Comité d'initiative et de suivi.
Kathleen Barbereau, Françoise Bouche, Michel Buttet, Fanny Capel, Pascal Clesse, Danielle Cosmao, Fanny Debat, Jean-Claude Denis, Julie Doyon, Nicolas Franck, Janine Moithy, Sarah Schidlower, Michel Sérac, Sophie Vige, Corine Vincent, Isabelle Voltaire, Nadine Wainer, instituteurs, professeurs et parents d'élèves.
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LETTRE OUVERTE À MM. LANG ET JOSPIN.


Nous, instituteurs et professeurs, parents d'élèves, citoyens préoccupés par l'avenir de l'École, constatons que, malgré toutes les protestations que vous disiez avoir entendues, vous persistez dans l'application de la réforme Allègre. Or cette réforme, engagée dès 1989 et poursuivie depuis lors, vise à modifier et à dénaturer radicalement la mission de l'École.

Nous dénonçons, à l'école élémentaire comme au collège et au lycée, les mêmes faits convergents :

  1. Les contenus des savoirs transmis sont considérablement appauvris par des amputations autoritaires des programmes. Ces mesures s'attaquent aux savoirs élémentaires, ou privent l'enseignement de toute cohérence. En français, l'orthographe et la grammaire ne sont plus enseignées méthodiquement. En histoire, la chronologie continue est abandonnée. A l'école primaire, la pédagogie officielle, sous prétexte de " transversalité ", exclut les exercices systématiques et le recours à la mémoire, et interdit donc les apprentissages fondamentaux. Cette pédagogie pénalise les enfants qui ont le plus besoin de l'école, ceux qui ne bénéficient d'aucune aide extérieure. Cet appauvrissement des savoirs transmis est camouflé par les prétentions démesurées affichées dans les nouveaux programmes, qui, au vu des réductions horaires dont souffrent peu ou prou toutes les disciplines, aboutissent à une simplification outrancière des connaissances, à la confusion et au survol.
  2. L'accent est mis sur des compétences étroites, non réflexives, vides de sens, axées sur la technique ou la communication : par exemple, en mathématiques, l'utilisation de machines se substitue à la pratique des opérations de base et à la démonstration logique. Partout, l'utilisation des ordinateurs devient une fin, et non un moyen de l'enseignement. Les salariés de demain, privés de connaissances universelles, seront vulnérables sur le marché du travail.
  3. Les savoirs transmis le sont à travers des prismes idéologiques qui empêchent les élèves d'accéder à l'autonomie intellectuelle. On parle aujourd'hui de philosophie ou de lettres " citoyennes ", fondées sur l'expression de l'opinion et non plus sur l'exercice du doute et de l'esprit critique. Ce catéchisme " citoyen " présent dans les programmes et dans les sujets proposés au baccalauréat porte atteinte à la laïcité. Nous considérons que l'instruction forme à elle seule le citoyen.
  4. Des méthodes pédagogiques dites nouvelles sont invoquées pour laisser l'élève " construire son savoir ", simplement " encadré " dans les divers modules, ateliers, ou travaux de groupe. Comment ne pas voir que cette prétendue autonomie livre l'élève au désarroi et à l'ignorance et permet de masquer de futures économies budgétaires, en supprimant des postes d'enseignants qualifiés ?
  5. Sous l'impulsion du Ministère, puis des rectorats, on voit se multiplier, à la place des cours où se transmettent les connaissances, des animations pseudo-pédagogiques au contenu flou et peu rigoureux. Ces activités, définies localement, viennent perturber et disloquer les classes, les emplois du temps, les programmes nationaux, la préparation des examens : " travaux personnels encadrés ", " itinéraires de découverte ", " projets pluridisciplinaires à caractère professionnel "… Outre les disparités croissantes qu'elles créent entre les établissements, ces activités amputent les horaires dans toutes les matières et menacent l'existence même de certaines disciplines comme les langues anciennes. On voit aussi apparaître dans les emplois du temps des élèves des pseudo-disciplines, mal définies (" éducation civique juridique et sociale "). Toutes ces nouveautés présentées à l'opinion publique comme séduisantes et modernes contribuent à créer dans l'école un désordre peu propice à l'apprentissage.
  6. Les nouvelles épreuves et modalités du brevet des collèges et du baccalauréat, sans exigences précises et comportant une part croissante de contrôle continu, ne permettent pas aux enseignants d'envisager une préparation cohérente, véritablement nationale, des élèves. Les épreuves actuelles du brevet et du baccalauréat, déjà scandaleusement simplifiées, permettant tous les truquages en matière d'évaluation du niveau des élèves, ont en retour un effet désastreux sur l'enseignement, et tendent à discréditer les diplômes.
  7. Dans une école ainsi transformée, les connaissances, n'étant plus prioritaires, sont sacrifiées jusque dans les nouveaux concours de recrutement des enseignants. Pour les futurs enseignants, avoir des lacunes dans une matière n'est plus considéré comme un handicap, mais comme un avantage qui leur permettra d'avoir le même regard que les élèves ! On comprend dès lors que dans les instituts universitaires de formation des maîtres il soit déjà expressément demandé aux stagiaires d'accepter que leur métier ne soit plus de transmettre des connaissances, mais de " socialiser " les enfants et d'en faire de " bons citoyens ".

