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"Quels savoirs enseigner dans les lycées?" RAPPORT D'ETAPE DU COMITE D'ORGANISATION Télécharger ce texte : rapport_meirieu.rtf
La consultation initiée par Claude Allègre, Ministre de l'Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie sur la question " Quels savoirs enseigner au lycée? " a permis de mobiliser une grande partie de l'institution scolaire dans une réflexion collective sur les finalités de celle-ci. Incontestablement, en dépit ou à cause de la brièveté des délais, en dépit ou à cause des choix méthodologiques du comité d'organisation, laissant une grande liberté d'initiative aux académies pour traiter des questionnaires délibérément ouverts, "la machine s'est mise en marche". Et c'est bien là, la première leçon que nous pouvons tirer de cette opération : pour peu que les personnels de l'Éducation nationale soient sollicités, pour peu que les élèves soient interrogés, ils sont capables, les uns et les autres, de s'engager et de saisir l'occasion qui leur est donnée pour exprimer leurs points de vue. Rappelons quelques chiffres : 1 812 109 questionnaires d'élèves (dont 10% environ ont été remplis collectivement) ont été dépouillés, 78% des élèves des lycées publics ont répondu au questionnaire, 52% des enseignants, tous lycées confondus, se sont exprimés, individuellement ou collectivement, sur l'enseignement de leur discipline ; près de 100% des établissements ont apporté une contribution spécifique, même si celle-ci n'a pas toujours impliqué tous les personnels. Certes, nous aurions souhaité une plus grande participation des parents, en particulier à travers le questionnaire destiné aux établissements, certes notre démarche n'a pas toujours été comprise par tous... mais il n'en reste pas moins vrai qu'il s'est passé quelque chose d'original, d'inédit même, dans l'institution scolaire française. Nous avons nous-mêmes parlé parfois, à propos de la consultation, d'expérience d'un " fonctionnement démocratique nouveau ". La chose, évidemment, n'est pas si simple. Il ne suffit pas de faire parler, de faire écrire, de faire débattre même, pour qu'émergent des consensus sensés et qu'une parole collective s'exhausse au dessus de la confrontation des opinions individuelles. Il est clair, en effet, qu'en matière politique, la définition du " bien commun " n'est pas réductible à la somme des points de vue de chacun, toujours contextualisés, toujours pris dans la complexité des histoires entrelacées, où l'on ne renonce jamais facilement à la satisfaction de ses intérêts à court terme... Mais nous ne croyons pas, pour autant, qu'une quelconque cléricature soit habilitée ici à statuer en surplomb au nom d'une vérité révélée. Nous croyons, au contraire, que c'est dans le travail lent et patient, la rencontre régulière et organisée des personnes, l'effort commun pour penser ensemble " le bien commun ", que se trouve l'espoir d'une société à hauteur d'homme. C'est dire qu'entre les intérêts de chaque famille, de chaque élève, de chaque discipline, de chaque établissement, de chaque enseignant, d'une part, et ce qui peut constituer l'horizon de référence du lycée de la République, d'autre part, il y a, tout à la fois, continuité et rupture. Et c'est ce double mouvement que nous nous proposons d'incarner aujourd'hui : continuité, car nous aurons à cœur de reprendre ici les principaux résultats de la consultation et de dire les points de vue exprimées dans toutes les académies de France métropolitaine et d'Outre-mer. Rupture, car nous formulerons, à partir de là, un certain nombre de principes. " Principes " et non propositions, suggestions ou projets. Car, pour nous, un " principe " représente précisément plus qu'un constat assorti de suggestions. Un principe, au sens de ce mot dont Montesquieu et les Lumières ont proposé l'usage, inspire et organise une configuration nouvelle qui dépasse une situation donnée. Un principe peut nous rendre intelligents parce qu'il rend le présent intelligible à travers la perspective de l'action transformatrice qui est projetée. Et l'on peut se représenter ce qu'est, dans ce sens, un principe si l'on se souvient que la métaphore est empruntée ici à la chimie où l'on parle bien d'un " principe actif ". Nos principes doivent donc être discutés largement ; il doivent faire l'objet de la plus grande concertation possible. Ils ne cachent pas leur parti pris et ouvrent à l'interrogation sur leur fécondité : qu'est ce qui les inspire et que permettent-ils de faire ? Voilà précisément des questions susceptibles de nourrir un véritable débat qui ne fasse l'impasse ni sur les finalités ni sur les modalités de l'action publique. C'est à ce débat que nous vous invitons.
1) La place et la fonction du lycée dans l'institution scolaire L'ensemble de la consultation a fait apparaître des attentes considérables à l'égard du lycée, tant chez les enseignants, les élèves que les parents. Mais ces attentes sont loin d'être homogènes et leur hétérogénéité-même suggère que l'institution doit être clairement redéfinie dans ses missions. La notion de " projet d'établissement " paraît maintenant entrée dans les faits, comme en témoigne très largement les réponses au questionnaire auprès des établissements ; mais des inquiétudes demeurent, chez certains enseignants et une partie des élèves, sur l'articulation de celui-ci avec un projet national qui n'apparaît pas toujours avec transparence. La peur d'un démantèlement du service public est présente à travers plusieurs indices (le refus de " programmes-maisons ", l'attachement à la valeur nationale du baccalauréat, le souci de l'égalité des chances dans l'accès aux études supérieures. Et, par ailleurs, les élèves des lycées professionnels expriment très fortement leur désir d'être reconnus comme des lycéens à part entière. La consultation témoigne ainsi de la volonté que soit réaffirmée l'unité du lycée dans un projet commun de formation. Quel projet ? Que sorte du lycée un citoyen informé et lucide sur les enjeux de notre histoire et de nos sociétés, exigeant dans sa recherche de la vérité et solidaire dans son rapport avec les autres. Toutes les synthèses académiques font apparaître ce " devoir d'exemplarité " dont parle le rapport de Bordeaux et qui impose à tout lycée l'idéal commun dont il convient de s'approcher avec obstination. Mais aucune de ces synthèses, symétriquement, ne conteste pour autant la nécessité d'incarner ce projet à travers la diversité de filières et de séries spécifiques. Le principe de celles-ci n'est jamais contesté, même si la définition exacte de chacune et leur équilibre disciplinaire font parfois l'objet de demandes d'ajustements. Globalement, de nombreux enseignants soulignent la nécessité d'une plus grande cohérence des enseignements au sein de chaque filière qui favoriserait, tout à la fois, la pratique d'une interdisciplinarité ordonnée aux champs disciplinaires de référence de chacune d'elles et la lisibilité des cursus proposés. Mais c'est aussi la lisibilité même de la place et de la fonction du lycée dans le système éducatif dont l'amélioration est souhaitée. Les professeurs disent parfois hésiter, en effet, entre un enseignement qui prolongerait le collège et un enseignement qui préparerait à l'enseignement supérieur. Les élèves, quant-à-eux, ont des perceptions très contrastées de cette institution : lieu de simple " consommation de cours " pour certains, passage rapide vers un premier cycle universitaire aux contours mal définis pour d'autres, préparation filiarisée aux grandes écoles ou lieu d'attente avant d'accéder, enfin, à la " vie active ".. tous les cas de figure sont possibles. C'est sans doute cette incertitude qui les amène systématiquement, à plus de 69%, à placer la réussite à l'examen final en tête de leurs objectifs de scolarisation. Ce souhait, certes, n'est en rien condamnable, il témoigne cependant lui aussi de la nécessité de redéfinir un horizon au lycée et des finalités claires dont le baccalauréat ne soit lui-même, salutairement, qu'un indicateur. principe 1 : Le Lycée est une institution de la République. Sa place et sa fonction ne peuvent donc être définies avec pour seule référence les besoins de son environnement immédiat ou les demandes de la société marchande. Il ne tire nullement son identité de la nature ou de la force des pressions internes et externes qui s'exercent sur lui. Chaque lycée dispose donc d'un référent national clair sur ses missions. Le " projet d'établissement ", prévu par la loi d'orientation de 1989, est articulé à ce référent, non pour en contredire subrepticement l'esprit, introduire ou accroître les disparités locales, mais bien pour permettre qu'il se concrétise dans les conditions de la réalité. Que ces conditions soient prises en compte, voilà qui garantit la réussite du projet national. principe 2 : Le Lycée est une institution de la République qui forme ses élèves à en devenir des citoyens actifs et solidaires. Cet apprentissage s'effectue à travers l'ensemble des activités proposées dans l'établissement : enseignements, organisation de la vie collective, échanges avec l'extérieur, rapports avec les personnels enseignants, administratifs et de service. Toutes ces activités visent à favoriser la transmission des savoirs qui est l'occasion privilégiée de l'apprentissage de la citoyenneté : à travers cette transmission, le lycée enseigne aux élèves les attitudes fondatrices de la probité intellectuelle et de la recherche de la vérité. Il développe chez eux esprit critique et vigilance à l'égard de toutes les formes de manipulation et de totalitarisme. Pour cela, il s'attache à éclairer les enjeux de notre société à travers la présentation de la culture héritée de notre histoire. principe 3 : En tant qu'institution de la République le Lycée est unique. C'est le même lycée qui offre des filières de formation générale, technologique et professionnelle. Il est ainsi un lieu d'accueil pour tout une classe d'âge. La valorisation des lycées professionnels et la reconnaissance de leur égale dignité avec les lycées d'enseignement général et technologiques sont une priorité absolue de la politique éducative. Celle-ci combat l'exclusion et s'inscrit dans une politique d'aménagement du territoire qui vise à la suppression de toute structure de relégation. L'élaboration de la carte scolaire des formations participe donc d'un projet politique global qui promeut la mobilité géographique et sociale et fait du lycée un instrument de lutte contre toutes les inégalités. L'enseignement privé sous contrat, en tant qu'il participe au service public, doit s'inscrire nécessairement dans cette perspective. principe 4 : Le lycée est une institution de la République qui occupe une place charnière dans le système scolaire. Entre la scolarité obligatoire - qui obéit à une logique d'unification - et l'enseignement supérieur - qui obéit à une logique de spécialisation -, le lycée participe à la formation intellectuelle et sociale des jeunes dans la perspective d'une diversification progressive. Pour cela, il articule deux éléments constitutifs : d'une part, une culture commune à laquelle doivent accéder tous les élèves, quelles que soient leur filière, leur série et le choix de leurs options, d'autre part, des cursus de formation dont la lisibilité et la cohérence doivent être renforcées. Un cursus est défini par une " série ", à l'intérieur d'une des trois " filières " : enseignement général, enseignement technologique, enseignement professionnel. Les séries actuelles créées en 1991, à la suite des recommandations du Conseil national des programmes, constituent aujourd'hui un mode d'organisation acceptable des lycées d'enseignement général et des lycées technologiques. Elles ont été stabilisées récemment et cela ne permet pas d'envisager leur évolution qu'à moyen terme ; cette évolution ne pourra s'effectuer qu'à partir de l'articulation du lycée avec l'enseignement supérieur et les secteurs professionnels. Les études en lycée professionnel doivent, en revanche, être présentées de manière plus lisible et organisées en trois champs : " services ", " production ", " artisanat et métiers d'art ". A l'issue du lycée tout élève dispose de la possibilité de poursuivre des études ou d'accéder à un emploi qualifié.
