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Formation : initiale ou continuée ?

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SOMMAIRE :

Quelques considérations 
Innover ou disparaître
Qu’est-ce qu’une  plate-forme de mobilisation ?
Ce dispositif intéresse désormais au premier chef les personnels de la formation initiale. Pourquoi ?
Le parallèle (…) est-il gratuit ?
La fiche Evaluation de l’organisme
Quel sens donner à l’apprentissage d’un " savoir être " et savoir-faire ? D’où arrivent ces jeunes et pourquoi intègrent-ils ces dispositifs de formation continue ?
Les associations militantes 
Les spécialistes du champ de l’éducation
Pour un projet ? Mais quel projet ?
Des projets : pourquoi faire ?
Rôle des " plates-formes de mobilisation " ?
Une fin.

Notes
Annexe 1 :  la convention constitutive d’un GRETA
Annexe 2 :  : extraits du rapport Durand sur la gestion des personnels enseignants du 2nd degré
Annexe 3 : La Charte du " Manifeste pour une école créatrice d’humanité "
Annexe 4 : Lettre ouverte au nouveau ministre de l'Education par Gabriel Cohn Bendit
Annexe 5 :  La destruction de l’école élémentaire et ses penseurs, LilianeLurçat.

 

Formation : initiale ou continuée ? (1)

 

Quelques considérations :

Les réformes provoquées par les instances dirigeantes du M.E.N (Ministère de l’Education Nationale) et mises en évidence par C. Allègre de 1997 à 2000 prennent en réalité leur source près de 40 ans en amont.

La logique rénovatrice contemporaine - dite aussi pédagogiste à cause de l’influence prédominante des sciences de l’éducation : création d’UFR en 1967, des IUFM en 1990 - naît dans les années 60 avec le plan Rouchette (réforme de l’école élémentaire popularisée par la méthode globale de lecture qui déclencha alors des polémiques), se poursuit en aval avec la réforme Haby - instauration du " collège unique ", milieu des années 70 - jusqu’aux actuelles réformes initiées par L.Jospin en 1989.

Sans jamais convoquer l’opinion publique ni les acteurs du champ intéressé, le sens de la formation initiale des jeunes a été  évaporé  au nom d’une démocratisation-massification dissimulant une opération économique : la privatisation des services éducatifs organisée par la commission européenne, et déjà largement opérée chez certains des membres de la C.E.E. (la Grande-Bretagne, par exemple).

En France, depuis une vingtaine d’années, des sociologues et spécialistes de l’éducation (Ph. Meirieu (2), F. Dubet (3), E. Debarbieux (4), Marie Duru-Bellat (5), B. Charlot (6) et son équipe de Paris VIII pour citer les plus médiatisés) se chargent régulièrement d’expliquer - à qui veut bien les croire, car il s’agit souvent de foi et non de science - que le sens de l’instruction n’est plus évident pour la jeunesse d’aujourd’hui par la faute de l’institution.

L’école produirait la violence voire même sa propre violence (7) ; partant, l’école doit être son propre recours et il ne servirait à rien d’apprendre des savoirs " morts " car mieux vaudrait " apprendre à apprendre " pour être en mesure d’apprendre des savoirs qui n’existent pas aujourd’hui. En quelque sorte faire du passé table rase…Nous y revenons ultérieurement (8).

Parallèlement, cette massification de l’enseignement secondaire n’a jamais, rappelons-le, été discutée par les différents acteurs du système éducatif et, dans les faits, pas davantage par la société excepté sous forme de slogan : " 80% de réussite au baccalauréat en 2000 " (J.P. Chevènement, milieu des années 80). Cette déclaration du ministre tient d’ailleurs, à l’origine, d’une autre déclaration (d’intention) d’un homologue…japonais ! Ce dernier aurait fait allusion à l’équivalent français du brevet des collèges. Pourquoi, alors, cet intérêt à maintenir le quiproquo ?

En outre, cette massification - justifiée comme une démocratisation - s’est réalisée au moment même où une déliquescence sociale liée à la mondialisation (décidée dès la Trilatérale de 1976) produisait des effets de plus en plus visibles. Et, contrairement à certaines idées reçues, pas seulement auprès des populations importées par les entreprises depuis les années 60 dans le cadre des Trente Glorieuses. 

Cependant, ces populations poseront des problèmes spécifiques liés à un déni d’existence et, par conséquent, la non prise en compte de phénomènes linguistiques et culturels en sus du traitement socio-économique.


Innover ou disparaître.

Dès le milieu des années 70, une pression s’exerce alors sur l’enseignement secondaire d’autant que parallèlement l’organisation du travail (Trilatérale : 1976) et du capital (les théoriciens du néo-libéralisme économique sont alors en train de ressusciter le libéralisme économique du XIXème) subit de profondes transformations. Les populations montantes ne seront pas intégrées dans la société (d’abord le " monde du travail ") dans les mêmes conditions que leurs aînés. Il faut réformer la formation, plus exactement : préparer la masse des jeunes aux temps nouveaux (qui s’annoncent radieux – et juteux - pour une élite économique).

Etant donné le gigantisme du système éducatif français (1 million de fonctionnaires, 13 millions d’enfants pris en charge jusqu’à leur majorité et au-delà) qui relève d’un Etat historiquement garant, depuis la seconde moitié du XIXème siècle, de la qualité de l’enseignement - reconnue dans le monde entier -, toute réforme globale de ce système ne pouvait que difficilement s’opérer sans une expérimentation en dehors ou à l’intérieur du champ contrôlé par l’Etat.

Cet article traite d’un exemple concret, à savoir la mise en place de nouvelles structures éducatives à partir d’un secteur en apparence annexe à celui de la formation initiale : le champ de la formation continue et professionnelle pour adultes. Plus spécifiquement, des plates-formes de mobilisation : chacun de ces deux termes " plate-forme " et " mobilisation " recouvrant une acception précise, voir ultérieurement.

En l’occurrence, nous verrons comment ces plates-formes de mobilisation mises en œuvre en collaboration avec des associations militantes et certains services relevant de l'Etat mais hors MEN (l’ANPE avec les missions locales de l’emploi, les EREA etc.) ont joué un rôle d’avant-garde dans l’établissement généralisé de certaines structures éducatives vidant de son sens tout l’édifice éducatif basé - antérieurement à ces réformes - sur le concept de l’apprentissage de savoirs reconnus et d’objectifs clairement identifiés par les intéressés (les élèves) et identifiables par la société.

La marchandisation globale des services (9) ayant colonisé tous les terrains pouvant faire l’objet d’une transaction commerciale, la question économique est devenue primordiale à partir du moment où fut exigée une rentabilité dans l’éducation au même titre que l’industrie pratique ce même concept vis à vis des produits.

La part (en termes financiers) dévolue aux GRETA ( GRoupement d’ETAblissements), par comparaison au budget de la formation initiale dans le cadre du MEN, reste infime même si certains chiffres peuvent impressionner : chacune de ces " plates-formes de mobilisation " a coûté - chacune - au contribuable plus de 5 millions de francs. Elles sont financées par le C.R.I.F (Conseil Régional d’Ile de France, époque de référence : 1997) à Paris et en région parisienne.

D’une part, l’expérimentation de nouvelles pratiques " éducatives " est assez peu risquée au regard des sommes investies dans la formation initiale (1er budget de l’Etat) ; d’autre part, les acteurs de la formation continue oeuvrant dans le secteur public n’ont guère eu d’autre choix. En effet, avec la loi de décentralisation (dont les premiers effets se sont fait sentir au milieu des années 80) a suivi la privatisation de services qui tombaient antérieurement dans l’escarcelle d’autres services de l’Etat.

Désormais, la formation continue d’adultes financées par l’Etat peut être sous-traitée par un organisme privé de formation si le financeur (région, Etat, département etc.) en décide ainsi.

Les GRETA, en particulier, se sont donc trouvés au milieu des années 80 face à une situation de concurrence auxquels ils n’étaient guère préparés et ce, de surcroît, en période de récession économique.

