de son savoir ou de son niveau. Ou bien faut-il appeler " savoir " et " niveau " l’aptitude à répondre à un sujet aussi rhétorique et creux que ceux des nouveaux manuels : " Composez sous forme de parodie une scène tragique d’affrontement, d’aveu, de délibération ou de lamentation. (…) Vous emploierez l’alexandrin et vous vous efforcerez de respecter les indices d’énonciation et le lexique de la tragédie " (Delagrave). On peut aussi imaginer une version plus " nouveau public ", ce que les programmes appellent " les écrits fonctionnels, visant à mettre en forme et transmettre des informations " : soit le thème de Venise (un ou deux textes littéraires, un extrait du Guide Vert) ; présentez la ville dans laquelle vous habitez à la manière du texte du Guide Vert sur Venise (exemple donné au Syndicat National de l’Edition en janvier 2001).
Il est évident qu’avec des définitions aussi floues, l’évaluation des épreuves sera de la même approximation. " Commentaire " sans méthode ni littérature, " dissertation " ravalée au rang de " réflexion argumentée ", " écriture d’invention " par définition imprévisible : comment parler encore d’épreuves d’examen, comment parler encore de français, alors que l’ensemble est devenu inconsistant ? Ne restent aux " Epreuves " Anticipées de " Français " que l’anticipation, que l’on pourrait accroître… Pourquoi attendre la fin de Première ?…
S’agit-il encore de français ?
La dissolution de la discipline. Le professeur de français sort sidéré de la lecture du projet officiel de certification de sa discipline, définitive pour la plupart de ses élèves. Une absence, un non-dit significatif, un lapsus révélateur, bien plutôt une volonté : le terme " littérature " n’y figure pas. Le français n’a donc produit que des discours, des " objets d’étude ", des " textes et documents ", jamais d’œuvres dont le sens (autre mot cruellement absent ), ou la beauté, ou la profondeur, sont les seules raisons, pour nos élèves – y compris ceux des " lycées de masse " -, d’aimer le français. L’adjectif " littéraire " apparaît deux fois, en introduction et en définition finale de l’épreuve orale. Jamais dans la définition des épreuves écrites. Peut-on être plus clair ?
De quoi s’agit-il donc à l’écrit ? De la disparition de toute référence à la littérature.
" L’écriture de commentaire porte sur un texte (…) du corpus dont la qualité d’écriture justifie cet exercice ". La périphrase – en est-ce une ?- laisse songeur. Pourquoi tant de soin pour éviter le mot qui fâche ? Est-ce à dire qu’il ne s’agit plus de commentaire " littéraire ", ce que confirme d’ailleurs l’étiquette " écriture de commentaire " ? Et quelle sera donc la qualité des autres textes de ce même corpus, si le texte-support de commentaire, que l’on renonce à qualifier de " littéraire ", est de loin le meilleur ? Jalouserons-nous bientôt les épreuves des options artistiques qui, elles, ne comportent jamais de supports de seconde zone ?… Le " commentaire littéraire " ne l’est plus, dont acte. Pourtant, le professeur de français croyait enseigner autre chose qu’une " discipline de service " (2).
La " dissertation littéraire " elle aussi a vécu, il s’agit d’une " réflexion argumentée à partir d’une problématique fondée sur le corpus ". Quelle problématique ? " citoyenne ", comme le montrent les nouveaux manuels ? En tout cas pas littéraire, puisque le corpus ne l’est pas. Sans doute, une fois de plus, un étiquetage de genres et de registres… Qu’on ne nous dise donc pas que les nouveaux programmes sont littéraires, comme l’affirme l’Inspection Générale : si c’était le cas, il en resterait quelque trace dans la définition des exercices, au moins celle du commentaire et de la dissertation, puisque " les épreuves sont soumises aux programmes, et non l’inverse " comme l’a dit l’Inspection Générale (3). Qu’on ne nous conteste pas non plus que " c’est la littérature qu’on assassine rue de Grenelle " : la preuve en est faite. Qu’on ne nous dise pas que la dissertation est maintenue : l’Inspection Générale (4) affirmait récemment : " Un esprit normalement constitué, quel que soit son âge, ne peut pas disserter sur du vent ". L’ampleur du corpus, augmenté des " éléments du programme de première ", des " lectures et de (l)a culture personnelles, conduit pourtant à cette inconsistance, à ce " vent ". Si l’on s’en tient au seul corpus, l’exercice visant à son traitement existe, mais il s’appelle " travail de synthèse ", lorsque l’on n’a pas peur des mots. Exit donc la dissertation : l’Inspection Générale n’a pas aimé " la polémique ", elle a donc laissé le mot comme alibi, mais elle a enlevé la chose.