LES SIGNATAIRES DE LA PRÉSENTE LETTRE N'ACCEPTENT PAS LE RENONCEMENT À LA MISSION FONDATRICE DE L'ÉCOLE : L'INSTRUCTION DISPENSÉE ÉGALEMENT À TOUS LES ENFANTS, INDÉPENDAMMENT DE LEUR ORIGINE SOCIALE ET CULTURELLE, DROIT FONDAMENTAL DES CITOYENS PROCLAMÉ PAR CONDORCET ET LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. Or, nous considérons que l'école telle que le gouvernement la réforme prive les élèves de ce droit. Dans une telle école, les élèves n'ont pas la possibilité d'acquérir une qualification et des diplômes qui leur permettent de trouver dans la société la place qu'ils ont choisie, ils n'ont pas la possibilité de fonder leur jugement de citoyen, de s'élever et de s'émanciper à titre individuel. Les signataires refusent que la " massification " de l'école serve d'alibi pour justifier l'obscurantisme, l'interdiction des savoirs. Ils réaffirment leur confiance en un enseignement exigeant et humaniste, plus que jamais nécessaire.

En conséquence, les signataires de la présente lettre s'adressent au Premier Ministre et au Ministre de l’éducation nationale. Fidèles à l'exigence de retrait de la réforme Allègre, constatant que la réforme Lang en est une continuation à peine déguisée, LES SIGNATAIRES EXIGENT L'ARRÊT DE L'APPLICATION DE TOUTES LES RÉFORMES ACTUELLEMENT ENGAGÉES À L'ÉCOLE PRIMAIRE, AU COLLÈGE ET AU LYCÉE ; ILS EXIGENT QUE SOIENT RÉ-INSTITUÉS CLAIREMENT LES PRINCIPES ET LES FINALITÉS DE L'ÉCOLE RAPPELÉS PLUS HAUT ; QUE SOIENT REPENSÉS LES HORAIRES, LES MÉTHODES, LES CONTENUS, SELON CES SEULS PRINCIPES.

Ils appellent les enseignants, en contresignant cet appel, à réaffirmer leur statut et leur fonction, qui consistent à enseigner aux enfants et aux adolescents toutes les connaissances nécessaires. Ils appellent également les intellectuels, les parents d'élèves, plus généralement les citoyens, à se mobiliser massivement pour imposer une école qui instruise.

Soyez assurés, Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre de l’éducation nationale, de notre entier dévouement à la cause de l'école.

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Puis renvoyez les signatures à Isabelle Voltaire, 401, rue du Général de Gaulle, 77390 Fouju.

12/10/2001