Il fallait donc innover sous peine de disparition face à une concurrence ignorant la notion de service public. De fait, en termes de parts de marché les GRETA ont  perdu du terrain dans certaines académies jusqu’à 5%/an (et plus) durant plusieurs années consécutives

Du côté des personnels, de nombreux formateurs sortaient des UFR des sciences de l’éducation pour intégrer leurs débouchés naturels pour l’emploi alors que du côté de la formation initiale, les professeurs (la situation est en train d’évoluer de façon décisive ces dernières années) sont toujours et d’abord formés par les UFR disciplinaires avant de passer sous la fourche caudine des concours. Les uns étant titulaires, les autres pas ; les uns étant soumis à la loi du marché, les autres pas ; si expérimentation de nouvelles pratiques éducatives il devait y avoir, le choix du  terrain ne laissait aucun doute : c’est la conjonction de tous ces facteurs qui a probablement accéléré la pénétration des théories développées par les spécialistes des sciences de l’éducation . D’autant que les dirigeants des GRETA (Président et D.A.F.C.O. : Délégué Académique à la Formation COntinue) ne pouvaient que difficilement juger du bien-fondé de ces théories (personnels titulaires de l’éducation nationale) puisqu’ils se trouvaient dans une situation d’urgence économique et donc de gestion délicate des personnels tout en ignorant, de par leur propre formation, de quoi il retournait au juste.


Qu’est-ce qu’une " plate-forme de mobilisation " ?

Il s’agit d’une structure intégrée dans certains dispositifs du champ de la formation continue et professionnelle ; certaines de ces plates-formes  relèvent du Ministère de l’Education Nationale par le biais des GRETA (E.P.L.E. désormais, voir annexe 1). Un GRETA sera composé de x Lycées et x Collèges publics. L’EPLE qui accueille les services administratifs et le Président est appelé : établissement support. Les autres EPLE sont eux des établissements d’accueil des actions de formation. Le Président d’un GRETA est d’abord et avant tout le Proviseur d’un lycée, parfois le Principal d’un collège. Il est assisté d’un Ordonnateur qui est - surtout - l’Intendant de l’EPLE. Le financement de certaines actions relevant du champ de la formation continue s’effectue, parfois, de façon assez peu transparente. En effet, les bénéficiaires des actions de formation (un commanditaire comme l’Europe, par exemple, au travers des programmes Youthstar, Leonardo etc.) pratiquent une politique de financement à terme, voire fractionnée mais comme il faut bien payer les charges et les salaires des formateurs (entre autres), il s’agit de trouver le financement immédiat. L’ ordonnateur  du GRETA étant aussi l’intendant de l’EPLE, des artefacts administratifs (pour faire court) sont possibles d’où vifs débats lors des conseils d’administration quand des membres font remarquer l’opacité de certaines pratiques (relevant de la comptabilité publique). Voir annexe 1 : la " convention constitutive d’un GRETA " pour mieux appréhender le possible mélange des genres.

Dans le cas d’une plate-forme de mobilisation, le financement provient de la région. Les précisions ci-dessus effectuées visent à clarifier le fait que formation continue et formation initiale - dans le cadre du MEN, i.e de la fonction publique - sont étroitement liés. Le décret du 10 juillet 1989 (annexe 1) relatif à " l’éducation modifiée " est à mettre en parallèle avec la réforme Jospin relative à la formation initiale (voir annexe 2 : extraits du rapport Durand sur la gestion des personnels enseignants du 2nd degré. La totalité du rapport - 7 avril 1999 - est sur le site du M.E.N.) et au tableau représentatif du fonctionnement de ce dispositif de formation ainsi qu’une schématisation de l’origine des publics remplissant ledit dispositif. (fonctionnementDispositifPlateForme.doc).

Appliqué réellement à des milliers de jeunes par le biais des GRETA, ou via certaines associations privées (voir les associations militantes, page 5), ce dispositif intéresse désormais au premier chef les personnels de la formation initiale.


Pourquoi ?

Les dernières orientations du ministre J.Lang (avril 2001) concernant le collège (seraient mis en place pour - certaines ? - des classes de 5ème et 4ème des itinéraires de 11 à 12 semaines durant lesquelles les élèves n’auraient pas de cours disciplinaires mais seraient extraits du collège pour se rendre " individuellement ou collectivement " en entreprise) et les réformes déjà pratiquées dans le premier cycle du secondaire (parcours croisés, interdisciplinarité, projets collectifs et individuels, projets d’établissement etc.) amènent à penser que la généralisation effective et obligatoire desdites réformes dans tous les EPLE de France est sur le point d’être achevée.

Désormais, le MEN propose  aux enseignants - volontaires - d’ " accompagner leurs élèves dans des activités ", d’enseigner " dans deux disciplines ". Premiers pas d’un engrenage aboutissant à un corps polyvalent et, de fait, en voie de déqualification. Ce qui est déjà le cas des formateurs officiant dans la formation continue. Nous y revenons avec l’étude du cas particulier des " formateurs référents ", ci-après pour la rentrée 2001/2002.

En résumé, le MEN orchestre des changements dénaturant profondément la formation initiale des jeunes français en sus de la définition même du métier d’enseignant. Il s’agit officiellement d’individualiser les parcours (des élèves) et pour ce faire revoir de fond en comble à la fois le statut des enseignants, le fondement de leur métier (leur formation disciplinaire) et les savoirs de base à apprendre aux élèves (savoirs d’abord allégés : voir les mesures-éclair - prises sans concertation - par C.Allègre durant les vacances de la toussaint 1998 en lettres, maths et sciences-physiques) (9).

Cette notion d’individualisation des parcours est déjà mise en pratique dans la formation continue depuis le début des années 90.

Une plate-forme de mobilisation  est d’abord et avant tout un dispositif visant à réintégrer dans la société " civile " - acception actuelle - des jeunes sortis du système scolaire (les décrocheurs) voire en marge de la société (cas dits lourds : problèmes d’alcoolisme, drogues, délinquance, situations personnelles et familiales complexes y compris sur le plan administratif). Il ne s’agit pas de les former  à proprement parler à un métier et encore moins de leur donner une formation disciplinaire.

Et c’est précisément le sens donné aux dernières orientations ministérielles, en particulier pour les collèges mais aussi pour les lycées - i.e la formation initiale - par le biais des T.P.E et de l’E.C.J.S (Travaux Pratiques Encadrés et Education Civique Juridique et Sociale).

Les TPE  désorganisent la préparation à l’examen national (baccalauréat) pendant que l’ECJS n’est pas reconnue officiellement car il n’est pas prévu – pour le moment, tout au moins - d’évaluation sur les carnets scolaires. Ce n’est nullement un hasard là aussi. Il s’agit bien d’affaiblir les bases même du système linguistique (d’abord) puis du système éducatif public i.e financé par l’Etat car cette attaque en règle contre l’éducation de qualité - de masse ou pas, là ne fut pas toujours l’essentiel - concerne également les EPLE relevant du confessionnel sous contrat : cela ne change rien à la donne. Comme l’explique Danièle Sallenave (A quoi sert la littérature ?) :
" Pour la constitution du sujet, elle (l’école) doit être un moment dialectique d’opposition à ce narcissisme, en imposant un ordre, une tenue, la répétition d’exercices […] La description linguistique (telle qu’elle est actuellement pratiquée au collège), mettant à plat tous les niveaux de langue, rompt avec une dimension essentielle de l’apprentissage, l’intériorisation d’une norme […] La critique mal entendue du principe d’autorité a fait là aussi des ravages : apprendre une langue, apprendre une norme, cela ne veut pas dire condamner ou juger sévèrement les formes fautives et ceux qui les emploient ! Mais s’il n’y a plus d’enseignement de la norme, il n’y a plus d’enseignement du tout. "

Autrement dit : pourquoi a-t-on déconnecté les deux principes d’autorité et de discipline ?

Entendons par discipline les savoirs de base et par autorité, ce que le MEN tente de (ré) introduire (de façon dévoyée) via le discours de la citoyenneté.

Il y a 30 ans - au plus - il paraissait naturel que de grands groupes (du point de vue de la pédagogie) suivent sans problèmes majeurs des cours disciplinaires (savoirs de base) et, sauf les exceptionnels "chahuts"- exutoires, codés -, on ne se posait même pas la question de l’autorité (il existait un consensus sociétal). Dans d'autres pays (ceux où l'éducation est encore considérée comme une offre réelle de promotion sociale, i.e : une chance) il en est encore ainsi et il est faux de prétendre (par mépris ou compassion) que l'enseignement y est médiocre. Les qualifications des enseignants surprennent au vu de leurs CV et si les salaires sont indécents ce n’est pas qu’ils sanctionnent de médiocres performances...mais tout simplement que la situation économique du pays est fragile au regard des critères économiques actuels dominants.