2) Les principes d'organisation des programmes du lycée S'agissant de l'organisation des programmes, la consultation a fait ressortir, de manière très convergente chez tous les partenaires, le souci d'un allégement qui ne soit pas pensé en termes de simple " réduction " mais bien sous la forme d'un " retour à l'essentiel " comme l'indiquent les collègues de l'Académie de Nancy-Metz. Le rapport de l'Académie de Rennes explique, lui, à quel point cet allégement est nécessaire pour diminuer, voire éradiquer, le bachotage. Les enseignants de toutes les académies se plaignent du caractère trop touffu de programmes qui mettent sur le même plan, comme le soulignent plus particulièrement les professeurs des disciplines littéraires, des éléments fondamentaux et des exemples arbitraires. Tous semblent s'accorder sur la formule utilisée dans l'Académie de Paris : " moins mais mieux ". En même temps, les enseignants se disent, à de très rares exceptions près (les disciplines artistiques parfois, l'éducation physique et sportive de temps en temps), attachés à des programmes nationaux qu'ils considèrent cependant comme trop contraignants. C'est le cas, en particulier des professeurs de Lettres, presque unanimes à récuser les listes limitatives d'œuvres obligatoires dont beaucoup dénoncent l'usage scandaleusement commercial qui en est fait par certains éditeurs. Ils restent néanmoins demandeurs de directives générales sur les référents culturels communs dans lesquels puiser, même s'ils souhaitent en voir la liste élargie dans l'espace et dans le temps (la mythologie grecque et la littérature étrangère, la littérature martiniquaise, réunionnaise, guadeloupéenne ou guyanaise pour les académies d'Outre-mer). A plusieurs reprises, les professeurs de français et de philosophie suggèrent que les programmes fixent des catégories d'œuvres au sein desquelles le choix leur soit laissé. Par ailleurs, concernant l'organisation des programmes, on trouve dans de nombreuses réponses d'enseignants, en particulier scientifiques (mathématiques, physique et chimie, sciences de la vie et de la terre), une réflexion poussée sur les exigences spécifiques des enseignements que l'on pourrait dire " de complément ". Ces professeurs s'accordent, en effet, à récuser une conception de la culture scientifique et technique pour les élèves des classes littéraires ou économiques qui ne soit qu'une réduction appauvrie des programmes spécialisés. Ils illustrent ainsi la fameuse formule de Brillat Savarin affirmant que " l'on ne forme pas de la même manière un cuisinier et un gastronome ". Une telle formule est d'autant plus à prendre au sérieux que l'on observe un phénomène paradoxal dans les réponses des lycéens : ceux-ci, tout à la fois, déclarent inutiles les " disciplines secondaires " (les sciences en séries littéraires et vice versa) et réclament, par ailleurs, quelles que soient leurs filières, plus de culture générale, une sensibilisation aux problèmes de société, aux grands enjeux de la science. La demande d'une culture moins instrumentale et techniciste, capable de compléter les spécialisations requises par le cursus, s'inscrit ici, plus globalement, dans une demande de sens : quand les savoirs scolaires ne sont pas finalisés par un usage futur dans des études ou des activités professionnelles ultérieures, ils doivent s'attacher à livrer leur sens grâce à l'intelligence qu'ils donnent du monde et grâce à la curiosité qu'ils assouvissent et avivent tout à la fois. C'est aussi dans cette perspective qu'on peut comprendre la requête étrange de ces lycéens d'un lycée technologique de l'Académie de Versailles : " Donnez-nous des passions, apprenez-nous à gérer nos loisirs, à découvrir nos hobbies futurs ". principe 5 : Selon que leur contenu font ou non l'objet de cursus d'études après le lycée ou d'investissement immédiat dans la vie professionnelle, les enseignements du lycée s'organisent suivant deux logiques : une logique de préparation à une spécialisation ou une logique de fin d'étape. La prédominance de l'une ou l'autre de ces logiques conduit à différencier les modalités de transmission d'une discipline selon les filières et les séries. Ce principe s'applique particulièrement à la culture scientifique destinée aux élèves des cursus littéraires ou de la série " sciences économiques et sociales " qui ne peut nullement être constituée par une réduction ou une fragmentation du programme des séries scientifiques. Elle doit représenter, au contraire, une voie d'accès particulière à la compréhension du monde sous l'aspect de ses développements scientifiques et techniques. De même, l'enseignement des langues vivantes dans les séries scientifiques et technologiques ne peut être conçu comme une version appauvrie ou moins exigeante du même enseignement dans les séries littéraires ; il doit s'appuyer sur des supports spécifiques et, sans renoncer à ses exigences culturelles, favoriser la communication dans les domaines où les élèves auront à se spécialiser. principe 6 : Les programmes ne se confondent pas avec la programmation. Les programmes, rédigés à l'échelle nationale, fournissent des indications peu nombreuses mais capables de permettre la constitution de référents culturels communs. Ils ne constituent pas une programmation dans la mesure où ils ne contraignent ni à un découpage rigide de l'enseignement en séquences successives, ni à l'utilisation obligée d'exemples, de supports ou d'exercices donnés, qui restent à l'initiative des enseignants. Les programmes indiquent les concepts, thèmes, périodes, auteurs indispensables à la formation intellectuelle des élèves, ils ne comportent jamais de listes limitatives et obligatoires d'œuvres à étudier. Leur rédaction répond à une double exigence : être comprise de façon similaire par tous les enseignants et, tout autant, inciter ces derniers à en interpréter la prescription de manière libre et créative. Des compléments techniques et documents pédagogiques accompagnent les programmes dans cette double perspective.
3) La culture commune L'exigence d'une culture commune apparaît très fortement, comme un des résultats les plus saillants de la consultation. Certes les questionnaires - et, en particulier, le questionnaire destiné aux enseignants - étaient sans doute inducteurs dans ce domaine. Mais, à regarder de près les réponses des élèves, il est clair que l'homogénéité des " demandes culturelles " à l'égard de l'école est, à elle seule, un fait sociologique majeur : tous les lycéens demandent qu'une place plus grande soit faite aux activités sportives, à l'expression artistique, aux questions politiques et même - comme l'ont affirmé unanimement les délégués des Comités académiques de la vie lycéenne réunis le 26 mars à l'Isle d'Abeau - à un enseignement des religions " neutre " et " laïc ". Tous les élèves souhaitent que le lycée soit un lieu serein de réflexion et de débat sur les enjeux de société à la lumière de connaissances précises qui permettent de les comprendre. C'est sans doute dans cette perspective qu'il faut entendre les sollicitations des lycéens pour tout ce qui touche l'organisation de la Cité et, en particulier, pour l'enseignement du droit, demandé comme discipline à part entière par 19% d'entre eux. Ils veulent apprendre et comprendre les principes qui régissent la vie sociale et ce sont eux, plus encore que les enseignants à qui, pourtant, la question était posée, qui répondent quand on leur demande " Que n'est-il pas permis d'ignorer ? ", " Nul n'est sensé ignorer la loi ". On ne sera donc pas surpris, dans la même optique, de l'importance attribuée par les lycéens à l'histoire : c'est la discipline la plus citée quand on leur demande de rappeler une question qu'ils ont particulièrement bien assimilée, et celle aussi dont ils regrettent le plus qu'elle ne fasse pas l'objet d'une approche moins scolaire, moins soumise aux exigences académiques de l'examen. C'est aussi dans cet esprit qu'il faut comprendre la place essentielle qu'ils donnent au français dont ils reprochent, en parfaite convergence avec l'immense majorité de leurs enseignants, le caractère trop techniciste qui écarte, tout à la fois, l'apprentissage de la communication écrite et orale et la réflexion sur le sens des œuvres et sur les questionnements universels dont elles sont porteuses. Les propos tenus sur la philosophie s'inscrivent dans le prolongement de la demande générale des lycéens. Ils souhaitent que le lycée fasse écho à leurs préoccupations. Mais ils ne lui demandent pas, pour autant, de renoncer aux apports culturels indispensables qui permettent de mettre ces enseignements en perspective : largement plébiscitée par les lycéens des lycées professionnels qui en sont privés, attendue avec beaucoup d'intérêt par les lycéens de seconde et de première, la philosophie est aussi, il faut bien en faire état, une occasion de déceptions pour un nombre significatif d'élèves de terminale littéraire qui regrettent de ne pas y trouver des occasions de débat sur les problèmes qui les préoccupent (plus de 41% d'entre eux). Certes, on peut comprendre que les professeurs de philosophie se refusent à organiser démagogiquement des discussions informelles sur " l'amitié entre garçons et filles est-elle possible " ou " le clonage ". Certes, on doit se réjouir qu'ils souhaitent utiliser comme médiations les grandes œuvres philosophiques. Mais ce n'est pas leur faire injure que de relever que, pour beaucoup d'élèves, précisément, ces œuvres n'ont guère de fonction de médiations au regard des questions philosophiques qu'elles pourraient aider à poser et à comprendre, mais sont considérées plutôt comme des objets de savoirs scolaires instrumentalisés dans la seule perspective de l'examen. C'est pourquoi, si la philosophie doit rester selon l'expression consacrée, un " couronnement " de la scolarité au lycée, elle doit, comme le font remarquer des enseignants de l'Académie de Montpellier, concerner tout le lycée et véritablement " couronner ", en s'y articulant, l'ensemble des disciplines qui y sont enseignées. Ajoutons que lycéens et enseignants observent ensemble que la culture commune doit évidemment comporter les dimensions scientifique, technologique, linguistique et économique. Mais, conformément aux attendus des