Du français sans littérature, donc sans étude du meilleur de la langue… Qu’on ne nous dise pas que les EAF vont sanctionner " la maîtrise de la langue et de l’expression orale et écrite ", c’est une affirmation pieuse, cette maîtrise n’est plus assurée, que ce soit dans les programmes ou dans les horaires. Les Instructions Officielles de 1987 respectaient davantage les élèves et avaient décidé de leur transmettre encore des capacités d’expression : " Le texte littéraire, plus que tout autre, se prête, par le travail d’écriture qu’il implique, à l’observation des pouvoirs du langage et à l’exploration des effets de sens " (5). Heureuse époque, qui comprenait encore les besoins et les attentes de son (déjà) " nouveau public ", et parlait encore de " sens " à des adolescents !
Qu’on ne nous dise pas non plus que la section littéraire L est moribonde, alors que l’on travaille à son extinction : une section littéraire peut-elle survivre sans littérature ? La section scientifique S survivrait-elle si on lui enlevait les sciences, la section économique ES si on lui enlevait l’économie ? On nous rétorquera que la future terminale L comportera de la littérature : c’est une façon de dire que les autres séries n’y ont pas droit. Et c’est un masque de façade : c’est en fin de Seconde, non de Première, que s’orientent les élèves. Le dispositif est grossier : pour la section L il sera déjà trop tard.
Quelle est donc cette étrange passion de la destruction de sa discipline qui a envahi l’Inspection Générale des Lettres, notre hiérarchie dont nous avions cru qu’elle ferait évoluer l’enseignement du français et de la littérature, alors qu’elle ne cherche qu’à le dissoudre sans comprendre que ses apports sont décisifs pour le " nouveau public " qu’elle nous oppose, mais que nous avons, nous, à sa différence, en charge ? Rien ne montre mieux que le texte de ces nouvelles EAF l’acharnement dilapidateur de notre Inspection. A moins qu’elle ne croie que pour ce " nouveau public " il ne faille une " nouvelle littérature ". Le " nouveau manuel " Hatier, qui a retenu la leçon, ne propose-t-il pas de " réécrire " la rencontre de la Princesse de Clèves et du duc de Nemours " comme pourrait le faire aujourd’hui un journaliste ‘people’ " ?
S’agit-il encore d’un véritable examen ?
La dissolution des apprentissages et de leur vérification. L’enseignement du français a toujours eu pour finalité " la formation d’une pensée critique autonome ", d’ailleurs les nouveaux programmes (après une réécriture tardive) réitèrent enfin cet objectif. Mais les nouvelles EAF ne vérifient en rien cette capacité. Tout le monde se donnera-t-il les moyens de la travailler avec les élèves, si l’examen ne la certifie pas ? Des termes intéressants de garantie ont en effet disparu dans le projet actuel : c’est ainsi que le " commentaire " n’est plus " composé ", alors qu’il constituait une épreuve intéressante de démonstration construite, fondée à la fois sur l’analyse et la synthèse. La " dissertation " n’est plus qu’un masque commode du vide, on l’a vu. Quant à l’écriture d’invention, on ne peut, à moins de jouer sur les mots comme le fait avec duplicité le président du Groupe d’Experts, considérer qu’il s’agit d’un exercice cadré. De toutes façons la définition qu’elle reçoit, l’évaluation de l’" exercice raisonné de la faculté d’invention ", pose un problème de cohérence interne : l’invention vérifiera la restitution des techniques des genres et de registres ; mais cette dérive techniciste et émotionnelle contrevient à l’exercice de la raison.
Certes, on parle pour les trois " travaux d’écriture " de " composition française ", mais peut-on y voir davantage qu’un vœu pieux, alors qu’ils ne pourront être réellement composés et construits dans le temps qui leur sera imparti ? Comment croire en effet qu’après la lecture d’un " corpus " assez ample et les questions qui vont l’accompagner, le candidat aura le temps de bâtir un devoir solide qu’on ne lui définit d’ailleurs pas ? Les exercices canoniques ont cela de bon que leur codification garantit un apprentissage sérieux et efficace, que l’horaire qu’on leur a toujours laissé à l’examen garantit une réalisation de qualité, ou tout au moins en donne les moyens. Ici le sérieux disparaît forcément du fait de la contrainte horaire, quant à l’efficacité, comment l’exercer sur le vide de la définition ? Ces épreuves n’auront donc rien à vérifier. Est-il légitime qu’elles fassent partie d’un examen ?