Toutes les discussions et "savantes" réflexions des spécialistes des sciences de l'éducation sur la "perte de sens" de l'école pour nos jeunes ne sont ainsi pas autre chose qu'une façon de tourner autour du pot de l'autorité…perdue. Celle que les parents n'ont plus parce qu'ils ne l'exercent plus, parce qu'ils ne l'apprennent plus (entre autres ?)…et une analyse plus fine de ces causes-là ne relève pas de cet article.

Les dirigeants du MEN cherchent à imposer aux enseignants français un radical changement de leur mission. Ceux-ci doivent désormais pacifier une jeunesse (livrée à elle-même, i.e à la mondialisation) par le biais d’un discours citoyen.

Mais il faut, pour cela, dépouiller l’éducation (anciennement instruction) de savoirs de base impossibles à apprendre dans de telles conditions et si le MEN révélait ses véritables intentions, la communauté éducative voire la société tout entière suivrait-elle cette évolution pernicieuse des bases du PACTE SOCIAL ? (10)


Le parallèle entre une réforme concernant la formation initiale et un dispositif de la formation continue pris exemplairement comme pratique effective de ce que deviendrait tout ou partie de l’école secondaire est-il gratuit ?

Dans le cas de ces jeunes ayant déserté l’école et qui se retrouvent dans des dispositifs de la formation continue et professionnelle en principe réservés aux adultes, on parle de démobilisation. Cette réflexion est à mettre en relation avec l’ouvrage d’une équipe de chercheurs en sciences de l’éducation : " le rapport au savoir ", développé dans Ecole et savoir dans les banlieues...et ailleurs par Bernard Charlot, Elizabeth Bautier et Jean-Yves Rochex (11). Ces auteurs, après avoir montré les limites des théories de la reproduction (Bourdieu et Passeron, Baudelot et Establet) ainsi que celles des théories du handicap socioculturel, interrogent des problématiques qui, selon eux, " résolvent mal trois questions importantes : celle de la singularité, celle du sens, celle du savoir", car, disent-il, " s'il existe bien une corrélation statistique entre origine sociale et issue scolaire, il n'y a pour autant aucune fatalité de la réussite ou de l'échec. Reconnaissant l'utilité des statistiques et des diverses études sur l'environnement et les groupes sociaux, ils posent la question de la singularité ("l'individu est singulier, c'est-à-dire synthèse humaine originale construite dans une histoire"), puis celle du sens - donné par l'élève à l'école ou à l'apprentissage de savoirs - en termes de "mobilisation" (venant d'un stimulus interne) qu'ils différencient de la motivation (venant d'un stimulus externe), enfin, celle du savoir. "

Un jeune serait peu - ou prou - motivé par le fait d’un environnement extérieur déficient (parents, amis, professeurs etc.) alors qu’un jeune non mobilisé est celui pour qui l’institution (scolaire) - en elle-même - n’a pas de sens. Ce qui expliquerait sa présence dans ce type de dispositif (et sa désertion de la formation initiale). Par voie de conséquence : les savoirs qui pouvaient être appris dans le cadre des EPLE (formation initiale) étaient et sont perçus comme morts. Le jeune n’a donc pas à s’y présenter d’autant qu’il n’est pas rémunéré : dernier sens qu’il pouvait donner à l’action de s’y présenter.

Dans le dispositif analysé (ici : les " plateaux techniques " de la plate-forme, voir EvaluationOrganismeMob.doc et MOBFicheEvaluationPlateauTechnique.doc ), le savoir être et son apprentissage sont considérés comme contenus à apprendre.


Pour mieux comprendre, détaillons la fiche " Evaluation de l’organisme " :

Cette fiche est divisée en deux parties : l'une s'appelle "savoir être"(A) l'autre partie "savoir faire" (B). Concrètement, le (A) occupe les 2/3 de la fiche.

Le (A) est divisé ainsi : (en lieu et place de disciplines et chacun de ces critères doit être lui-même évalué en : "bien", "moyen" "à développer") : Ponctualité (arriver à l'heure), Assiduité (être présent), Aptitude à l'écoute (être attentif à l'autre), Aptitude à s'exprimer (en face à face/en groupe), Sens de l'observation (être attentif à son environnement), Présentation (adapter sa tenue à l'activité et soigner son hygiène), Respect de la hiérarchie (être conscient du rôle de chacun et le respecter), Savoir-vivre, politesse (adopter les règles de savoir-vivre, et respecter le règlement intérieur du lieu de formation), Esprit d'équipe (participer à la vie du groupe), Goût du travail soigné, Initiative (être capable de prendre une décision et de mener une action non prévue), Maîtrise de soi (contrôler ses réactions), Motivation (s'intéresser à une situation donnée), Persévérance (aller jusqu'au bout d'une activité), Adaptabilité (ajuster son comportement à une situation donnée).

Passons au (B) : "Tâches effectuées" suivent trois lignes à remplir puis les critères appelés dans ce cas "Aptitudes" ("bien", "moyen", "à développer"), Identification des métiers/du secteur, Compréhension des techniques de base, Compréhension des consignes, dextérité manuelle, capacité physique, capacité à effectuer une tâche, autonomie dans le travail intérêt du stagiaire pour le secteur + petit encadré à remplir par le formateur-référent) remarques/conseils à donner au stagiaire pour la suite du parcours.

On reconnaît là l’ABC du management mâtiné de civilité et de citoyenneté.

Les plates formes de mobilisation ont constitué un ballon d’essai particulièrement utile avant l’introduction puis la généralisation effective dans la formation initiale : cette partie de la Réforme est désormais appliquée dans tous les collèges français.

Où sont les savoirs de base ? Quelle culture commune pour ces jeunes ? En quoi ces "  savoir être " et " savoir-faire " peuvent-ils aider une jeunesse à s’intégrer (puisqu’il s’agit de cela…) ? N’est-ce pas plutôt de " pacification sociale " qu’il s’agit ?

On comprend, mieux alors, pourquoi il faut changer radicalement la formation des enseignants : ils ne doivent plus enseigner car leur mission a changé mais il est impossible pour le MEN d’avouer ses véritables objectifs tant auprès des intéressés (les professeurs) qu’auprès de la communauté éducative voire toute la société. Cette dernière accepterait-elle ces objectifs si elle savait de quoi il retourne ?


Quel sens donner à l’apprentissage d’un " savoir être " et quels savoir-faire (à défaut de savoirs) sont appris dans une plate-forme de mobilisation ?

D’où arrivent ces jeunes et pourquoi intègrent-ils ces dispositifs de formation continue  (bien que le terme sonne faux pour des jeunes n’ayant pas eu au préalable une réelle formation initiale) alors qu’ils ont déserté les dispositifs de la formation initiale ?

Par le biais des missions locales (antennes A.N.P.E.), la plupart de ces jeunes (qui ont entre 16 et 25 ans) est orientée par l’A.N.P.E. Ces jeunes sont rémunérés. A ce sujet, voir le cahier n°5 (" L’accès à l’emploi des jeunes franciliens sortis du système scolaire sans qualification ", juin 1997) de l’Observatoire Régional de l’Emploi et de la Formation en Ile de France : étude réalisée par l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de la Région d’Ile de France en 1994. Le parallélisme entre la situation de ces jeunes et la crise économique structurelle avec la situation du marché de la formation fait que les GRETA ont, soit en tant que service public (formation des publics bas niveaux de qualification) soit comme partenaire du jeu concurrentiel (formation continuée, C.I.F. - Contrat Insertion Formation - par exemple), apporté leur contribution dans un cadre redéfini (loi quinquennale de 1993) de la formation continue professionnelle.

Cette rémunération - variable selon chaque cas car elle calculée en fonction du nombre d’heures travaillées antérieurement donc des droits y afférant et d’autres paramètres - fait des GRETA des prestataires de services rendus à des clients. Les clients sont les jeunes mais aussi les financeurs des actions de formation.