chapitres précédents, ils notent que, même s'il existe des objectifs nationaux, il convient, en fonction des dominantes des filières et des séries, d'atteindre ces objectifs selon des parcours variés. Seul l'usage de l'informatique fait ici exception : la presque totalité des élèves, depuis ceux du Centre national d'enseignement à distance jusqu'à ceux de Mayotte, expriment ici une inquiétude réelle, liée parfois à la crainte de ne pas trouver d'emploi s'ils ne disposent pas de connaissances en informatique. Au point que, dans l'Académie de Nice, l'informatique est citée dans 86% des questionnaires remplis par les élèves. Au total, il est particulièrement évident que les élèves ne récusent nullement les savoirs enseignés au lycée, ils disent simplement qu'ils veulent " vivre ces savoirs ". Ils affirment ainsi, à leur manière, la place éminente que doit avoir la pédagogie principe 7 : Une culture commune est définie nationalement sur proposition du Conseil national des programmes pour tous les élèves de lycée quels que soient leur filière, leur série et le choix de leurs options. Elle est formulée en termes d'objectifs de fin de lycée et constitue une référence unique pour tous les établissements, d'enseignement général, technologique, professionnel et agricole, publics et privés. Elle comprend, d'une part, un ensemble de savoir-faire sociaux indispensables à l'élève, quel que soit son avenir scolaire, professionnel et personnel et, d'autre part, un ensemble de connaissances permettant de référer ces savoir-faire à leur histoire et à leurs enjeux. Les dimensions instrumentale et patrimoniale de la culture commune doivent être systématiquement liées à chaque étape de son acquisition. principe 8 : La culture commune garantit la cohésion sociale et évite l'exclusion. Elle fait l'objet de programmes indifférenciés, quelles que soient les filières et les séries pour les disciplines suivantes : - français (expression écrite, expression orale, histoire de la littérature, étude de textes français et étrangers, en évitant dans tous ces domaines des approches technicistes), - histoire-géographie (mise en place de repères chronologiques généraux intégrant l'ensemble des civilisations, étude approfondie de l'histoire contemporaine et de ses enjeux), - éducation civique, juridique et politique (éléments de droit présentés à partir de références historiques, les régimes politiques, les institutions de la République, le droit du travail, l'usage de l'information chiffrée dans le débat public, les grandes questions de société ; tous ces thèmes sont abordées à travers la pratique de l'oral et dans la perspective d'un apprentissage au débat argumenté),, - éducation physique et sportive (formation à la pratique d'activités permettant la maîtrise corporelle, le développement de toutes les formes de motricité, l'apprentissage des situations de coopération, la gestion autonome de la santé),, - expression artistique (sous forme d'au moins deux ateliers annuels choisis par les élèves dans les propositions de l'établissement : théâtre, danse, cinéma, arts plastiques, musique, etc.). Ces enseignements de culture commune doivent figurer dans tous les niveaux d'enseignement et dans toutes les sections avec un horaire commun. Des compléments à ce programme indifférencié sont proposés, en première et terminale, en fonction de l'importance que revêtent chacune de ces disciplines dans les filières et les séries. Par ailleurs, tous les lycéens accèdent, en classe terminale, à la réflexion philosophique, selon des modalités adaptées à leur cursus. Cet enseignement articule les questions singulières que se posent les élèves avec la proposition d'une culture philosophique exigeante. Il permet à chacun de trouver un écho à ses préoccupations et interrogations propres en lui faisant découvrir en quoi elles participent au questionnement universel sur " l'humaine condition " ; il est, en ce sens, un puissant outil d'intégration sociale. De plus, l'enseignement de la philosophie se nourrit, prolonge et met en cohérence de manière critique les acquis de l'ensemble des autres disciplines. Il utilise diverses formes d'exercices écrits, fait une large place à l'expression orale et veille à ce que tous les élèves s'expriment régulièrement dans la classe. Enfin, tous les lycéens bénéficient d'un approfondissement de l'apprentissage systématique à l'informatique : à partir du plan d'équipement actuel, les élèves doivent accéder au lycée en maîtrisant déjà les fonctions de base de l'ordinateur (usage d'un traitement de texte, d'un tableur, accès et usages élémentaires du réseau, couplage d'un ordinateur et d'un autre appareil). Au lycée, l'usage des nouvelles technologies passe par toutes les disciplines, en lien avec les exigences de chacune d'entre elles. En seconde, cela s'effectue à travers l'initiation aux disciplines technologiques. En première et en terminale, les nouvelles technologies, outre leur usage disciplinaire, sont un instrument privilégié du travail personnel. principe 9 : Tout en participant à la culture commune, les autres disciplines font l'objet d'approches différenciées en première et en terminale, compte tenu des exigences liées à la poursuite des études, à la nature des savoirs enseignés et à la nécessité d'une progression rigoureuse. La culture scientifique et technique, ainsi que l'acquisition des outils mathématiques fondamentaux sont présentes dans toutes les filières et séries. L'apprentissage des langues vivantes constitue, enfin, une nécessité pour tous les élèves ; il doit s'effectuer différemment en fonction des séries, des filières et des orientations possibles. principe 10 : L'accès à une culture commune, aux objectifs communs d'un programme indifférencié supposent la mise en œuvre de méthodes différenciées, adaptées aux contextes spécifiques des élèves. L'utilisation de parcours diversifiés ne peut, en aucun cas, amener à renoncer à l'exigence d'une culture commune.
4) La structuration du lycée La seconde de détermination n'est jamais véritablement mise en cause par les enseignants et les élèves. Les premiers sont vraiment très peu nombreux (4% environ) à souhaiter que l'orientation dans les séries d'enseignement général s'effectue dès la fin de troisième. En revanche les élèves souhaitent, dans leur immense majorité, que la seconde permette véritablement de se déterminer et que la filiarisation déguisée qui existe dans certains établissements soit supprimée. " Il faut que les choses restent ouvertes jusqu'à la fin de la seconde ", affirment les lycéens de Caen. Dans les lycées technologiques et professionnels, la demande des lycéens est plus tournée vers la connaissance des secteurs professionnels qui est considérée comme insuffisante ; mais cette demande n'est pas uniquement formulée en termes de stages et les élèves suggèrent souvent, comme dans l'Académie d'Orléans-Tours, des " séquences découverte " dont les modalités exactes sont à définir. En règle générale, l'inquiétude sur l'orientation, les modalités de choix des filières et des séries, ainsi qu'à un moindre degré, les conditions de choix des langues et des options dites obligatoires préoccupent très largement les lycéens. Beaucoup d'entre eux ont le sentiment d'avoir été amenés à faire des choix sans véritable connaissance des contenus, des modalités d'enseignement et des débouchés autorisés. Beaucoup (37% dans l'Académie de Lyon) disent découvrir trop tardivement le caractère irréversible de certains choix. Ils constatent que leurs décisions, prises sans information suffisante, compromettent des possibilités d'études supérieures pourtant souhaitées. Par ailleurs, certains élèves souhaitent que, selon la formule utilisée par une classe de l'académie de Strasbourg, " les matières que l'on étudie pour savoir si on va les choisir ne comptent pas dans la moyenne ". Il y a là une demande des lycéens pour une véritable éducation au choix qui renvoie, certes, au lycée mais aussi au collège : les lycéens affirment souvent n'avoir jamais eu l'occasion d'effectuer des choix réversibles et sans conséquences avant de poser des choix déterminants et irréversibles pour leur avenir. En ce qui concerne les options, les enseignants et les élèves sont attentifs à ce que les enseignements aujourd'hui présents dans celles-ci ne fassent pas l'objet de suppressions et qu'il n'y ait pas d' " appauvrissement culturel " du lycée ; de très nombreux élèves (67%), tous lycées confondus, souhaitent que l'expression artistique soit présente pour tous et non reléguée en option. Ils souhaitent néanmoins que la possibilité d'une option à choix totalement libre soit maintenue ou instaurée pour tous. principe 11 : La classe de seconde générale et technologique est une classe de détermination. En tant que telle, elle permet aux élèves d'approcher les disciplines nouvelles qui spécifieront ensuite les séries ; c'est la condition indispensable d'une orientation lucide. Cette classe de seconde comporte donc, tout naturellement, les disciplines constitutives de la culture commune auxquelles il faut ajouter un enseignement commun en langues vivantes, mathématiques, physique-chimie et sciences de la vie et de la terre, disciplines qui seront étudiées ensuite de manière différenciée selon les séries. Mais, de plus, les lycéens doivent bénéficier d'une initiation systématique aux nouvelles disciplines qui spécifieront certaines séries : sciences économiques et sociales, sciences technologiques industrielles et tertiaires. C'est dans le cadre de ces dernières que les lycéens bénéficient d'un apprentissage à un usage avancé de l'informatique. Les résultats obtenus par chaque élève dans les disciplines d'initiation sont évalués hors de toute préoccupation de sélection, dans la seule perspective de l'éducation au choix. Leur enseignement est impérativement concentré sur une partie de l'année scolaire afin d'éviter le morcellement excessif de la journée de travail de l'élève. principe 12 : En plus des disciplines d'initiation en seconde, l'expression artistique, qui était antérieurement enseignée dans le cadre des options, est introduite systématiquement dans toutes les séries à hauteur d'une heure par semaine. L'éducation civique, juridique et politique devient une discipline à part