Pour une série littéraire véritablement littéraire
Assises des lettres : " Les humanités, pour quoi faire ? " Toulouse, 27-29 mai 2010.
Samedi 29 mai : Repenser enseignements et filières
15h30. ·Enseignement secondaire : les filières. Table Ronde
(modératrice : M.-J. Fourtanier)
Nadine Barrière,
IUFM de Midi-Pyrénées.
Catherine Bizot, IG
de Lettres.
Françoise
Guichard, « Sauver les Lettres ».
Marie-Hélène
Menaut, ancienne Présidente CNARELA, professeur au lycée
Montaigne de Bordeaux.
Romain Vignest,
Association des Professeurs de Lettres
Je voudrais tout d’abord remercier les organisateurs de ces Assises d’avoir invité le Collectif « Sauver Les Lettres » à débattre aujourd’hui des filières littéraires et de l’enseignement des lettres, parce qu’ils ont pris un risque, celui d’inviter un collectif militant, un collectif de militants : ces questions constituent, effectivement, un de nos chevaux de bataille. Depuis la création de notre Collectif, émanation des « comités anti-Allègre », dès l’année 2000, nous n’avons dévié ni de notre ligne ni de nos objectifs, qui sont de « sauver », certes, les lettres, mais dans une attitude offensive, c'est-à-dire de défendre et de promouvoir la littérature et les humanités.
Nous n’avons donc pas l’intention ce soir de « pleurer » ni de nous lamenter, mais de protester parfois, et de rappeler, même lourdement, quelques vérités qui risquent de ne pas plaire forcément à tout le monde. Je ne suis pas exactement venue avec un cocktail Molotov, mais, puisque « nous sommes les mains dans le cambouis », comme le remarquait ce matin M. Ripoll, je vais donc parler… du cambouis.
Lorsque l’on m’a demandé, à l’automne dernier, quel serait le titre de mon intervention, j’ai répondu, un peu au débotté : « pour une série littéraire véritablement littéraire » ; puis j’ai vaguement regretté cet intitulé, peut-être trop violent, et qui semblait insinuer que la série littéraire ne serait pas (ou plus) véritablement littéraire au sens, par exemple, que les arts y tiendraient trop de place. Ce n’est évidemment pas ce que je voulais dire. L’idée du collectif SLL, pour lequel je m’exprime aujourd’hui, c’est que la crise de la filière littéraire ne peut être réglée qu’en lui restituant toutes ses spécificités littéraires et même en les renforçant.
De quoi la série L souffre-t-elle ? On l’a dit -- et c’est un point largement développé par exemple dans un célèbre rapport de l’Inspection Générale [1] auquel Mme Bizot a participé, rapport destiné à « l’évaluation des mesures prises pour revaloriser la filière littéraire au lycée » -- elle pâtit d’abord d’un effondrement de ses effectifs (de 24 % des lycéens en 1972 à environ 10 % actuellement), effondrement plus ou moins lié à un déficit d’image : filière choisie par défaut (surtout par des jeunes filles) et peuplée, surtout dans les options Arts, d’élèves « folkloriques » et même éventuellement de joyeux fumistes peu enclins au travail : voilà la caricature du littéraire… Ajoutons à cela que les collègues de langues anciennes observent de plus en plus que leurs meilleurs latinistes et/ou hellénistes sont des scientifiques, et le tableau semble définitivement noir : la filière L serait condamnée à court terme, et notre combat, bien qu’héroïque comme il se doit, d’ores et déjà perdu.
Je ne vais pas vous jouer les Cyrano (« C’est encore plus beau lorsque c’est inutile… »), mais je vais tenter, pendant ces quelques minutes, de montrer POURQUOI on en est arrivé là et COMMENT il est encore possible, avec une volonté politique, disciplinaire, pédagogique et administrative, de sortir de cette situation apparemment bien compromise.
POURQUOI Y A-T-IL DE MOINS EN MOINS D’ÉLÈVES EN FILIÈRE L ?
Ce n’est pas fondamentalement pour une question de débouchés ; ces débouchés existent, on l’a vu, y compris ici dans le cadre de ces Assises [2].
En fait, il y a de moins en moins d’élèves en filière littéraire parce qu’il y a de moins en moins de littéraires. Car, -- à moins de croire à l’innéité des aptitudes et des appétences – on ne naît pas littéraire, on le devient. Peut-être naît-on sensible, avec l’oreille absolue ou le geste sûr, mais un « profil littéraire », susceptible à la fois de bien réussir et de s’épanouir dans la filière, c’est quelque chose qui se construit, bref, quelque chose de culturel.