La plate-forme de mobilisation permet de regrouper l’ensemble des prestataires de service offrant leurs prestations aux clients. La qualité desdites prestations étant régulièrement contrôlée par les financeurs mais aussi évaluée par les jeunes (clients). Chaque client étant lui-même évalué selon des critères ayant désormais pénétré la formation initiale : voir les deux fiches citées précédemment : EvaluationOrganismeMob.doc, et MOBFicheEvaluationPlateauTechnique.doc).

Les critères d’évaluation et les paramètres définissant la formation continue professionnelle sont ceux introduits par la réforme Jospin (1989) dans le champ de la formation initiale. Savoir-faire et savoir être, par exemple, firent alors leur entrée en force dans le vocabulaire de la formation initiale.

Directement importés  de la culture d’entreprise ces concepts ont pu  passer de l’entreprise privée à l’entreprise ( ?) publique (d’abord les organismes de formation continue puis la formation initiale) par le biais :

  • d’une part d’associations militantes relevant du champ de l’éducation ;
  • d’autre part de spécialistes du champ de l’éducation qui connurent leurs heures de gloire théoriques (1967 : création des UFR de sciences de l’éducation) dans les années 70/80 puis leur apogée - aux commandes - dans les années 90 avec la création (et la prise de pouvoir, de fait, de la formation des enseignants : du secondaire en particulier, les écoles normales étant investies par ces spécialistes depuis les années 60/70) des I.U.F.M., sans parler des positions privilégiées au sein du M.E.N. Citons les médiatiques Philippe Meirieu, conseiller du ministre (qui l’a chargé de diverses missions) et dirigeant de l’I.N.R.P., François Dubet chargé de la consultation des lycéens en 1998, Eric Debarbieux chargé d’une mission sur la violence à l’école en 1998 et animateur de l’Observatoire National de la Violence (12) mais aussi des personnages liés à la discipline : Messieurs Boissinot et Viala pour les lettres par exemple.

Les associations militantes :

Sur ce point comme pour le suivant nous renvoyons à La destruction de l'enseignement élémentaire et ses penseurs et (dans une moindre mesure) Vers une école totalitaire ? de Liliane Lurçat (éd. François-Xavier De Guibert, 1998 & mai 2001/réédition).

En résumé : une " plate-forme commune ". On retrouve l’idée de la plate-forme : la mise en commun de techniques, de moyens voire de " groupes  de personnes partageant les mêmes objectifs ". Une plate-forme de mobilisation, c’est aussi cela. Ce qui implique : " travail en équipe ", " pédagogie du projet ", " actions éducatives communes "…des mouvements pédagogiques. Voir la la brochure Apprendre à lire pour les 2-12 ans (supplément commun aux Revues : Les Actes de Lecture, Cahiers Pédagogiques, L'éducation, Dialogue Camaraderie, Vers l'Education Nouvelle, publié par l'imprimerie Utopie) et notons que les associations suivantes se sont rassemblées : Association Française pour la Lecture, Centres d'Entraînement aux Méthodes d'Education Active, Centres de Recherche et d'Actions Pédagogiques (voir : http://www.cahierspedagogiques.com/pages/Projet.htm), Fédération de France des Francs et Franches Camarades, Fédération des Oeuvres Educatives et de Vacance de l'Education Nationale, Groupe Français d'Education Nouvelle, Institut Coopératif de l'Ecole Moderne " (page 39). Un inspecteur de l’Education Nationale - Michel Migeon - " cite la plate-forme, en précisant qu'il s'agit : "Des sept mouvements pédagogiques les plus importants de notre pays". (page 40). On retrouve ces mouvements pédagogiques (voir http://www.multimania.com/mdpierrelee/amis.htm ) dans les associations proposant des actions de formation continue (INSTEP, CEMEA etc.). Mouvements relevant, par ailleurs, de la mouvance Léo Lagrange et de la pédagogie Freinet & Piaget pour les plus influents.

La culture commune de ces mouvements est qu’il convient d’ " évaluer " au lieu de " transmettre " des savoirs – ces derniers par conséquent – étant considérés comme " morts " puisqu’" inutiles ". Voir la Charte des établissements pionniers soutenus par le Manifeste (Projets soutenus par M.D. Pierrelée, Gaby....). Voir en annexe 1. Voir également chapitre 7 de l’ouvrage de L. Lurçat. Et enfin l’article de Gabriel Cohn-Bendit : " Travailler autrement, c'est instaurer une véritable citoyenneté avec et pour les élèves. Lettre ouverte au nouveau ministre de l'Education Libération, 28.03.01. L’intégralité de cet article est fournie en annexe 2).

Les mouvements pédagogistes ont adopté (voir les années 80 : de "réconciliation des français avec l'entreprise" et les Projets à l'école, les PAE de 1982 constituant une date de naissance) la culture d’entreprise, du management à l'anglo-saxonne, popularisé par J. Delors en France,

(au niveau politique). Et, dans la culture d'entreprise, la culture d'évaluation est forte…

De quoi s'agit-il ? De savoir quasi à tous moments où on en est. Le temps passé à évaluer et l'énergie requise empiètent - fatalement - sur les temps d'apprentissage. Jusqu'à en devenir le coeur de l'enseignement métamorphosé en éducation dans une première étape puis en citoyenneté. Enfin se produit la dérive actuelle de la confusion produits/services, les élèves devenant des clients à satisfaire. Cette dérive est communément appelée consumérisme dans la formation initiale.


Les " spécialistes " du champ de l’éducation :

Si l’on s’en réfère au Dictionnaire encyclopédique de l'éducation et de la formation (Paris, Nathan, 1994) qui " réunit les contributions de 190 spécialistes, représentatifs - est-il dit - de la variété des approches et des points de vue en éducation et en formation, élaborés ces toutes dernières décennies, et qui se sont concrétisés dans la loi sur l'éducation de 1989 (page 154, L. Lurçat : allusion à la loi-cadre Jospin, alors ministre de l’Education Nationale.), il ne s'agit plus de l'école de la République. C'est l'école des sciences de l'éducation dont les principes, les références et les valeurs sont élaborés notamment par l'INRP et les UFR des sciences de l'éducation, et se renouvellent au rythme des modes, des querelles et des conflits de chapelles.(...) "

La conjonction historique de l’action des unes et des autres a permis, simultanément, la création de nouveaux métiers. Ces derniers étant d’abord situés à la marge des actions de la formation initiale sont désormais en passe de supplanter les professionnels que sont les professeurs (formés disciplinairement) exerçant dans le cadre de la formation initiale.

Pour ce faire, il a - en premier lieu - été nécessaire d’ inventer un nouveau concept :

l’ interdisciplinarité.

Dans son article : "Interdisciplinarité" (P. 561, Dictionnaire encyclopédique de l'éducation et de la formation, op.cit. Cité par L.Lurçat.) Françoise Cros (Formatrice IUFM de Versailles & chercheuse INRP de Paris " cellule innovations ", nous renvoyons le lecteur aux pages 155-6 de La destruction de l’école élémentaire... et fournissons en annexe 5 l’intégralité du commentaire de l’auteur dans lequel elle donne un éclairage de l’évolution des sciences de l’éducation et comment désormais " la sociologie semble dominer les sciences de l'éducation. ") définit celle-ci comme : " Une modalité pédagogique destinée à se substituer plus ou moins aux disciplines dont le découpage arbitraire ne correspondait plus à l'identité actuelle des nouveaux savoirs". " L'interdisciplinarité est soutenue "par une approche militante de démystification du savoir dans une perspective de sociologie des connaissances".

Cette notion d’interdisciplinarité se décline en plusieurs variantes : " trans " " multi " voire " pluri " selon les besoins : les T.P.E. (formation initiale, réforme des lycées) seront " transdisciplinaires " car un T.P.E. met à plat les disciplines dans la poursuite d’un même objectif alors qu’un projet pédagogique personnel ou collectif sera éventuellement " multi " ou " pluri "disciplinaire - car il mettra en œuvre plusieurs disciplines – dans la poursuite d’un objectif - sans les mettre à plat. I.e que l’apprenant utilisera les disciplines indépendamment l’une de l’autre dans la poursuite de son projet ce qui donne les APP (Atelier de Pédagogie Personnalisée) dans le cadre de la formation continue : voir fonctionnementDispositifPlateForme.doc.)

En clair : la réussite à l’examen met en œuvre plusieurs disciplines et toutes sont évaluées indépendamment l’une de l’autre. La transdisciplinarité, par contre, rend impossible l’évaluation réelle.