entière bénéficiant elle aussi d'une heure par semaine. L'enseignement de ces deux disciplines peut être regroupé sur des périodes plus longues et ne pas être soumis à la rythmicité hebdomadaire. En outre, dès la classe de seconde et jusqu'à la fin du cycle terminal, les élèves peuvent choisir une option facultative, indépendamment de la série choisie en classe de première ; l'horaire hebdomadaire moyen et fixé à deux heures. Une carte scolaire des options veillant à l'équité sociale de la distribution de celles-ci est élaborée ; elle évite l'implantation exclusive des options " rares " dans les établissements d'enseignement général disposant de classes préparatoires aux grandes écoles ; elle favorise la mise en place d'option susceptibles de favoriser des orientations spécifiques après le baccalauréat, en particulier par l'apprentissage d'une troisième langue vivante. principe 13 : La classe de seconde professionnelle, première année de préparation au brevet d'études professionnelles (BEP), est une classe de détermination. Les élèves y accèdent à la culture commune et y découvrent en même temps les champs professionnels dans lesquels ils pourront se spécialiser par la suite (" les services ", " la production ", " l'artisanat et les métiers d'art "). Cette découverte s'effectue à travers des séquences spécialisées sur des plages horaires de durée suffisante pour éviter le morcellement et permettre une initiation féconde. Elle suppose la mutualisation d'équipements entre établissements voisins. Elle permet à chaque élève de choisir, de manière raisonnée, sa voie de formation et évite les orientations précipitées, en particulier celles des filles, vers des sections prédéterminées trop tôt sur des représentations erronées. principe 14 : Quoique le lycée s'efforce de permettre aux élèves des choix responsables sur le moyen terme, l'orientation n'y revêt jamais un caractère irréversible. Des " passerelles " sont donc organisées entre les filières ; leur réalisation, décidée conjointement par les établissements d'un même bassin de formation, fait l'objet de mesures d'accompagnement nécessaires à l'éventuelle remise à niveau dans certaines disciplines : ces mesures visent à renforcer les savoirs généraux et à acquérir des connaissances méthodologiques, technologiques ou professionnelles selon la voie choisie. Certaines " passerelles " sont indispensables : - après la seconde professionnelle, en direction de la première générale ou technologique, - après le BEP, en direction de la première générale et technologique, - après la seconde générale et technologique, en direction de la terminale BEP, sous réserve que l'élève effectue une formation spéciale de dix semaines dans le secteur professionnel choisi (ces formations sont organisées par l'Education nationale au niveau de chaque académie). Parce qu'elles contribuent à la mobilité sociale et sont donc facteurs de justice et d'intégration, les " passerelles " représentent une priorité académique. Chaque rectorat établit donc, tous les ans, une carte générale de celles-ci qu'il fait largement connaître aux élèves et aux parents. L'usage de ces " passerelles " et ses résultats font l'objet d'une évaluation annuelle précise. principe 15 : Le programme d'information sur l'orientation après le lycée s'inscrit dans le cadre défini par le projet d'établissement. Ce programme est élaboré annuellement, avec l'aide des instances et documents académiques ; il est imprimé et communiqué aux élèves et aux parents chaque année avant la fin du mois d'octobre. Il comprend : une présentation exhaustive de la carte des formations régionales et des perspectives du bassin d'emploi, les actions organisées par l'établissement avec son environnement, la participation des élèves de l'établissement aux actions organisées par l'enseignement supérieur ou les partenaires professionnels, la liste des lieux et instances où les élèves peuvent obtenir des informations précises, les modalités d'intervention des conseillers d'orientation psychologues (COP). Ce programme sert de base aux réunions d'information qui se tiennent au cours du mois de janvier pour les élèves et leurs parents.
5) L'accompagnement des élèves dans leur scolarité Comme cela a été souligné très fortement et à juste titre par la presse, alors même que le questionnaire adressé aux lycéens ne portait pas directement sur cette question, ces derniers en ont profité pour dire l'importance qu'ils attribuaient à la qualité de la relation pédagogique. 22% d'entre eux considèrent que c'est le vrai " remède à l'ennui scolaire ", alors que 14% placent en tête l'amélioration des méthodes d'apprentissage et 18% l'allégement des programmes (seulement 5% citent ici les nouvelles technologies). Sans doute parce que les lycéens font massivement confiance à leurs enseignants pour ce qui concerne les contenus de savoir à enseigner, sans doute aussi parce qu'ils reconnaissent très largement leurs compétences en matière disciplinaire, ils ont fait porter leurs demandes essentielles sur l'accompagnement dans leur travail scolaire par les professeurs. Cette préoccupation renvoie aussi (ils sont plus de 36% à le souligner) à des difficultés bien réelles qu'ils éprouvent pour effectuer les travaux demandés, comprendre les consignes, réviser leurs contrôles ou leurs examens, préparer des exposés oraux audibles par toute une classe, faire des fiches de lecture, prendre des notes en cours, etc. L'exemple de la dissertation est souvent cité : le même mot est utilisé dans des disciplines différentes, en des sens parfois variables. L'injonction à " faire une dissertation " est rarement assortie d'indications précises sur les critères qui permettent de savoir si une dissertation est ou n'est pas réussie. 42% des lycéens considèrent que c'est le travail à la maison qui est le plus important pour leur réussite scolaire et, parmi eux, plus des deux tiers se disent insuffisamment armés pour le réaliser correctement. Il est d'ailleurs significatif que dans une académie comme celle de Créteil, le thème le plus choisi par les établissements scolaires soit précisément celui du " travail personnel des élèves ". A Lille, Aix-Marseille, Besançon, l'aide au travail personnel arrive en tête des préoccupations des élèves. L'Académie de Rennes propose comme priorité le dégagement de plages horaires en libre accès pour le soutien des élèves en difficulté. A Dijon, on suggère la mise en place de rendez-vous réguliers entre chaque professeur principal et chaque élève pour faire le point individuellement sur la scolarité et les problèmes rencontrés. A Nancy-Metz, on propose une réflexion sur des systèmes de suivi qui permettraient de faire ressortir plus systématiquement les points forts des élèves et de s'appuyer sur eux pour la construction du projet personnel. A Rouen, on évoque des petits groupes de réflexion et d'appui pour aider chacun à surmonter d'éventuelles difficultés. Les élèves des CAVL parlent de professeurs qui soient de véritables " accompagnateurs de l'apprentissage " et demandent que tous les enseignants d'une même discipline soient disponibles pour aider tous les élèves qui le souhaitent. De son côté, la synthèse nationale effectuée pour les établissements relevant du ministère de l'agriculture fait apparaître que c'est bien l'aide au travail des élèves, par des enseignants ou par des aînés qui est déterminante, tant pour l'insertion dans l'établissement que pour la réussite scolaire. Enfin, les enseignants considèrent que les modules, même s'ils ont été largement détournés de leurs objectifs initiaux, représentaient des occasions précieuses de suivi plus personnel des élèves. Ils souhaitent que la formule soit clarifiée, que soient levées les ambiguïtés de fonctionnement qui en gênent l'efficacité et que des groupes délibérément consacrés au " travail dirigé " permettent d'accompagner véritablement les élèves dans leur travail. principe 16 : L'égalité des élèves dans l'accès aux savoirs suppose que chacun d'entre eux dispose de temps, de lieux et de ressources à l'intérieur de l'établissement pour effectuer son travail personnel dans les meilleures conditions. Le travail personnel en classe, dans un cadre donné, avec des exercices précis est le garant de la justice sociale. C'est pourquoi tout enseignement qui s'inscrit dans une progression et vise l'apprentissage de techniques de travail particulières comporte, outre les exposés, expérimentations, distributions de consignes collectives, des temps de travail dirigé inscrits comme tels à l'emploi du temps de chaque discipline. Le travail dirigé se substitue aux " modules " ; il s'agit de temps exclusivement réservés à des exercices d'entraînement effectués individuellement ou collectivement, sous le contrôle et avec le conseil de l'enseignant. principe 17 : L'égalité des élèves dans l'accès aux savoirs suppose un accompagnement de chacun par une prise en charge différenciée. Or, il existe une inégalité sociale de fait dans ce domaine que l'école se doit de corriger : le développement massif du marché privé du " soutien scolaire " permet en effet, à certains, de disposer de recours systématiques à la sortie de la classe. C'est pourquoi l'école doit organiser elle-même de tels systèmes de manière gratuite et équitable. Il convient donc que chaque élève puisse avoir recours à un autre enseignant que le sien en cas de difficulté particulière. Cette possibilité passe par l'organisation, dans toutes les disciplines, d'heures dénommées " permanences d'aide individualisée ". Des heures sont prévues à cet effet dans l'emploi du temps où des enseignants sont disponibles pour recevoir des élèves qui souhaitent une explication particulière. Le travail en équipe garantit la cohérence des dispositifs d'aide ainsi définis. Enfin, l'entraide entre élèves de même niveau de classe et de niveaux différents est systématiquement encouragée ; elle s'effectue sous la responsabilité des enseignants qui peuvent l'encadrer dans le cadre de leurs obligations de service. principe 18 : L'accompagnement des élèves dans leur scolarité s'effectue toujours par la médiation des tâches scolaires ; il n'est, en aucun cas, un suivi psychologique ou, a fortiori, une occasion de rencontre affinitaire sociale, religieuse ou politique.