C’est quelque chose qui se construit, certes, dans la famille [3] mais aussi à l’école, et ce dès le primaire. Et c’est là que le bât blesse : il y a de moins en moins d’élèves à profil littéraire parce que l’enseignement du français, des lettres, des langues anciennes et des humanités en général a été littéralement saboté depuis des années.
Je ne dis pas qu’il existe un « complot » ourdi par les forces du Mal (les scientifiques, les économistes, Ph. Meirieu, l’Europe, le grand capital international… quoique… ;-) ) pour anéantir les filières littéraires. Il n’y a pas de « plan concerté »… mais c’est peut-être pire : toute une succession de mesures aveugles ou à courte vue, inappropriées, bêtement gestionnaires, ont abouti à faire en sorte que non seulement les lycéens ne voient plus l’intérêt de la filière L, mais encore que les rares impétrants n’ont plus guère les aptitudes pour y suivre et y réussir.
C’est donc en amont qu’il faut regarder, dès le collège et dès l’école primaire, c'est-à-dire là où se forme le rapport à la lecture, à l’écrit, aux textes, au langage, et par conséquent à la littérature.
On a assisté depuis des années, et plus encore à partir de la mise en place des programmes Viala (dont le collectif SLL observe avec une certaine satisfaction la disparition) à ce que l’on pourrait appeler l’abandon de l’enseignement du français.
Tout est parti de l’idée selon laquelle le français ne conviendrait plus aux lycéens d’aujourd’hui et aux « nouveaux publics », dépourvus d’une « connivence importante avec les œuvres et les textes patrimoniaux » et d’une « bonne maîtrise de la langue » -- On pourrait tout aussi bien dire que les mathématiques sont nocives faute d’être en connivence avec les théorèmes patrimoniaux de Pythagore, de Thalès, ou de Fermat puisque nous sommes à Toulouse … Bon passons.
Résultat des opérations : un enseignement du français qui a méprisé la maîtrise de la langue et débouché sur ces fameux programmes « genres et registres » nuisibles au goût pour la littérature. En quelques années, l’enseignement du français a été sacrifié et détruit. Le rapport de l’Inspection Générale auquel je faisais allusion il y a quelque minutes, déplore justement, je le cite, « le niveau socioculturel et linguistique des adolescents ». Mais n’était-ce pas justement à l’Ecole de le leur fournir, au lieu de le leur refuser de fait, quelles qu’aient été par ailleurs les bonnes intentions d’Alain Viala et de son équipe – bonnes intentions dont l’Enfer est pavé ! Si l’Ecole n’instruit plus, mais seulement les familles, elle contribue à reproduire et à perpétuer toutes les inégalités sociales et culturelles.
Alors oui, les lycéens de L ont bien des lacunes : mais ils n’en sont pas responsables. On ne peut savoir que ce qu’on vous a enseigné ; comme le lycéen lambda ne comprend plus spontanément les textes littéraires (ni même parfois le moindre texte d’actualité contemporain un peu pointu), la filière L se vide faute d’élèves compétents [4] … Même si l’on en revient vaguement, la maîtrise de la langue a été, toutes ces années, rangée au rayon des souvenirs, et ce dès les petites classes, où les méthodes les plus hasardeuses, prétendant se fonder sur le constructivisme [5] en gage de scientificité, ont fait de tels dégâts qu’on n’est plus étonné de voir un élève de 1ere, et même parfois un hypokhâgneux, ânonner en lisant à haute voix, et buter sur les mots… [6]
De même, l’enseignement systématique de la grammaire a été remplacé par l’observation réfléchie de la langue, l’ORL, comme si l’élève, tel Pascal redécouvrant tout seul la géométrie euclidienne, était capable de réinventer sua sponte l’accord des participes passés et la conjugaison du passé simple… Les écoliers, puis les collégiens, n’ont plus été mis en état de s’approprier leur langue et ses mécanismes. Et jetons un voile pudique sur le refus quasi constant d’enseigner l’orthographe, sur celui, tout aussi délibéré, de recourir à la dictée, même comme exercice de langue. Bref, comment veut-on qu’un texte ait un sens et ses mots un rapport logique, quand, depuis le primaire, le malheureux élève n’a jamais appris à maîtriser les accords ni les conjugaisons ?
Le « décloisonnement » porte également sa part de responsabilités : en interdisant la pratique d ’un cours de grammaire autonome et progressif, indépendant de l’étude des textes, il a laissé les apprentissages linguistiques se faire au petit bonheur, au hasard des « rencontres » avec tel ou tel texte – et au hasard de la répétition (ou de la non-répétition) de la rencontre avec ces faits de langue. En somme, rien, n’est jamais vraiment nommé, ni expliqué.