L’objectif principal ne sera donc plus d’apprendre des savoirs mais d’ " apprendre à apprendre ". Cette pédagogie du vide ainsi qualifiée par des analystes (Cf, entre autres : Denis Kambouchner, Une école contre l'autre, PUF, col Questions actuelles, août 2000) requiert des spécialistes de la " médiation " et de la " remédiation ".

Cette terminologie est désormais non seulement acceptée dans la formation initiale mais elle est mise en pratique. Ce sont les " professeurs-ressources " appelés dans la formation continue les " formateurs-référents " (leurs fonctions ne divergent plus réellement mais la réalisation n’est pas encore intériorisée, le statut de 1951 empêchant une certaine souplesse).

Si nous prenons le " projet d’établissement " d’un collège du Val d’Oise (1998) nous trouvons la définition suivante : " Professeurs-ressources : Objectif : travail de remédiation avec des élèves de 3ème et de 4ème. Moyens : ce travail s’effectuera en dehors des 4 heures hebdomadaires de X ". La " mission du formateur-référent (Voir FormateurRéférentProfilCompétence.doc . Extrait du référentiel " groupe métier sur la fonction de référent ", C.A.F.O.C. de Paris, Martine Blanc-Rameau, 13 p.) est, elle, de : diagnostiquer les besoins et les attentes des jeunes en difficulté, de concevoir en collaboration avec le coordonnateur (de la plate-forme) puis de mettre en œuvre des actions éducatives ".


Pour un projet ? Mais quel projet ?

Puisqu’il s’agit de mettre en œuvre des actions éducatives dans le cadre d’un projet (voir les P.A.E et autres projets d’enseignement lancés en 1982 : Voir : Séminaire de Souillac ( Oct 1982) "La stratégie du changement"( CR de l'exposé de Michel Crozier, sociologue et directeur de recherche au CNRS + Clôture du stage : Maurice VERGNAUD - Directeur des Collèges (13) ), comment faire pour innover et être conforme au  goût du jour (plus concrètement aux directives européennes) ?

Ce délicat problème du fonctionnaire prié d’obéir aux ordres et simultanément d’innover est résolu dans le cadre des GRETA : c’est bien un fonctionnaire qui ordonne d’innover (le Président d’un GRETA est d’abord le Proviseur d’un lycée, parfois le Principal d’un collège) mais il a sous sa coupe des non-fonctionnaires par conséquent libres d’innover ou…de partir (C.D.D.). Ce qui n’arrive pas si souvent grâce aux sciences de l’éducation ayant correctement formaté des personnels à la fois obéissants et innovateurs.

Obéissants car d’accord avec les objectifs. Innovateurs car spécialistes d’une pédagogie du vide permettant l’auto-justification à l’infini (mais aussi la critique externe : objectifs non avoués occupant déjà une bonne partie du temps productif). Autrement dit, la médiation et la remédiation conseillées à l’égard des apprenants est strictement appliquée aux formateurs ainsi qu’aux formateurs de formateurs (les hiérarchies officielles étant souvent dédoublées d’une hiérarchie parallèle sujette elle aussi aux fluctuations intéressées des partenaires et ce au gré des projets et de leurs objectifs).

Dans ce cadre en permanence innovateur (nous sommes dans la formation permanente), l’instruction et l’apprentissage de savoirs (même de base) relèvent quasiment de l’injure. L’apprentissage de savoirs tolérés relevant exclusivement de l’utilitaire sauf exceptions, dans l’exemple de notre plate-forme : français langue étrangère ou français langue maternelle avec l’A.D.P.I. (Association pour le Développement de la Pédagogie Individualisée, " méthode Gattegnot " au service de l’illettrisme.) et un peu de math.

Dans ce cadre, il convient d’encourager chaque formateur à développer la capacité d’analyse critique de sa propre activité, complément indispensable à une bonne acquisition de l’intelligence des situations et qu’en relation avec des acteurs multiples (tant à l’interne qu’à l’externe) chacun des formateurs-acteurs de la plate-forme comprenne combien est requise de sa part une grande souplesse intellectuelle…

Qu’on mette en relation, par exemple, le BO du 11 juillet 2000 et les nouvelles missions éducatives des professeurs de collège et on se rapproche chaque jour un peu plus - dans la formation initiale - de la pratique des organismes de la formation professionnelle et continue (des adultes).

Le MEN fait en sorte que soient pleinement pris en compte les nouvelles orientations qui portent sur les aspects essentiels de l’activité des enseignants du IIIème millénaire. Ces activités sont (re)définies par des organismes transnationaux (commission européenne, OCDE…) et visent à satisfaire " le marché ".

Le tout doit trouver sa justification et c’est ainsi que sont apparues les gestionnaires de l’ " apprendre à apprendre " si l’on s’en tient au terrain pédagogique. Gérer la complexité du vide n’est pas tâche aisée et les spécialistes du champ de l’éducation n’auront pas peu contribué à la formation d’un homme nouveau dans le champ éducatif : l’édupacificateur, chargé d’apprendre à apprendre à ses jeunes concitoyens afin que ces derniers n’apprennent plus rien (donc ne se posent plus de questions ?) de tangible puisqu’on doit comprendre qu’un pourcentage important de savoirs et savoir-faire ne sont même pas connus à l’heure actuelle et que pour cette raison ils seraient frappés de non transmissibilité.


Des projets : pourquoi faire ?

Si l’on compare cet article :
L’OCDE inspiratrice des politiques scolaires du capitalisme
3) Rentabilité maximum :
Considérant sans complexe que " l'enseignement est une industrie de main-d'oeuvre par excellence" (R2), l'OCDE préconise la recherche de la " rentabilité " maximum, de l'efficacité, de la productivité dans cette industrie de l'enseignement comme dans les autres :
" Elle aidera aussi à utiliser plus efficacement et à mieux gérer les ressources réelles et financières. Il y a là une nécessité qui devient aujourd'hui impérieuse dans le secteur éducatif, en raison de la proportion considérable de l’ensemble des ressources nationales affectées actuellement à ce secteur, dans tous les pays membres de l'OCDE. " (R1, p. 154-155 ) . " (14)

au projet académique (de Paris, par exemple) des années 80/90 :
" Développer encore, sur le marché concurrentiel de la formation professionnelle continue, la présence des GRETA de l’Académie, dans le respect de la vocation et des valeurs du service public, telle est l’ambition de ce deuxième plan " (15)

et aux actuelles nouvelles missions éducatives du MEN (et pas seulement de son secteur " formation continue " (16) ) ; mieux vaut prendre conscience que non seulement l’apprentissage des savoirs n’est pas nécessaire mais qu’il est désormais prohibé. Nous développons, ci-après, un exemple concret de ces projets : le plan "e-Learning" médiatisé à l’occasion du salon :

La Commission Européenne a adopté, le 28 mars, le plan d’action " e-Learning (Penser l’éducation de demain) ". Ce plan s’inscrit dans la suite de la stratégie arrêtée à Lisbonne. Il couvre la période 2001-2004. L’objectif est de " favoriser une coopération entre la Commission, les gouvernements des Etats membres, les communautés éducatives et de formation et les industriels du secteur, afin de valoriser le lien entre l’éducation tout au long de la vie, la modernisation des systèmes d’éducation et d’apprentissage et l’utilisation des TIC ". L’UE (Union européenne) dans ce domaine, devra intensifier ses efforts, et d’atteindre les perspectives d’amélioration des infrastructures, d’équipement de toutes les classes avant la fin 2002, d’aller vers une moyenne de 5 à 15 élèves par ordinateur, la formation des enseignants, mais aussi la création de plates-formes d’apprentissage en ligne d’ici fin 2002, l’adaptation des programmes scolaires et la mise en réseau des écoles d’Europe. Les écoles, les universités et les centres de formation sont appelés à devenir des " centres locaux d’acquisition des connaissances, polyvalents et accessibles à tous " . Il s’agit aussi " d’offrir la possibilité à chaque travailleur d’acquérir une culture numérique par l’apprentissage tout au long de la vie, d’ici la fin 2003 ". Pour atteindre ces objectifs, la Commission devrait mobiliser les différents programmes (Socrates, Leonardo da Vinci, Jeunesse), le programme cadre pour la recherche et le développement, les programmes liés aux TIC,mais aussi les fonds structurels et s’appuyer sur les lignes directrices pour l’emploi (processus de Luxembourg). Le plan d’action met en cohérence différents axes thématiques (Langues vivantes et Sciences, technologie, société ou encore Art, culture, citoyenneté) définissant un agenda, des échéances. Il précise, dans le chapitre concernant le renforcement des réseaux européens pour l’éducation et la formation, que des organisations comme le CSEE(comité syndical européen de l’éducation) seront associés à des groupes de travail.

http://europa.eu.int/comm/education/elearning/planfr.pdf

http://www.ledevoir.com/ago/2001a/assi060401.html

Les responsables centraux de l'éducation nationale - en liaison avec la catégorie des scientifiques de l'éducation - ont imposé tous les changements de programmes sur les notions fondamentales dans la vague formaliste - maths modernes et lecture globale- dès les années 60/70 avec comme conséquence une baisse des capacités de base.