Des épreuves qui ne se préparent pas. " L’écriture d’invention " pose un problème spécifique par sa nature même. Imprévisible, ce sujet rend toute méthode impossible ; dénué de règles précises, il est constamment nouveau, et déstabilisant. Il sollicite également une somme de situations impossible à maîtriser : un manuel recense douze sortes d’écrits d’invention, susceptible chacune d’entrer dans quatorze types de sujets… Sa correction et sa notation sont elles aussi arbitraires et surtout aléatoires. Il se préparera donc peu, sans pour autant donner forcément de mauvaises notes. Sa nature est-elle certificative ? Les élèves prendront-ils le français au sérieux ? Ce sujet ne sera-t-il pas au contraire l’occasion de faire disparaître totalement, par concurrence déloyale, les exigences un peu moins imprécises des deux autres sujets ? Et ainsi de faire disparaître carrément, autant le dire, toute valeur formatrice de la pensée et de la langue dans l’enseignement du français ?
La suppression , pour l’épreuve orale , de l’interrogation sur un texte connu au profit d’une épreuve imprévisible pose le même problème, dans les mêmes termes. Le candidat doit " découvrir un texte " en rapport avec le programme et l’analyser " en dix minutes au maximum ". Cette épreuve peut-elle être sérieuse ? Peut-on demander raisonnablement à un élève, en quelques minutes, une " analyse " qu’un professeur aurait du mal à maîtriser dans le même temps ? On en rabattra donc sur les exigences, et on hésitera à noter sévèrement. Ici encore le projet paie de mots, avec une duplicité confondante, candidats et professeurs : l’expression " découvrir un texte " annule l’intitulé de l’épreuve, qu’on l’appelle " examen d’un texte littéraire " en introduction, ou " analyse " dix lignes plus loin.
Une notation facilement positive. Le but de tout cela, en sus de l’effondrement des exigences disciplinaires, est bien sûr que le baccalauréat soit un examen facile, presque un dû. Les nouvelles épreuves de l’EAF vont toutes dans ce sens : le questionnaire des trois épreuves écrites est noté de 6 à 8 points pour des demandes faciles (la lecture des textes !) (7), il suffira d’avoir quelques points aux " travaux d’écriture ", en outre eux aussi notés positivement puisque leur définition floue conduit à une évaluation également floue, le comble étant bien sûr le sujet " d’invention " où l’on hésitera à sanctionner durement un engagement visiblement personnel de l’élève. L’évaluation de l’oral présente les mêmes caractéristiques. La moyenne à l’examen est ainsi garantie d’avance. Le français, désormais sans valeur ni enjeu, ne sort pas grandi de l’affaire.
Que penser de telles épreuves d’examen de français, imprécises, peu probantes, engageant peu de travail et peu de niveau, contradictoires même avec l’idée, que l’on doit aux élèves, de vérification de leurs acquis ? A quel abandon de la matière l’Inspection Générale est-elle parvenue ? Pour quelles raisons la brade-t-elle ? Quel est l’intérêt, pour une hiérarchie disciplinaire, de faire disparaître sa raison d’être, sinon la conviction désespérante que le savoir – partant les efforts et la contrainte qu’il réclame - n’est pas émancipateur mais facteur d’inégalité ? Les professeurs de français, qui ont toujours pensé que leur matière devait conduire aux buts inverses de liberté, de distance critique, d’émancipation et d’expression, ne jouent pas sur le même terrain. Le fossé est ouvert. Collectif "Sauver les lettres"
1. Ce que souhaite d'ailleurs l'Inspection Générale, qui a pensé pour l'avenir à des " épreuves évolutives ", aux " recadrages réguliers " ; la réforme permanente !. 2. Le terme est de l'Inspecteur Général de Lettres Alain Boissinot, au colloque ministériel d'octobre 2000. 3. Marc Baconnet, Ecole des Lettres n°7 99-2000, p. 117. 4. Marc Baconnet, Ecole des Lettres n° 7, 99-2000, p. 10. 5. BO spécial n°1, 5 février 1987. 6. Intervention de Katherine Weinland aux journées interacadémiques de Rennes, janvier 2001. 7. L'inspection Générale indique elle-même l'avantage des questions sur des épreuves globales comme le commentaire ou la dissertation : " l'évaluation fractionnée est, par essence, plus rentable que l'évaluation globale. " (K. Weinland, journées interacadémiques de Rennes, janvier 2001).
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