Ajoutons également la baisse régulière des contenus réellement enseignés, et celle des exigences, considérées comme cruellement « élitistes » dès qu’elles diffuseraient des connaissances. Et le « socle commun » vient couronner le tout : le BOEN d’avril 2007, qui en définit les exigences pour le primaire, en supprime l’apprentissage du conditionnel et du subjonctif, sans doute jugés trop difficiles pour les petites têtes brunes rousses et blondes des « nouveaux publics »…
En somme, comment voulez-vous que les élèves des filières L ne soient pas hétérogènes (doux euphémisme) dans leur maîtrise de la langue, à partir du moment où tout s’est mis en place pour les empêcher de l’acquérir ?
Le coup de grâce à l’enseignement du français a été donné par les programmes « genres et registres », dits « Programmes Viala », enfin passés à la trappe (mieux vaut tard que jamais…), mais qui pendant dix ans ont, pour nombre de lycéens, surtout les moins soutenus par leur milieu, rendu opaque l’étude du français, quand ils ne les en ont pas carrément dégoûtés.
En prônant une approche purement technique de la littérature, ces programmes ont détruit chez beaucoup de lycéens jusqu’à l’envie de lire : omniprésence des « genres et registres », tout-argumentatif, absence de l’histoire littéraire… tout ceci donne des élèves à la fois privés de tout repère et submergés de catégories orientant la « lecture » de textes qu’ils ne comprennent même plus, faute de maîtrise linguistique et historique. Dans ces conditions, développer des aptitudes littéraires relève carrément de la « mission impossible » et des « coulisses de l’exploit ».
Certes, ces programmes sont aujourd’hui relégués aux oubliettes, la tendance s’inverse et c’est un point positif : personne à SLL ne versera une larme sur eux ! Mais la tendance qui ne s’inverse pas, c’est celle de la baisse des horaires : un lycéen qui entre aujourd’hui en seconde a reçu, depuis les débuts de sa scolarité en primaire, 800 heures de français en moins que son homologue de 1976 [7] ; autrement dit, il entre au lycée avec le niveau de fin de 5eme de son père !! En une génération, un enseignement a été sacrifié ! Et la réforme Chatel du lycée ne fait qu’aggraver la situation : elle retire de fait aux lycéens de seconde 1 h 30 de français par semaine (30 mn de demi-groupe-module et 1 h d’aide individualisée) et aux lycéens de Terminale L la moitié de leur horaire hebdomadaire (2 h au lieu de 4 h). La perte totale d’horaires de français en trois ans de cursus littéraire au lycée atteindra 126 heures… Et ce n’est certainement pas le malheureux enseignement d’exploration « littérature et société » qui va compenser ces pertes… Comment, dans ces conditions, parler de revalorisation de la série L, même avec de meilleurs programmes ? C’est une plaisanterie !
ALORS … QUE FAIRE ?
« Les fossoyeurs de l’instruction formulent toujours à leurs détracteurs une demande de propositions, comme si leurs opposants leur devaient réparation d’un désastre dans lequel ils ne sont pour rien, comme si les responsables ministériels n’étaient pas eux-mêmes à l’origine d’une destruction qu’aucun professeur ne leur a réclamée » [8].
On se pliera ici à l’exercice, non pour eux mais pour les collègues, pour les élèves, par égard envers les organisateurs qui nous ont eu l’amabilité de nous inviter, et, si je puis oser le clin d’œil, pour l’amour des Humanités…
Le collectif Sauver les Lettres entend donc se placer dans une optique positive de maintien pour le second cycle d’un enseignement formateur et exigeant, que n’appellent « élitiste » que ceux qui refusent de le transmettre et de développer les aptitudes de tous les élèves.
On s’appuiera sur la valeur inégalée des disciplines pour transmettre aux lycéens des « bases » solides, un patrimoine commun de connaissances étayées, éprouvées et organisées et de savoirs créateurs à la portée universelle, vivifiés par une intelligence critique. Ne condamnent l’approche « patrimoniale » que ceux qui ont eu la chance de tomber dans ce patrimoine quand ils étaient petits…
C’est dire que « la conviction et le constat quotidien, par la pratique des classes, que les études littéraires intéressent les élèves et sont favorables à leur avenir professionnel et personnel [9] », animent ces propositions, qui sont, je le rappelle, le fruit de la réflexion du Collectif.