C’est à se demander si la loi Delors (17) (20 ans après Président de la commission européenne…1971 : loi fondatrice, en France, de la formation continue professionnelle des adultes) avec la mise en œuvre d’un système de réponse individualisée de formation n’est pas venue colmater la brèche, ainsi ouverte, dans la mesure où des adultes insuffisamment formés à la base (préparant, avec profit, l’antienne contemporaine de la  formation tout au long de la vie) éprouveront des difficultés à s’adapter aux changements ; les savoirs fondamentaux constituant précisément le ciment de toute évolution future. Bref, créer ses propres manques pour pouvoir les combler, par la suite, sans oublier de les faire payer individuellement ?

Dans ces conditions, le problème du niveau atteint par le formé importe peu : ce qui compte ce sont bien des contenus mais uniquement sous la forme de qualifications professionnelles préparant le formé à l’exercice éventuel d’un métier ou mieux encore : à l’exercice de l’adaptabilité dans le cadre de l’employabilité si possible dans un cadre supranational. En ce sens, la pédagogie du projet - importée de la culture du management - se révèle sous son vrai jour : un conditionnement à l’apprentissage d’un savoir être (la soumission " librement " consentie) et de savoir-faire bornés (au sens premier de ce terme).


Rôle des " plates-formes de mobilisation " ?

Puisque le diplôme est considéré comme non indispensable à la majorité de la population (en particulier, les publics dits de " moyen " et " bas niveaux "), l’effort est concentré sur des formations plus " qualifiantes " que " diplômantes ".

Dans le cadre de la mission globale d’un service public désormais assujetti à une démarche commerciale (la loi du marché), tous les acteurs (décideurs, formateurs & partenaires) doivent être mobilisés afin de mettre en œuvre le développement de ces formations - plus qualifiantes que diplômantes, répétons-le - selon les besoins du marché : réponses aux appels d’offres des conseils régionaux ou à celles d’entreprises ; les deux faisant jouer la concurrence, sur le "moins disant" mais aussi sur le "mieux-disant" ce qui implique une démarche de qualité. Le " zéro défaut " popularisé par C. Allègre dans le cadre, cette fois, de la formation initiale…

L’adéquation entre la structure des emplois et la structure des sortants du système éducatif est un problème récurrent qui met en exergue le problème des formations diplômantes gênant les formations qualifiantes qui sont apparues dans les années 80.

Le dispositif de formation qui a fait l’objet de cette étude sommaire ne s’inscrit donc pas par hasard juste en amont des contrats de pré-qualification, qualification, CDD (cf MissionLocaleMobilisation.doc)…

Une des solutions serait de proposer une solide formation de base (d’où l’importance de la formation initiale, par exemple dans les lycées professionnels pour ces publics dits de " bas niveau ") et donc d’articuler formation initiale et formation continue.

Le pari d’une telle stratégie de développement - à l’opposé de ce qui se fait actuellement -serait gagné lorsque, par exemple, une entreprise ayant acheté une formation proposée par un GRETA ou toute autre association de formation continue attendrait que le formé ne le soit effectivement avant d’embaucher ce qui n’est qu’un candidat en formation.

Ce pari n’est évidemment possible que si la formation initiale joue à plein son rôle de consolidation des savoirs de base et par voie de conséquence d’orientation des jeunes.

Dans le cas contraire - ce qui se passe actuellement dans les faits - des dispositifs comme les plates-formes de mobilisation (en formation continue) et leurs pendants en formation initiale (collèges et lycées) jouent le rôle de voies de garage…A quelles fins ?

Une telle (tentative de) mise en conformité d’une jeunesse et de ses formateurs n’est et n’a été possible qu’avec la volonté d’idéologues se drapant dans un scientisme sociologisant aux effets dévastateurs (Voir : "  Le pédagogisme facteur d'échec " , Liliane Lurçat. Article paru dans Philosophie politique , "Ecole et démocratie", n°10, novembre 1999, P.U.F.).


Une fin.

Il convient de ne pas se voiler la face : l’ajustement structurel visant le monde de l’éducation n’aura pas d’autre résultat que d’indexer sur les exigences du marché une éducation de moins en moins publique et gratuite à défaut d’être obligatoire. Ainsi l’affirme sans trop d’acrobatie rhétorique un rapport de l’O.C.D.E. (1996) stipulant que l’école publique ne serait plus chargée que :

" d’assurer l’accès à l’apprentissage de ceux qui ne constitueront jamais un marché rentable et dont l’exclusion de la société en général s’accentuera à mesure que d’autres continueront de progresser ".

Les  plates-formes de mobilisation mises en place par les GRETA et associations militantes à partir du milieu des années 1990 revêtent une signification avant-gardiste : celle d’éclaireur et d’expérimentateur d’une logique néo-libérale sous couvert d’égalitarisme républicain (dans sa version française).


Jacky Renaud
renaudj@magic.fr

 

(1) " Les plates-formes de mobilisation  : un terrain d’application fécond des sciences de l’éducation dans le champ de la formation continue . "

(2) Meirieu Philippe, Apprendre…oui, mais comment, Paris, ESF, 1987, 180 p. (Pédagogies). Enseigner, scénario pour un métier nouveau, Paris, ESF, 1989, 146 p. (Pédagogies). "Eloge de l’ignorance", pp. 3-6. Cahiers Pédagogiques , hors série, (" Apprendre") : et de très nombreux autres ouvrages…

(3) Les nouveaux lycéens, 1998, sociologue chargé de mission par C. Allègre d’une enquête auprès des lycéens et professeurs de l’enseignement secondaire.

(4) Spécialiste de l’étude de la violence, animateur d’un Observatoire de ces phénomènes.

(5) Sociologue.

(6) "Ecole et savoir dans les banlieues...et ailleurs", Bernard Charlot, Elisabeth Bautier, Jean-Yves Rochex, éd. Armand Colin, 1992, 253 p.

(7) ce qui, au passage, n’est pas une découverte si l’on veut bien considérer que toute institution étant coercitive par définition produit une certaine violence.

(8) N’est-il pas intéressant d’observer que Monsieur Meirieu (récemment imposé par notre formidable ministre à la tête de l’I.U.F.M de Lyon contre un vote qui désignait pourtant un " ami de 30 ans " de l’heureux nominé) est obligé de reconnaître - face à la manne qui se fait attendre pour la formation des enseignants en I.U.F.M. - qu’il existe " Certains enseignements [qui]ont un caractère incompressible ". Lesquels ? Libération (7 juin 2001) le précise dans le même article : "  Ironie de l'histoire pour un des inspirateurs de cette réforme : il [Meirieu] parle là des enseignements disciplinaires (mathématiques, français, etc.) qui étaient censés occuper proportionnellement moins de temps, au profit de la pédagogie. "

(9) Eiglier (Pierre)/Langeard (Eric), La servuction (le marketing des services), Ed. Mc Graw-Hill, col. Stratégie et Management, septembre 1991, 205 p. Capdepont Emmanuel, "Enseigner le français aux adultes, une relation de service", Le français dans le monde, août-sept. 1995, nª 275, pp.44-46.

(10) Autre exemple, plus récent : le  débat  sur le collège unique http://www.humanite.presse.fr/journal/jour.html http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3226--159441-,00.html Nous nous limitons, ici, au strict champ de l'éducation

(11) Ed. Armand Colin, 1992, 253 p.

