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Le scandale annoncé du bac de français

Ce texte est paru dans "Le Monde" du jeudi 05/04/2001.
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      La réforme du bac de français que le Ministère de l'Éducation nationale s'apprête à mettre en oeuvre est inacceptable. Ce projet marque à tous égards une considérable régression qui en fait le frère jumeau du brevet dont les épreuves indigentes et les consignes de notation avaient fait scandale l'an dernier. Alors qu'il faudrait relever le niveau du collège, ce projet prend acte de son affaiblissement pour réduire toutes les exigences du baccalauréat, et parachève un processus ancien de destruction des enseignements littéraires. Or comment ne pas voir que c'est ce processus lui-même qui a lentement conduit les élèves à une maîtrise de plus en plus faible de la langue ? Comment ne pas voir que c'est ce processus lui-même qu'il convient d'inverser, et non pas d'aggraver ?

      Nous refusons que les élèves aient à travailler sur " un corpus de textes et documents " fourre-tout qui court d'emblée le risque de l'incohérence et de la médiocrité. Pas une seule fois le mot de littérature n'apparaît dans le projet de cette nouvelle épreuve écrite où, dans l'hypothèse la meilleure, les textes littéraires seront, de manière inadmissible, assimilés à de simples documents. Nous refusons que l'enseignement des lettres recouvre désormais l'étude de toute sorte de documents iconographiques dont les plus intéressants relèvent d'une approche spécifique.
       Nous refusons qu'on se borne à poser aux futurs bacheliers - dans une première partie de l'épreuve notée de 6 à 8 points ! - des questions qui seulement " vérifient qu'ils ont pris connaissance de l'ensemble du corpus ", comme si toute ambition était désormais congédiée.
       Nous refusons que les deux exercices les plus littéraires - le commentaire et la dissertation - soient vidés de leur intérêt et ne constituent désormais que des épreuves au rabais.
       Nous refusons que le commentaire se réduise à " rendre compte de la lecture et à mettre en valeur la singularité du texte " proposé, et qui n'est pas même qualifié de littéraire.
       Nous refusons que la dissertation se limite à " composer une réflexion argumentée à partir d'une problématique fondée sur le corpus " : problématique fatalement non-littéraire, à l'image du corpus lui-même.
       Nous refusons " l'écriture d'invention ", exercice de collège qui par définition ne pourra faire pendant l'année l'objet d'aucune préparation donc d'aucune formation des esprits. Or tout porte à croire que cet exercice, pour lequel la notation ne pourra guère prendre en compte que la qualité de la langue, sera choisi par l'écrasante majorité des élèves.
       Nous refusons que l'oral ne soit plus une véritable étude de texte où peuvent être évaluées l'aptitude de l'élève à l'analyse et à la réflexion, ainsi que la netteté de l'expression, - et que l'exercice se borne au simple " examen " d'un texte que le candidat n'aura pas eu le loisir de lire longuement, et à un examen conduit en dix minutes !
      

       La voie qui s'impose est tout opposée. Il est indispensable que l'apprentissage de la langue et de la grammaire soit renforcé à l'école primaire ainsi qu'au collège, et que l'enseignement de la littérature soit reconstruit de la sixième à la première afin que les élèves acquièrent peu à peu une authentique culture littéraire que le baccalauréat évaluera.
       Il est indispensable qu'on cesse de faire passer la " réussite " de tous par le bradage des diplômes et l'abandon, pour le français comme pour les autres disciplines, de toute exigence de niveau. C'est donc l'esprit même des réformes qui est à reconsidérer. Le Ministre proclame que " chacun a droit à recevoir un enseignement de haute qualité " (Le Monde  du 9 novembre 2000) : nous demandons simplement que ses décisions soient conformes à cet engagement.

Association des Professeurs de Lettres
Reconstruire l'école : http://www.multimania.com/reconstrlecole/
Sauvegarde des Enseignements Littéraires : http://www.sel.asso.fr/
Sauver les lettres : http://www.sauv.net/

Télécharger ce texte : act_eaf.rtf


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Merci d'envoyer votre chèque, libellé à l'ordre de "Sauver les lettres", à l'adresse suivante :
Claude Ughetto
(SLL)
49, rue du Pré-au- Clerc
94370 Sucy-en-Brie

Au 08/06, nous avons recueilli 12430 francs.

04/2001


Sauver les lettres
www.sauv.net
 

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