6) Les relations entre les disciplines Le thème de l'interdisciplinarité est présent, de manière constante, dans toutes les synthèses académiques et ce fut une préoccupation majeure dans l'ensemble des journées disciplinaires. A un premier niveau, et essentiellement du point de vue des élèves, l'interdisciplinarité est d'abord une question de coordination entre les différents professeurs intervenant dans une même classe : coordination du simple point de vue des échéances dans le travail donné, coordination dans l'organisation des contrôles et des examens blancs, coordination dans l'emploi du vocabulaire utilisé et des outils techniques exportés d'une discipline à une autre. Comme le soulignent, parmi bien d'autres, les lycéens de Guyane, " la coordination des enseignements et la concertation des professeurs sont nécessaires parce que ce sont les élèves qui ont à faire la synthèse de tout ce qui est dit ". Sur un plan plus général et s'agissant d'une interdisciplinarité touchant aux contenus, les élèves sont beaucoup plus en retrait : certains ont eu des difficultés à répondre à la question " Faites-vous des rapprochements entre les savoirs que vous apprenez dans les différentes disciplines ? " (29% de non réponses), beaucoup sont vraiment démunis quand on leur demande de suggérer des moyens pour faciliter ces rapprochements (74% de non réponses). En revanche, les enseignants sont convaincus que les relations entre les disciplines, pour autant qu'elles s'organisent à partir d'un approfondissement de l'identité disciplinaire de chacune d'elles, contribuent à la qualité de la formation : dans l'Académie de Créteil et, plus généralement, dans les lycées professionnels et technologiques, les professeurs souhaitent construire des projets qui associent fortement les enseignements généraux et les enseignements technologiques et professionnels. A Limoges, les enseignants demandent que des possibilités soient offertes de travailler à deux enseignants de disciplines différentes avec une même classe d'élèves. A Caen, Amiens ou Poitiers, les enseignants insistent sur les collaborations à long terme qui permettent aux élèves de mieux percevoir la cohérence de la formation qu'ils reçoivent. principe 19 : La mise en cohérence des enseignements disciplinaires est une nécessité. Elle implique un travail de coordination entre les disciplines à tous les niveaux de l'institution scolaire, depuis le Conseil national des programmes jusqu'aux conseils d'administration et aux conseils de classes dans les établissements. Cette coordination porte sur le vocabulaire utilisé, les méthodes et la nature des exercices et travaux demandés aux élèves ainsi que sur les contenus d'enseignement eux-mêmes. C'est à partir de chaque discipline et afin de permettre aux élèves de mieux percevoir l'identité de chacune d'entre elles et leur complémentarité, que l'harmonisation interdisciplinaire est conçue. principe 20 : Le lycée favorise l'approche interdisciplinaire ou pluridisciplinaire d'objets complexes ainsi que de questions ou problèmes qui figurent au programme de plusieurs disciplines. L'intervention de deux enseignants, de disciplines différentes, avec un même groupe d'élèves peut être organisée dans cette perspective. Cette possibilité offerte aux enseignants est prise en compte dans leur service.
7) Le lycée et son insertion dans le tissu économique, associatif et culturel Les lycéens, comme on l'a souvent souligné, se tournent vers le lycée pour que celui-ci assure des apprentissages délibérément éloignés des programmes scolaires : le secourisme, le bricolage, la cuisine, la psychologie, le jardinage, la puériculture, la conduite automobile, etc. Il faut évidemment comprendre ces demandes en liaison avec l'effritement, voire l'effondrement, des structures traditionnelles de socialisation où ces apprentissages étaient effectués (la famille, le tissu social de proximité, les associations, etc.). Il convient, sans aucun doute, de faire droit à ces demandes sans, pour autant, ni dévoyer la fonction de l'école, ni dévitaliser le tissu associatif. Cela ne peut se faire qu'en installant dans le lycée une structure spécifique qui, tout à la fois, mette à disposition des jeunes les ressources de l'environnement et fasse profiter l'environnement de la participation des lycéens et des personnels du lycée aux activités qu'il organise. C'est ce que propose l'Académie de Reims ou de Clermont-Ferrand qui insistent sur l'ouverture culturelle du lycée dans la perspective d'une plus grande justice sociale. C'est ce que demandent beaucoup de lycéens qui, comme ceux de l'Académie de Corse, regrettent le peu d'importance du foyer socio-éducatif ou les difficultés de " la maison des lycéens ", en soulignant que ces structures ne peuvent fonctionner qu'avec un apport et un investissement de l'extérieur. Sur un autre plan, ce sont évidemment les lycées professionnels qui sont les plus sensibles à l'insertion de l'établissement dans le tissu économique. Les Académies de Lille et de Strasbourg, par exemple, demandent que les stages soient mieux organisés, planifiés et surtout encadrés ; elles insistent sur la définition claire par l'établissement de leurs objectifs, du rôle du tuteur et l'élaboration d'un cahier des charges rigoureux. L'Académie de Nancy-Metz, qui dispose d'une expérience importante dans ce domaine, souligne le rôle vital du partenariat avec les entreprises dans la formation : elles apportent une " concrétisation grandeur nature " des apports théoriques, mais ceci n'est formateur que si cette concrétisation " fait l'objet d'une reprise théorique au lycée ". Enfin, il faut noter que, dans certains lycées d'enseignement général et technologique, la demande en direction des entreprises est forte : quelques enseignants et établissements souhaitent que les élèves puissent découvrir les situations de travail ; ils y voient le moyen de leur permettre d'accéder aux exigences sociales qui favoriseront ensuite leur orientation et leur insertion professionnelles. Sans mettre en doute le bien-fondé de cette demande, d'autres professeurs soulignent néanmoins son caractère irréaliste (tant du côté de l'emploi du temps des élèves que de la disponibilité des entreprises) et même dangereux : ils craignent une dilution des missions du lycée, un éparpillement du travail des élèves et insistent pour que l'on ne crée pas d'illusions dans ce domaine. principe 21 : Le lycée est un lieu d'enseignement qui s'insère dans un environnement économique, associatif et culturel auquel il n'a pas à être assujetti. Cependant, l'insertion du lycée dans cet environnement peut être un facteur de richesse pour la formation de l'élève si les offres en sont clairement identifiées, contrôlées et sélectionnées. C'est le rôle d'un " lieu ressources " qui se substitue à d'autres structures antérieures (foyer socio-éducatif, maison des lycéens). Il est animé par des membres de la communauté éducative élargie, sous le contrôle du conseil d'administration, à des partenaires extérieurs : associations locales, mouvements pédagogiques et d'éducation populaire, entreprises industrielles et artisanales, collectivités territoriales, etc. Garant de la justice sociale, le lieu-ressources permet à tous d'avoir accès aux richesses de l'environnement immédiat ou plus lointain du lycée ; il est ainsi un facteur de réduction des inégalités culturelles. principe 22 : Le lycée et les entreprises industrielles et de services, privées et publiques, trouvent dans leur proximité une richesse mutuelle. Auprès des entreprises, le lycée se tient informé des innovations technologiques et de l'évolution des métiers ; de plus, il peut être, pour les entreprises, un centre de ressources dans les domaines de la formation et de l'innovation technologique. Seul le lycée professionnel met en place de véritables stages en entreprise ; l'organisation de ces stages fait l'objet de conventions entre l'établissement et les entreprises accueillant les élèves ; ces conventions précisent les objectifs poursuivis par le stage, les tâches demandées à l'élève, les modalités de la collaboration entre l'enseignant et le tuteur, les procédures d'évaluation des acquis. Les lycées technologiques et d'enseignement général peuvent organiser, dans le cadre de la préparation à l'orientation, de courtes séquences de " découverte de l'entreprise " ; celles-ci sont réalisées sous le contrôle et avec la participation des enseignants.
8) La fonction et l'évolution des lycées professionnels Les élèves de lycée professionnel et leurs enseignants ont répondu de façon massive à la consultation, en plus grand nombre et de façon plus collective que leurs camarades des lycées généraux et technologiques. Ils avaient pourtant, dans un premier temps, considéré les questions comme mal adaptées à leur type de formation. Mais ils ont vu finalement dans la consultation un moyen d'être reconnus égaux en dignité et en droits aux autres lycéens. Car, la consultation témoigne massivement de cette revendication. L'Académie de Reims rappelle que " certaines réponses des lycéens de lycée professionnel (section BEP) sont de véritables appels au secours : ils s'estiment marginalisés, sans espoir d'insertion professionnelle, sans aides financières. Ils veulent être des lycéens à part entière et refusent d'être confinés dans des structures de relégation. " " Revaloriser l'image et faire connaître le lycée professionnel auprès des employeurs et des parents d'élèves " sont une première nécessité, selon l'Académie de Bordeaux. Il ne doit plus être le lieu de l'échec scolaire, dit-on, de toutes parts ; pour cela, il doit être ouvert à tous les publics, jeunes et adultes en quête d'insertion professionnelle, affirme-t-on à Nancy-Metz. Et les auteurs du rapport académique ajoutent : " L'enseignement public professionnel a une existence reconnue, il doit continuer à jouer son rôle de premier formateur dans l'insertion professionnelle. Il doit être en mesure d'apporter des savoirs professionnels et technologiques, une culture générale et des valeurs sociales ". L'association, au sein du lycée professionnel, entre formation initiale et formation continue est évoquée à Bordeaux, à Dijon, à Rennes. Beaucoup d'académies et d'établissements précisent, à propos du lycée professionnel, que la transmission d'une culture commune y est un objectif prioritaire pour répondre à la demande d'égalité sociale et préparer une société où le dialogue social soit possible et fécond. Mais cette culture doit être transmise à travers des parcours particuliers, " en articulant fortement enseignement général et enseignement professionnel " (Dijon), " à travers un enseignement plus concret " (Strasbourg), avec davantage " d'interdisciplinarité, appréciée ici comme un véritable besoin, une nécessité pour éviter la relégation des savoirs professionnels dans de simples habiletés techniques " (Rouen). La relation de l'enseignement professionnel avec l'environnement économique est évoquée partout comme essentielle. L'entreprise participe pleinement, dit-on, au processus de formation par l'intermédiaire des stages, les élèves y découvrant le monde des adultes et ses exigences ainsi que la complexité sociale de l'univers de la production. principe 23 : Le lycée professionnel est, pour tous , le lieu de préparation à l'insertion et à l'activité professionnelles dans le respect des principes énoncés dans les parties 1 à 7. Il articule formation initiale et formation continue. C'est un conservatoire des métiers de son bassin d'emploi et de leur culture professionnelle. C'est aussi un espace de rencontre et d'échange entre des hommes et des femmes porteurs de compétences, d'expériences et de cultures professionnelles diverses et variées. Il permet aux élèves d'acquérir la culture commune à tous les lycéens et les compétences utiles à l'exercice du métier qu'ils ont choisi. Leur orientation et leur professionnalisation se fait de manière progressive. Il permet aux adultes d'assurer le maintien, l'actualisation et l'accès à de nouvelles compétences professionnelles par l'intégration de toutes les formations permanentes gérées par l'Éducation nationale. Il accueille donc des publics ayant le statut scolaire, d'apprenti ou de la formation continue et cela à tous les niveaux d'insertion professionnelle. Le service public d'éducation y assume ainsi sa mission de " formation tout au long de la vie ". Les exigences d'enseignement de la culture commune rendent le lycée professionnel indissociable des lycées d'enseignement général ou technologiques. C'est pourquoi les lycées professionnels ont progressivement à s'intégrer dans des cités scolaires qui proposent à la fois des cursus généraux, technologiques et professionnels. principe 24 : Le lycée professionnel prépare à des formations diplômantes (certificat d'aptitude professionnelle - CAP -, brevet d'études professionnelles - BEP -, baccalauréat professionnel), ainsi qu'à des spécialisations complémentaires à l'issue de ces diplômes. Le CAP concerne des formations d'insertion professionnelle et se prépare en deux années directement après la troisième. Le BEP se prépare en un an après la classe de seconde professionnelle. Le baccalauréat professionnel se prépare en deux ans après le BEP. Sur le plan de la nature des diplômes préparés, le lycée professionnel construit son offre de formation en cohérence avec son environnement socio-économique et avec le schéma des formations professionnelles (académiques et régionales). Cette offre de formation est le résultat d'une réflexion et d'une concertation dans l'établissement ainsi qu'entre l'établissement et ses partenaires extérieurs. Elle prend en compte la demande sociale, la réalité de l'emploi et les études prospectives qui s'y rapportent.