(12)
Propos relevés lors du Colloque " violences et missions éducatives " organisé à l'occasion du Congrès National - qui s'est déroulé à Tours en février 1994 - de la F.E.N. Eric DEBARBIEUX : " ... C'est un débat [la violence] piégé, un débat où se mêlent tellement d'idéologies que j'ai souhaité mettre une phrase qui soit : fabriquons du savoir ! "Dominique LAURENS : " ... Si je peux apporter mon témoignage sur la violence, (…) Personnellement, à travers mon expérience de représentant du Ministère Public, chargé d'animer la politique criminelle sur mon département, je me demande si cette violence des enfants ne traduit pas, tout simplement, la violence des adultes entre eux. ".
D’une part la " fabrication du savoir " attend toujours sa concrétisation en termes de contenus " à apprendre " en lieu et place de l’obsessionnel " apprendre à apprendre " ; d’autre part, il est à souhaiter que les représentants du MEN
parviennent un jour à des analyses plus fines. Les deux questions sont liées car si dans le cadre de la formation initiale les enseignants se plaignent d’être gênés par la violence pour l’apprentissage des savoirs de base ; dans le dispositif de formation analysé ici les techniques de médiation et de remédiation ont substitué l’apprentissage d’un quelconque savoir à la différence qu’il n’y a pas culpabilisation des formateurs mais intégration de ces nouvelles tâches dans la définition de leur métier. Une plate-forme de mobilisation est avant tout un lieu de pacification sociale sans le revendiquer. Plus rentable que ne le seraient les structures de la formation initiale ? N’y-a-t-il pas là un troublant modèle du futur collège ? les 11-12 semaines " en entreprise " promises pour les 5ème et 4ème (à partir de septembre 2001) ressemblent à s’y méprendre aux périodes de " plateaux techniques " de notre plate-forme de mobilisation où, justement, les jeunes papillonnent d’un " plateau " à l’autre pour être mieux à même de ne pas rater leur orientation (justification officielle). Plus prosaïquement : pour être sensibilisés aux divers métiers offerts. Encore peut-on supposer que des jeunes " entre 16 et 25 ans " seront mieux à même de choisir que des jeunes de 12-14 ans…

(13) Merci à Michel Delord pour ces documents.

(14) François Blanchard, US n° 5, 26 février 1975. Merci à Isabelle Voltaire d’avoir " déniché " cet article. Sous couvert d’un pédagogologisme enthousiaste à l’idée de jouer dans la cour des grands, la remplaçante de Mme Vuaillat a mis en avant des qualités qui n’ont pas dû déplaire rue de Grenelle (et ailleurs) : Formatrice IUFM, " passionnée de didactique "... Comme si l’allégeance à une certaine " science " (pourtant contestée depuis ses origines puisque la formation des véritables professionnels de l’éducation que sont les professeurs ne passent pas par cette " science " mais par le champ disciplinaire et le face à face pédagogique quotidien) devait rassurer… Peut-on, dans ces conditions, parler de " distance " entre la politique gouvernementale en matière d’éducation et les désirs bruyamment proclamés par les hérauts d’une politique néo-libérale militante ? Citons ce dirigeant du parti Démocratie Libérale (Libération 24.11.2000) : " Et que fleurissent 1000 collèges Pierrelée ". Les pédagogologues seraient-ils les chevaliers d’une " guerre civile " qu’ils auraient eux-mêmes provoquée ? Dé(cons)truire pour reconstruire ?

(15) Michèle Gendreau-Malassou, Recteur de l’académie de Paris, Chancelier des Universités de Paris, p.3, Deuxième plan stratégique académique 1993-1997 ; sachant que le premier plan académique (1988-1992) s’était donné pour objectif d’ " assurer sur fonds privés 50% de l’activité totale "…

(16) Salon de l’e learning en novembre 2000, privatisation du CNED, lancement d’EduFrance pour la vente de l’ingiénierie éducative française…

(17) Voir : "L'éducation, un trésor est caché dedans", Jacques Delors, mars 1996, 312 p.

 


ANNEXE 1 :  la " convention constitutive d’un GRETA " :

  • Dépend : de l’article 19 de la loi n°89-486 du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation modifiée et du décret n°92-275 du 26 mars 1992 aux groupements d’établissement (GRETA).

Ministre de l’éducation nationale d’alors ? un certain Lionel Jospin.

 


ANNEXE 2 :  : extraits du rapport Durand sur la gestion des personnels enseignants du 2d degré :

" En application du principe d'autonomie des établissements, il faut également rappeler que, face aux difficultés rencontrées pour assurer, de façon complète et permanente, le service d'enseignement en présence des élèves, le décret n° 89-497 du 12 juillet 1989 a permis le recrutement d'agents vacataires temporaires. Il s'agit d'une compétence exclusive du chef d'établissement. Sous son entière responsabilité et dans la limite des moyens financiers dont il dispose à cet effet, celui-ci peut ainsi recourir à ce moyen très souple, non seulement pour pallier les inconvénients résultant du non-remplacement des professeurs absents pour une courte durée, mais aussi pour assurer, dans certains cas, des groupements d'heures d'enseignement au bénéfice des élèves.

___________________________________________________________________________

Dans ce domaine [remplacement des enseignants], l'inégalité entre l'enseignement public et l'enseignement privé est cependant manifeste. Dans un cadre concurrentiel, il va de soi que la durée d'attente du remplaçant est une donnée fondamentale. Or, il semble que les crédits de remplacement ne sont aujourd'hui encore pas limitatifs en pratique dans l'enseignement privé, alors qu'ils devraient l'être comme ils le sont en droit pour l'enseignement public. Dans le cadre d'une véritable parité des moyens, il est indispensable de contingenter les moyens de remplacement du privé.

Le système de liste académique de choix, qui existe dans la seule académie de Lille, mériterait d'être étendu. Le chef d'établissement est ainsi tenu de puiser dans une liste de suppléants par zone géographique (bassin de formation), consultable par minitel, et ne peut recruter de remplaçant librement que si cette liste est épuisée. Ce système équilibré limite les appels libres tout en garantissant la qualité des remplacements effectués

Par souci légitime de rationalisation de gestion et d'utilisation optimale des ressources humaines, l'administration affecte parfois les enseignants remplaçants titulaires à un poste ou à un projet pédagogique. Cette décision prise (d'ailleurs parfois dans l'intérêt des professeurs eux-mêmes, qui risquent la déqualification en l'absence d'activité pédagogique), il devient très difficile de " sortir " rapidement ces enseignants de ces affectations, où ils se sont souvent beaucoup investis, pour effectuer un remplacement. (…)

La bivalence, qui consiste pour un enseignant à assurer l'enseignement de
deux matières différentes, est particulièrement intéressante, principalement
dans les premières années du collège où le passage du maître d'école unique
à un ensemble de 10 ou 11 professeurs peut être facteur de déstabilisation
pour les élèves les plus fragiles.
Une idée pour le moins discutable ! L'argument lié à la psychologie de l'enfant relevant de la psychologie alibi, et bien plus d'une projection, d'une reconstruction du discours de l'enfant par l'adulte.
En effet, elle présente à la fois un avantage pédagogique et un avantage en
termes de gestion.

L'avantage de gestion, c'est possible, mais l'avantage pédagogique est très discutable ! ( Commentaire : " emprunté " à Corinne, colistière LettresD)

Il peut d'abord être judicieux, pour des élèves, d'avoir le même enseignant
dans des disciplines connexes. De plus, la monovalence est difficile à gérer
pour les petits établissements, ce type d'établissement étant par ailleurs
réputé pour permettre la diminution des tensions liées à la violence.
______________________________________________________________________

Professeur contractuel Décret n° 81-535 du 12 mai 1981Recrutement direct par
les recteurs d'académie
Conditions d'âge (35 ans) et de diplôme Même service que les professeurs
titulaires occupant un emploi correspondant
Professeur associé Loi n° 93-121 du
27 janvier 1993Recrutement par contrat sur justification d'une expérience
professionnelle Même service que les professeurs titulaires dans les
disciplines d'enseignement technologique ou professionnel
Vacataire Décret n° 89-497 du 12 juillet 1989Recrutement direct par les chefs
d'établissement Condition de diplôme (licence) 200 heures de vacation
maximum pour une année scolaire.

 


ANNEXE 3 : La Charte du " Manifeste pour une école créatrice d’humanité ".

Cette charte a pour objet de mettre à jour les principes de base qui guideront les projets de collège qui seront soutenus par le " Manifeste pour une école créatrice d’humanité ". (…) : organisation des cours, des différents temps de concertation, des projets, des relations avec les différents partenaires…

  1. Les établissements pionniers seront des établissements à part entière de l’Education Nationale. Ils devront accueillir les élèves d’un secteur donné, sans conditions particulières.
  2. Ces élèves seront accueillis et suivis de façon individualisée. Le premier objectif est de les faire émerger de l’anonymat du groupe, pour qu’ils prennent chacun confiance en eux, en leur histoire, en leurs capacités. Chaque élève apprendra à exercer ses droits conformément à la convention internationale des droits de l’enfant.
  3. Les élèves devront, avec l’accompagnement d’adultes, construire des projets éventuellement transdisciplinaires qui pourront regrouper des élèves d’âges divers. C’est dans ces groupes qui seront valorisés en particulier les idées de solidarité et d’entraide et les pratiques de coopération
  4. La parole de tous les participants à la vie de l’établissement – élèves et adultes – devra être valorisée, écoutée, prise en compte dans l’organisation du travail. Des temps de rencontre et de débat collectif devront faire partie intégrante de l’emploi du temps.
  5. Chaque élève devra savoir se situer au niveau des apprentissages et pouvoir régulièrement mesurer les progrès accomplis en direction d’objectifs clairement identifiés.
  6. Les enseignants - et tous les personnels (administration, agents…) - doivent eux aussi être reconnus comme des adultes ayant une histoire et des compétences particulières. Le travail d’équipe doit permettre de valoriser ces savoirs et de donner à chacun une place dans le projet mis en œuvre collectivement.
  7. Le travail fait dans l’établissement est analysé et discuté par tous les partenaires dans le cadre des instances engagées dans la vie de l’établissement : parents, associations de quartier, élus, citoyens ayant la volonté de participer à la réflexion sur l’éducation des jeunes.
  8. Chaque élève doit faire l’objet d’évaluations régulières et les plus transparents possibles pour eux et leurs parents. Chaque établissement pionnier doit aussi être évalué par un organisme indépendant. Les critères d’évaluation feront bien sûr partie intégrante du débat sur les objectifs de toute structure " productrice d’humanité " .(…).

 


ANNEXE 4 : Lettre ouverte au nouveau ministre de l'Education par Gabriel COHN-BENDIT


Travailler autrement, c'est instaurer une véritable citoyenneté avec et pour les élèves ". Libération, 28.03.01

Gabriel Cohn-Bendit est retraité de l'Education nationale. Auteur de "Nous sommes en marche" Flammarion.
(…) Je fais partie, comme vous le savez, de la minorité réformatrice du corps enseignant. Que voulons-nous ? (…) Croire que, de son bureau de la rue de Grenelle, on imposerait de force à la majorité conservatrice du corps enseignant des réformes qu'elle récuse, tout en méprisant par ailleurs superbement les partisans des réformes parce qu'ils sont minoritaires, était une attitude suicidaire.
(…)
Ce que nous demandons, certains d'entre nous l'ont exprimé récemment dans "Halte au massacre des intelligences: manifeste pour une école créatrice d'humanité", initié par Marie-Danielle Pierrelée et que nous sommes déjà plusieurs milliers à avoir signé. Nous l'avions dit il y a quatre ans dans un texte collectif : "Volontaires pour travailler autrement à l'école" que Libération publiait le 27 février 96, signé entre autres par Antoine Prost, Louis Legrand, ancien conseiller d'Alain Savary, Marie-Danielle Pierrelée, quelques autres et moi-même. "Travailler autrement, disions-nous, c'est renoncer aux méthodes habituelles, inadaptées, à l'évidence, à la situation de certains établissements. C'est en inventer d'autres au sein d'équipes pédagogiques, comprenant l'ensemble du personnel (administration, enseignants, agents) et avec les élèves eux-mêmes... On ne sortira des situations de rapport de force et de violence, ni par de nouvelles barrières, ni par un pouvoir disciplinaire accru des chefs d'établissement, ni par l'augmentation du nombre de surveillants musclés, mais par l'instauration d'une véritable citoyenneté avec et pour les élèves."
Et dans ce texte nous déclinions ce "travailler autrement" qui remet en cause le service horaire des enseignants, car travailler autrement suppose de nombreuses heures de concertation, des réunions avec les élèves. Cela suppose aussi, entre autres, que les enseignants acceptent, comme le font les instituteurs d'être dans la cour au moment des récréations. Cette remise en cause du métier, du service de l'enseignant ne peut donc évidemment se faire que sur la base du volontariat.
"Responsabilité, autonomie, travail en équipe, volontariat autant de mesures qui ne pèsent pas sur le budget", écrivions-nous. J'affirme que pour aller mieux l'école n'a pas besoin de plus d'argent, mais de plus d'idées et surtout d'idées nouvelles et généreuses. Il faudra bien se rendre à l'évidence que si les savoirs à transmettre aujourd'hui ne sont plus les mêmes qu'au siècle dernier, que si dans nos sociétés plurielles ceux à qui il faut les transmettre ne sont plus les mêmes qu'il y a cinquante ans, les enseignants eux aussi doivent évoluer.
(…)
j'espère que vous trouverez un moment pour recevoir aussi les "pédagogos" que nous sommes, car nous avons encore des choses très concrètes à vous dire.

 


ANNEXE 5 :  La destruction de l’école élémentaire et ses penseurs, L.Lurçat.

page : 155
dans l'article "Psycho-Pédagogie" (p.823) Francine Best raconte comment la psycho-pédagogie, enseignée dans les écoles normales d'instituteurs après la deuxième guerre mondiale, a été mise en cause entre 1966 et 1973, dans des articles qui critiquaient "la collusion (sic) de la psychologie et de la pédagogie". "On ne trouve plus trace aujourd'hui de ce terme composite". "Car la sociologie de l'éducation est considérée à présent comme plus importante que la psychologie de l'enfant pour éclairer et rendre lucide toute action éducative".
Supprimer la psychologie pour la remplacer par la sociologie, cela implique que les personnes n'existent pas pour leur singularité mais seulement en tant que représentantes du groupe social auquel elles appartiennent. Ce sont des professeurs de philosophie qui enseignaient la psycho-pédagogie dans les écoles normales d'instituteurs. En supprimant la psycho-pédagogie on éliminait aussi la philosophie. Pour supprimer une discipline on décrète qu'elle n'existe pas, et on efface le mot. George Orwell écrivait (1984) : "Le but du novlangue était, non seulement de fournir un mode d'expression aux idées générales et aux habitudes mentales des dévots de l'angsoc, mais de rendre impossible tout autre mode de pensée. L'invention des mots nouveaux, l'élimination surtout des mots indésirables, (...) contribueraient à ce résultat."
page 156 : Dans son article "Sciences de l'éducation" (p. 899), Georges Vigarello donne de ces sciences la définition suivante : "Les sciences de l'éducation sont constituées par l'ensemble des références et des démarches scientifiques censées éclairer l'éducation. Dans un sens plus institutionnel, les sciences de l'éducation sont constituées par la discipline enseignée sous ce titre à l'université." (...) Le terme "sciences de l'éducation" au pluriel est adopté pour imaginer un cursus de licence universitaire en 1967.
Les sciences de l'éducation comprennent : 1) les sciences étudiant les phénomènes macro-éducatifs (démographiques, économiques, sociaux); 2) les sciences étudiant les phénomènes micro-éducatifs : psychologiques et biologiques; 3) la didactique des disciplines. Il dit encore : la discipline "sciences de l'éducation" existe parce qu'existent des pratiques censées en attendre précision et clarté. (Si la demande sociale définissait la science, l'astrologie et la cartomancie seraient des sciences).
A suivre les explications de Francine Best et de Vigarello, les sciences de l'éducation ont rejeté la psycho-pédagogie qui ne prétendait pas se substituer aux disciplines et qui mettait en avant la manière de transmettre. A présent, cette substitution est possible, on peut la noter dans les conceptions exprimées sur l'apprentissage et l'enseignement. La sociologie semble dominer les sciences de l'éducation.

 

 

 

 

06/2001

 


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