9) Les modalités d'évaluation L'attachement au baccalauréat comme examen final, anonyme et national est une constante des résultats de la consultation. Plus du tiers des enseignants cependant (38%) souhaite l'introduction d'un contrôle en cours de formation, mais à condition qu'il donne les mêmes garanties d'anonymat et d'équité que l'examen final. Plus de 20% souhaitent que l'évaluation finale prenne en compte des qualités que l'examen ne permet pas d'évaluer (capacité documentaire, méthode expérimentale, créativité, initiative, participation à la vie du lycée, etc.), et cela par un meilleur usage du livret scolaire, comme le suggère le rapport de l'Académie de Montpellier, ou par l'introduction d'un nouveau type d'épreuves sur documents comme l'évoquent, par exemple, des enseignants de Versailles. Dans certaines académies, on insiste sur la prise en compte des progrès effectués tout au long du parcours du lycée (Clermont-Ferrand), dans d'autres on souhaite celle du travail personnel effectué pendant l'année (Bordeaux), dans beaucoup on insiste sur la nécessité d'introduire des épreuves orales, en langues vivantes et, plus généralement, dans toutes les disciplines. Il faut noter que les enseignants des lycées professionnels qui pratiquent déjà le contrôle continu dans les disciplines technologiques, en " vie sociale et professionnelle " et " arts appliqués " en sont satisfaits sur le plan du principe mais en dénoncent, comme les enseignants des lycées agricoles de l'Académie de Toulouse, les effets pervers : bureaucratisation pour compenser l'aléatoire et la méfiance, inflation des référentiels, temps perdu souvent considérable, débordement de l'évaluation sur les apprentissages, etc. Ceci, en revanche, n'est pas vrai pour les enseignants d'éducation physique et sportive qui paraissent avoir trouvé un équilibre. De leur côté, les élèves acceptent très bien le principe du baccalauréat même s'ils sont très nombreux (51% en général, 68% chez les filles) à regretter le caractère " couperet " de l'examen et à dénoncer la " pression " et le stress qu'il entraîne. Plus de la moitié des élèves demande l'introduction de " contrôle continu ", sans toujours distinguer celui-ci du " contrôle en cours de formation ". En réalité, il s'agit, pour la plupart, d'une demande d'étalement d'épreuves dont ils souhaitent qu'elles conservent un caractère anonyme ou qu'elles soient passées avec d'autres professeurs que ceux qui enseignent dans leur classe. Mais 58% des élèves demandent aussi un allégement du baccalauréat, ce qui semble contradictoire avec l'introduction du contrôle en cours de formation. Les enseignants, toutes disciplines confondues, cherchent, de leur côté, les moyens les plus efficaces pour éviter le bachotage qu'ils considèrent comme " une plaie du système " (Nantes). En mathématiques, beaucoup considèrent que le baccalauréat traditionnel peut, soit s'effondrer face à l'introduction de calculatrices très performantes, soit maintenir la discipline dans un état qui deviendra vite obsolète. La proposition d'un travail personnel interdisciplinaire sous forme de dossier soutenu devant un jury revient souvent : " Un travail sur un projet devrait être demandé aux élèves, avec une soutenance en fin d'année "(Rennes). " Il convient de mettre en place un contrôle continu sous forme d'un mémoire soutenu en fin d'année " (Guyane) . Cette suggestion s'inscrit dans une demande générale : l'introduction de travaux de " fabrication " permettant un investissement personnel à moyen terme, une implication forte de l'élève, l'apprentissage de la gestion du temps et des contraintes inhérentes à tout projet que l'on doit mener à terme. Les élèves de terminale " histoire de l'art " disent, à cet égard, tout l'intérêt qu'ils trouvent à l'élaboration et à la présentation du dossier thématique qui leur est déjà demandé. principe 25 : La méthode de certification assurant le plus de justice et d'équité est un examen anonyme national, le baccalauréat. L'anonymat, garantie d'équité, n'est nullement contradictoire avec la prise en compte du livret scolaire, l'examen de travaux écrits ou de productions d'élèves ainsi qu'avec des interrogations orales effectuées par d'autres enseignants que ceux de l'élève. Le baccalauréat est le premier grade universitaire. principe 26 : L'évaluation de l'élève, y compris au baccalauréat, prend en compte l'ensemble des qualités et compétences dont il fait preuve dans son travail scolaire : rigueur, soin, attention, sens de l'effort, gestion efficace du temps, créativité et initiative, participation à la vie de l'établissement. Le livret scolaire est refondu pour permettre la prise en compte de ces données. Par ailleurs, les méthodes d'évaluation s'attachent à intégrer et valoriser la pratique de la méthode expérimentale pour les disciplines scientifiques, ainsi que de l'expression orale, et cela dans toutes les disciplines, pour toutes les filières et séries. L'évolution progressive de l'évaluation vers des formes de contrôle en cours de formation, dans les disciplines où cette évolution est souhaitable et possible, se fait à partir des disciplines où celle-ci est déjà pratiquée comme l'Éducation physique et sportive et dans l'enseignement professionnel. Elle s'effectue, d'ores et déjà, à travers les disciplines nouvelles introduites dans les lycées que sont l'expression artistique et l'éducation civique, juridique et politique. principe 27 : Il est créé une épreuve sur dossier personnel interdisciplinaire, regroupant au moins trois approches d'un même thème à travers trois champs disciplinaires différents, dont obligatoirement le français. Ce dossier peut porter sur une question d'ordre artistique ou culturel, sur un problème de société ou lié aux évolutions technologiques et scientifiques ; il peut permettre également l'approche d'un métier ou d'un secteur professionnel. Cette épreuve se passe en fin de première et constitue une épreuve anticipée du baccalauréat. Elle est dotée d'un coefficient identique quelles que soient la filière et la série de l'élève. L'épreuve comprend la réalisation d'un dossier d'une vingtaine de pages, présenté sous forme dactylographiée, ainsi que la soutenance orale de celui-ci devant un jury composé d'au moins deux membres : cette soutenance et sa préparation doivent permettre un apprentissage systématique de la prise de parole en public et du débat argumenté. Tous les enseignants de la classe de première sont impliqués dans ce travail et participent au suivi individualisé de sa préparation sous la responsabilité du professeur de français qui en assure la coordination. Celle-ci est prise en compte dans ses obligations de service. principe 28 : Il convient de rechercher, par ailleurs, des modalités d'allégement du baccalauréat actuel pour donner toute sa place à cette nouvelle épreuve et permettre une préparation de l'examen faisant appel, systématiquement, à un travail personnel approfondi. Cela suppose que tout soit mis en œuvre, dans la conception des programmes et l'enseignement de toutes les disciplines, pour éviter toute forme de bachotage stérile.
10) Les élèves dans le lycée Aujourd'hui, les élèves " passent " au lycée ; or, ils demandent massivement de " vivre " au lycée. Partout, comme dans l'Académie de Lyon, ils souhaitent que le lycée soit " un lieu où ils aient plaisir à se rendre ". Partout, comme dans l'Académie de la Martinique, ils demandent plus de " convivialité " et une attention plus grande à tout ce qui favorise l'apprentissage des règles de vie collective. En réalité, ils ne veulent pas y passer moins de temps ou y travailler moins, mais y avoir moins de cours et des emplois du temps plus équilibrés... pour mieux profiter des enseignements qui leur sont dispensés. Ils veulent disposer de plus de temps pour gérer leur travail personnel, se documenter, travailler en petits groupes, mener à bien des projets, approfondir des questions ou des disciplines qu'ils apprécient particulièrement, exercer des responsabilités, etc. Ils veulent trouver dans le lycée des lieux, des espaces, des aides pour pouvoir effectuer efficacement leur travail personnel. Ils veulent aussi ne pas crouler sous les " devoirs à la maison ", jugés excessifs par plus de 69% d'entre eux dans l'Académie de Versailles. Le poids de ces devoirs leur interdit, disent-ils, d'effectuer, en dehors du lycée, des apprentissages qui n'y ont pas leur place. Confirmant ainsi toutes les enquêtes sociologiques dont nous disposons, les lycéens affirment qu'ils n'ont plus le temps de lire, qu'ils doivent sacrifier la plupart des activités associatives auxquelles ils aimeraient se consacrer ; ils se disent " abrutis par le travail scolaire " et fatigués le soir au point de perdre leur temps devant des " feuilletons télévisés débiles ". Enfin, les lycéens, par l'intermédiaire des délégués des CAVL, souhaitent une meilleure organisation de la participation des délégués à la vie de l'établissement. Ils regrettent que l'élection de ceux-ci ne soit pas toujours prise au sérieux, préparée et utilisée dans la perspective d'une véritable formation à la démocratie. principe 29 : L'élève est soumis aux obligations scolaires en termes d'assiduité, de respect des horaires et de travail rendu. Celles-ci ne doivent pas excéder 35 heures en moyenne par semaine. principe 30 : Symétriquement, l'élève doit bénéficier d'une durée hebdomadaire possible de présence au lycée de 35 heures fixées à l'emploi du temps. Dans le cadre de cette présence, le lycéen peut trouver toutes les aides nécessaires à la réalisation du travail exigé de lui au lycée comme à la maison. Cela constitue, pour chaque élève, un droit fondamental et contribue à la justice sociale en favorisant l'accès de tous à de meilleures conditions de travail. Le professeur principal veille à la compatibilité et la cohérence des diverses tâches imposées aux élèves, dans les limites du cadre horaire défini ci-dessus. principe 31 : Au delà de ces 35 heures, il est demandé aux élèves d'effectuer des lectures complémentaires d'ouvrages et de revues dans l'ensemble des disciplines d'enseignement. La lecture est considérée comme une priorité de la formation au lycée. Elle fait l'objet de conseils systématiques et la culture ainsi acquise est prise en compte dans l'ensemble des épreuves d'évaluation. principe 32 : Le temps de présence dans l'établissement comporte, obligatoirement, de 26 heures de cours (sans option) à 28 heures de cours (avec option) en enseignement général, de 28 heures de cours (sans option) à 30 heures de cours (avec option) en enseignement technologique et professionnel, compte tenu des heures en atelier qui nécessitent moins de travail personnel de l'élève à l'extérieur. Les heures de cours comprennent nécessairement des heures de travail dirigé qui doivent être désignées en tant que telles et constituer au moins 20% d'entre elles. principe 33 : La durée hebdomadaire de présence possible, mais non obligatoire, au lycée en dehors des cours comprend, selon les cas, 5 à 9 heures offertes aux élèves et consacrées aux activités suivantes : - la réalisation d'exercices et de devoirs avec l'aide d'un enseignant, - la préparation du dossier interdisciplinaire constitutif de l'évaluation finale en fin de première, - la réalisation de projets, - le recours à la permanence d'aide personnalisée, - le travail autonome au Centre de Documentation et d'Information, - le travail personnel en salle d'informatique et en ateliers de pratique informatique, - le travail de groupe, - des sorties à caractère culturel, en lien avec l'enseignement. principe 34 : L'élève est invité à participer aux activités socioculturelles et sportives proposées directement par l'établissement ou par l'intermédiaire du lieu-ressource. Cette participation est considérée comme un apprentissage à la gestion du temps de loisir. L'élève peut, par ailleurs, exercer des responsabilités liées à la gestion de l'établissement et à la mise en œuvre des activités inscrites au projet de ce dernier. Elles sont imputées sur le temps libre et constituent un apprentissage à la participation bénévole à la vie de la cité.
11) Les enseignants dans le lycée Preuve, sans aucun doute, de la confiance qu'ils leur témoignent, les lycéens attendent tout de leurs enseignants ; ils les savent compétents, ils les veulent plus présents, plus attentifs aux difficultés rencontrées dans leur travail personnel, plus disponibles à leur côté dans l'établissement. A Grenoble, les auteurs de la synthèse académique résument ainsi les attentes des lycéens : " plus de pédagogie active, plus de débats, plus d'oral, plus d'informatique, plus de pédagogie différenciée, plus de soutien, des enseignants plus à l'écoute ". Mais les préoccupations des élèves rejoignent, en réalité, bien des analyses des enseignants eux-mêmes. La plupart d'entre eux conviennent que les activités traditionnelles d'enseignement ont elles-mêmes évolué. L'ensemble des académies disent le temps nécessaire " pour la concertation, les actions éducatives, le soutien disciplinaire et pédagogique, le travail interdisciplinaire " (Rennes). " Mieux dépister les élèves en difficulté ", " mettre en pratique une évaluation plus formative et une éducation plus différenciée, travailler en équipe " (Clermont-Ferrand) constituent aussi des aspects essentiels du métier et bien des enseignants souhaitent que ce soient là des activités reconnues, qui ne soient pas laissées à l'initiative de quelques bénévoles qui se découragent vite quand ils ne sont pas reconnus par l'institution. De très nombreux rapports académiques le soulignent : beaucoup de professeurs souhaitent que ces différentes activités de soutien, d'animation, de coordination, de formation et de certification soient intégrées dans leur service et que cela se fasse de manière plus juste : nombreux sont ceux, par exemple, qui ne comprennent pas pourquoi la responsabilité de professeur principal fait l'objet d'une rémunération double pour les agrégés par rapport aux capésiens. En réalité, nous devons ici tirer les conséquences de ce que nous avons précédemment constaté : il existe un véritable mouvement de fond dans l'institution scolaire française qui invite à mieux définir les missions du professeur d'aujourd'hui. Il ne s'agit pas pour lui d'abandonner la tâche de transmission des connaissances au profit d'un travail d'animation ou de simple compagnonnage ; les lycéens, d'ailleurs, ne le demandent pas, bien trop inquiets de leur avenir pour souhaiter que l'école abandonne ses ambitions d'instruction et de formation. Il s'agit, tout au contraire, de permettre une transmission plus efficace, plus accordée aux situations réelles que les jeunes ont à affronter, plus délibérément centrée sur l'appropriation active des connaissances et la construction de l'autonomie. Il s'agit de la survie même de notre culture, trop souvent réduite à des " utilités scolaires " dont les élèves se débarrassent sans conviction dans une " pédagogie bancaire " où triomphe le seul principe d'économie : " Le plus d'effets utiles pour le moins d'efforts inutiles ". Le risque existe aujourd'hui, non que le lycée explose, mais qu'il se dévitalise et bascule pour longtemps dans un supermarché scolaire qui ne sera véritablement habité par personne. principe 35 : Le service des enseignants (certifiés et professeurs des lycées professionnels) comprend les activités suivantes : - 15 heures d'enseignement par semaine pour 33 semaines, soit 495 heures par an, - 4 heures d'activité pédagogique dans l'établissement pour 33 semaines, soit 132 heures par an, - la participation aux examens. A titre transitoire et avant la redéfinition de la fonction des professeurs agrégés, en liaison avec leur activité dans l'enseignement supérieur, ceux-ci ont un service qui comprend 14 heures d'enseignement par semaine et 3 heures de présence et d'activités pédagogiques dans l'établissement. Cette proposition, cohérente techniquement avec la proposition de l'emploi du temps des élèves, doit permettre d'assurer le plein service de tous les enseignants en poste. Les indemnités correspondantes aux activités intégrées dans la nouvelle définition du service des enseignants sont supprimées. L'indemnité de suivi et d'orientation (ISO) est maintenue. principe 36 : Les 15 heures d'enseignement correspondent aux heures de présence devant des groupes d'élèves, y compris les travaux dirigés ; elles sont inscrites à l'emploi du temps et impliquent les tâches suivantes : d'une part, la préparation, la conception des cours, les corrections, l'évaluation des élèves, et d'autre part, en raison du maintien de l'indemnité de suivi et d'orientation (ISO), la participation aux conseils de classe et les rencontres avec les familles. La fonction de professeur principal fait l'objet d'une rémunération spécifique indépendante du grade des professeurs concernés. principe 37 : Les 4 heures de présence dans l'établissement (3 heures pour les professeurs agrégés) sont également inscrites à l'emploi du temps de l'enseignant. Elles sont constituées d'activités pédagogiques choisies par chaque enseignant, en tenant compte des contraintes de l'organisation des classes des spécificités disciplinaires, dans la liste suivante : - heure(s) dévolue(s) à la " permanence d'aide personnalisée ", - heure(s) d'assistance technique (responsabilité de laboratoires, de cabinets, de gestion de département technologique, etc.), - heure(s) d'intervention " en doublon " dans le cadre du cours d'un enseignant d'une autre discipline (en particulier, pour les enseignements d'éducation civique, juridique et politique), - heure(s) d'aide au travail des élèves dans le cadre du Centre de documentation et d'information ou des salles d'informatique, - heure(s) de préparation, suivi et évaluation de stages, - heure(s) de préparation,, suivi et évaluation des interventions extérieures (en particulier dans le cadre des ateliers d'expression artistique), - heure(s) d'encadrement d'activités pédagogiques prévues au projet d'établissement, - une heure hebdomadaire, au plus, réservée à des concertations à caractère exceptionnel et qui n'entrent pas dans le cadre habituel de la préparation ou de l'évaluation des enseignements. Ces heures hebdomadaires peuvent être regroupées, si besoin est, par quinzaine, mois, trimestre ou année. principe 38 : Chaque enseignant doit bénéficier de 35 heures de formation continue dans l'année, hors du temps de travail. La programmation nationale et académique de l'offre de formation est établie au plus tard début juin de la précédente année scolaire afin que le plan de formation de l'établissement et l'organisation des services annuels permettent l'inscription de la formation continue dans l'emploi du temps de l'établissement. principe 39 : La participation aux examens comporte la conception des sujets, l'organisation, la surveillance, la correction et la participation aux jurys. principe 40 : Cette organisation des services des enseignants implique la construction préalable d'un projet d'établissement qui fasse valoir l'ensemble des besoins en enseignement et en encadrement. Ce projet sert de base à la négociation avec la tutelle sur la dotation globalisée horaire. Par ailleurs, chaque enseignant dispose d'une fiche annuelle de service qui comprend l'ensemble de ses activités. Pour que ce système fonctionne de manière satisfaisante, il convient que la formation continue des salariés et la formation en apprentissage, quand elles sont assurées par l'établissement à titre de prestations de services extérieures, soient intégrées à l'emploi du temps des enseignants et remboursées par l'établissement à la tutelle qui mutualise les coûts.
12) L'organisation du lycée Dans toutes les académies, quand les lycéens font une proposition pour améliorer la réussite scolaire au lycée, ils se tournent d'abord vers l'établissement lui-même, bien avant le Ministère, l'état ou le monde économique. Il faut d'ailleurs noter que la demande et les attentes à l'égard des établissements augmentent significativement dans les lycées technologiques et professionnels par rapport aux lycées d'enseignement général : ainsi, à Grenoble, les propositions concernant l'amélioration de la réussite portent sur le fonctionnement de l'établissement pour 35% dans les établissements d'enseignement général, pour 43% dans les établissements technologiques, pour 50% dans les lycées professionnels. Au regard des rapports académiques, c'est aussi l'organisation de l'établissement qui favorise la réussite des élèves, à la condition que les adultes y soient présents avec des fonctions bien identifiées, " professeurs repères " (Martinique), " professeurs tuteurs " (Nantes) par exemple. La concertation " avec pour corollaire son organisation dans l'emploi du temps des professeurs et des élèves " (Strasbourg) apparaît comme une nécessité. Par ailleurs, faire du lycée un lieu d'apprentissage des règles de la vie collective et du débat démocratique est une préoccupation de tous les rapports des Comités académiques de la vie lycéenne. A cet égard, l'organisation, par notre Comité, du travail des CAVL et de l'élaboration progressive de leurs propositions est apparue comme répondant à un véritable besoin de formation dont il convient sans doute de tirer les leçons. Cela est parfaitement en convergence, d'ailleurs, avec toutes les analyses académiques qui font ressortir, comme en Guyane, que cette formation n'est possible qu' " à l'intérieur de cadres spatiaux et temporels aménagés ". Les propos des lycéens concernant le Centre de documentation et d'information (CDI) sont souvent pessimistes : on n'y apprend pas vraiment, disent-ils, à faire une recherche, les salles sont fermées au moment où l'on pourrait y accéder et leur capacité d'accueil est jugée insuffisante... Il faut voir à travers ces remarques l'intérêt pour un CDI qui serait effectivement " le centre de la vie du lycée ", avec des salles périphériques pour le travail en groupe, comme le proposent les lycéens de La Réunion. Selon le rapport de l'Académie d'Orléans-Tours, les lycéens veulent également pouvoir accéder en permanence, et même pendant les vacances, aux équipements informatiques. En fait, il apparaît que l'égalité des chances passe certainement par la mise à disposition pour tous de ces équipements qui offrent à chacun les mêmes outils et les mêmes informations. Est-il alors possible de scinder, comme aujourd'hui, le travail à la maison et le travail au lycée ? Est-il encore possible de créer de tels équipements pour ne les ouvrir que pendant les heures de cours, cinq jours par semaine, moins de 200 jours par an ? Lycée, lieu de vie, lieu de travail, lieu de rencontre... La meilleure organisation du monde, les locaux les plus beaux et les mieux agencés ne servent à rien si la constitution des classes empêche le dialogue, la prise en compte de la diversité. Tous s'accordent à voir dans les classes surchargées un obstacle au travail, à la vie sociale et à la rencontre avec l'autre. Parallèlement apparaît partout la nécessité de groupes à géométrie variable en fonction des tâches et des exercices proposés. Dans cet esprit, l'alternative classe entière/classe dédoublée est évidemment dépassée. principe 41 : Pour assumer l'ensemble des tâches qui découlent des principes énumérés précédemment, l'établissement est organisé sur un mode fonctionnel plutôt que hiérarchique. Les enseignants exerçant, dans le cadre de leurs obligations de service, des responsabilités pédagogiques ou des tâches de coordination constituent, avec le proviseur et l'équipe de direction, un conseil pédagogique de l'établissement. Le chef d'établissement réunit, sur des questions particulières et en fonction des besoins, les membres concernés de ce conseil. Par ailleurs, le proviseur est aidé dans sa tâche par deux à trois enseignants, qui exercent temporairement auprès de lui des fonctions d'assistant de direction. Le service de ces derniers fait l'objet d'aménagements spécifiques. principe 42 : A côté du conseil d'administration, qui constitue l'instance décisionnelle du lycée, il est créé un conseil de la vie lycéenne : ce dernier est présidé par le chef d'établissement ; il est constitué, pour une moitié, de représentants des personnels de l'établissement (dont obligatoirement les conseillers principaux d'éducation) et, pour l'autre moitié, de représentants des élèves. Ce conseil propose au conseil d'administration une organisation et des activités qui permettent à l'établissement d'exercer sa mission, il impulse toutes les activités qui favorisent l'apprentissage de la démocratie et de la citoyenneté; il gère le lieu-ressources du lycée selon les orientations décidées par le conseil d'administration. principe 43 : Le travail en équipe des enseignants est organisé dans chaque établissement. Il est la meilleure garantie de l'efficacité pédagogique et du fonctionnement démocratique de l'établissement. Autour de professeurs responsables reconnus par l'institution, les enseignants sont regroupés en conseils de classe, en conseils d'enseignement par discipline ou par département, en conseils de niveau ou en groupes de projet. principe 44 : Afin de faciliter le travail des élèves dans l'établissement et de permettre au lycée de jouer pleinement son rôle de service public et de démocratisation dans l'accès aux savoirs, le Centre de documentation et d'information, les salles d'informatique, le lieu-ressources, les salles de travail personnel et de groupe sont ouverts le plus largement possible pendant toutes les journées scolaires, ainsi que le mercredi et le samedi toute la journée et pendant les vacances. Ces lieux sont placés sous la responsabilité des personnels compétents assistés d'emplois-jeunes. Des enseignants peuvent participer à leur encadrement dans le cadre de leurs obligations de service. principe 45 : La taille des classes et les problèmes qu'elle pose (dédoublements, travaux pratiques, effectifs des cours de langue, des ateliers, des options, etc.) renvoient à une politique nationale d'attribution des moyens affectés au lycée. S'il est évidemment souhaitable que ceux-ci soient augmentés lorsque la Nation le juge possible et prioritaire, il convient également qu'ils soient affectés selon des critères pédagogiques pertinents. La question des effectifs doit donc toujours être rapportée à la nature des activités pédagogiques effectuées (cours ou conférence, travail dirigé, expression orale, démarche expérimentale, etc.). L'organisation proposée du service enseignant et l'utilisation des possibilités offertes dans le cadre de l'autonomie des établissements permettent, en appliquant les principes précédents, des ajustements efficaces.
Conclusions Il n'était pas dans les objectifs de la consultation de réfléchir de manière systématique et détaillée aux conditions de réalisation des principes que nous venons de formuler. Néanmoins, il nous est apparu essentiel d'en indiquer ici quelques unes, en raison de l'importance qu'elles ont prises dans les rapports académiques et dans les débats autour de nos travaux. principe 46 : La mise en place du nouveau lycée nécessite une formation systématique des personnels, une adaptation des locaux et une refonte de la carte scolaire. principe 47 : La formation des personnels implique un pilotage national et un maillage des académies en vue de démultiplier les formations et de favoriser la collaboration entre les institutions de l'Éducation nationale. Elle concerne tous les acteurs du lycée. Les équipes de direction, au sens large du terme, sont toutes formées à la gestion souple du temps, au pilotage participatif, à l'élaboration, à la mise en œuvre et à l'évaluation de véritables projets d'établissements. Les équipes d'enseignants sont accompagnées par des formateurs afin de favoriser la mise en place de la nouvelle organisation du lycée et des pratiques pédagogiques qu'elle suppose. Les formations disciplinaires s'inspirent de la nouvelle conception des objectifs du lycée qui distingue fortement la notion de programme de celle de programmation. principe 48 : Pour que le lycée devienne un lieu de vie habité par les élèves et les personnels, le ministère de l'Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie construit, à l'image des guides d'équipement conçus pour les enseignements spécialisés, un guide d'aménagement des locaux et un guide d'équipement qui serviront de référents aux rectorats et aux conseils régionaux. Le ministère propose à chaque conseil régional une charte d'aménagement des lycées afin que les élèves et les personnels de tous les établissements puissent rapidement bénéficier, d'une façon égale, des structures nécessaires à la mise en œuvre de l'ensemble des principes décrits dans le présent document. principe 49 : La carte scolaire des formations dans les lycées ne peut, en aucun cas, sauf à laisser se développer des phénomènes venant contredire tous les principes précédents, être livrée aux seules lois du marché. Cette carte scolaire relève d'une politique générale d'aménagement du territoire et de justice sociale. Elle impose que l'offre de formation, selon les filières, les séries et les options, soit régulée par des instances nationales et académiques selon des principes démocratiquement débattus.
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Qu'il nous soit ainsi permis de terminer par là où nous avons commencé : le lycée est affaire de société ; les principes qui régissent son organisation renvoient à une définition collective du " bien commun ". Or, nous savons parfaitement, depuis Aristote, que, dans les choses humaines, nous ne pouvons espérer atteindre des vérités à caractère scientifique... et c'est fort heureux, n'en déplaise aux " utopismes " de toutes sortes, selon l'expression que le philosophe Hans Jonas utilise pour nommer ces systèmes clos, figés et répétitifs comme des horloges, où " le meilleur des mondes " est toujours le pire. Dans les choses publiques les discours doivent demeurer polémiques car il y a place pour le conflit... et reconnaître cela n'est pas, pour autant, se déclarer la guerre. Nous avons énoncé un certain nombre de principes qui renvoient, pour nous, à un triple pari : - restaurer la justice sociale... sans nivellement ou exclusion, - augmenter la cohérence du système... sans technocratie inutile et en donnant aux acteurs de terrain les plus grandes responsabilités possibles, - généraliser ce qui s'est déjà fait, ce qui marche déjà ici ou là et que nous n'avons pas inventé... sans pour autant, banaliser l'innovation ni décourager les innovateurs. Ce triple pari est, en réalité, ne nous y trompons pas, l'expression d'une volonté politique qui nous a animés tout au long de notre démarche, comme elle anime, nous en sommes convaincus, le ministre de l'Éducation nationale et le gouvernement tout entier : la démocratisation de l'accès au savoir et, à travers cet accès, l'intégration de la jeunesse dans une France républicaine, lucide et fraternelle. Au moment où se développe, à côté de l'école et parfois en son sein, un gigantesque marché qui exploite honteusement la crainte de l'échec scolaire et l'inquiétude devant les incertitudes de l'avenir, il revient au service public d'éducation de relever le défi : saura-t-il accompagner tous les jeunes dans une réussite scolaire, professionnelle et personnelle qui leur rende confiance dans les valeurs incarnées par l'école ? Ou bien, nos hésitations, nos inconséquences, nos querelles internes les laisseront-ils désinvestir l'école et se tourner vers ceux qui leur garantissent d'autres formes de satisfaction, plus immédiates, plus faciles, mais aussi plus dangereuses et parfois contradictoires avec les référents fondamentaux de la République ? Nous ne savons si nous parviendrons à relever ce défi, mais c'est sur lui que nous vous invitons à engager maintenant le débat, en gardant toujours à l'esprit cette formule du philosophe Vico : " La vertu de l'intelligence consiste à inventer, comme celle de la raison consiste à accomplir " . Télécharger ce texte : rapport_meirieu.rtf
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