DES MESURES DE RÉPARATION
Il ne faut toucher à la filière qu’aux marges, car une série L bien administrée pourrait contrecarrer la fonte de ses effectifs, comme le montrent tous les exemples d’établissements qui ont eu la volonté de la faire fonctionner et ont obtenu des résultats et des effectifs suffisants.
Le ministère aurait dû prendre des mesures pour permettre un choix et une réussite véritables des études littéraires et de la filière L de lycée. Ces mesures nécessiteraient une volonté politique, disciplinaire, pédagogique et administrative, ce qui signifie évidemment qu’il faut sortir des logiques purement comptables qui semblent, plus que jamais, celles qui nous gouvernent.
NOS PROPOSITIONS :
1. UNE VOLONTÉ POLITIQUE
LE RÉTABLISSEMENT DES HORAIRES DE FRANÇAIS, DÈS L’ÉCOLE PRIMAIRE ET LE COLLÈGE.
Les horaires considérés jusqu’en 1969 nécessaires à un apprentissage et à une pratique indispensables du français doivent être rétablis, comme le demande l’Appel pour le rétablissement des horaires de français [10].
L’ARRÊT DES SUPPRESSIONS D’OPTIONS.
Le ministère doit ouvrir ou rouvrir tous les enseignements optionnels qui pour la série jouent le rôle de colonne vertébrale et constituent des « choix obligatoires ». Il faut rouvrir ou maintenir les enseignements d’arts, de mathématiques, de langue vivante 3, de latin, de grec. M. Carrière demandait ce matin où étaient les professeurs de lettres classiques des collèges… La réponse est simple : leurs postes sont massivement supprimés. Actuellement, la plupart des collègues de lettres classiques qui partent à la retraite voient disparaître leur poste, purement et simplement.
Chaque lycée doit présenter les enseignements prévus par les textes officiels et promis aux élèves par les documents ONISEP. Les rectorats ne pourront leur opposer un effectif insuffisant, tant que les conditions pour réunir un effectif complet (cf. suite) n’auront pas été réunies. En effet, la « rareté » de certaines options n’est pas une cause, mais un résultat.
LE RESPECT DES TEXTES OFFICIELS
Les rectorats doivent respecter les textes et circulaires qui régissent l’enseignement en L, et ne pas les négliger sous prétexte qu’ils concernent la série littéraire. Par exemple, la circulaire du 16 décembre 2004 prescrivant l’ouverture de sections de langues anciennes pour ne pas rompre la continuité collège/lycée doit être mise en application. De même, la continuité de l’enseignement du latin au collège (prévue par le BO 3 de janvier 2000 [11]) doit êtrerespectée.
L’ABROGATION DES TEXTES LIMITANT L’ACCÈS À DES ENSEIGNEMENTS PRÉVUS PAR LES TEXTES OFFICIELS
Tous les textes, décrets ou circulaires, en contradiction ou en opposition avec les enseignements littéraires doivent être corrigés ou abrogés (par exemple l’interdiction du latin aux classes CHAM [12]
LA PRIORITÉ DES ENSEIGNEMENTS DISCIPLINAIRES SUR LES DISPOSITIFS INTERDISCIPLINAIRES
Les horaires affectés aux « thèmes de convergence » ou« itinéraires de découverte » en collège ou à la « découverte professionnelle » de troisième, ou autres trouvailles du même genre, ne peuvent servir de prétexte à la suppression de poursuite ou de choix d’un enseignement disciplinaire, en général le latin et le grec.
LA PRIORITÉ DES ENSEIGNEMENTS DISCIPLINAIRES SUR LES DISPOSITIFS DIVERS VOTÉS DANS LE CADRE DE L’AUTONOMIE (décision d’ouverture de tel ou tel dispositif choisi par les CA, notamment en collège).
Tous les projets qui nuisent aux enseignements dispensés ou conduisent à leur désaffection ne seront pas autorisés dans le cadre scolaire
2. UNE VOLONTÉ DISCIPLINAIRE ET PÉDAGOGIQUE
DE MEILLEURS PROGRAMMES DE FRANÇAIS EN COLLÈGE ET LYCÉE.
Les dernières propositions ne sont qu’une avancée, mais condamnée d’avance par la baisse des horaires. Le ministère doit opter pour des programmes fondés sur le contenu, adapté à chaque cycle, de la matière : maîtrise de la langue et connaissance des œuvres (voir par exemple sur le site de SLL notre Projet de programme de français - seconde et première, http://www.sauv.net/projetproglycee.php).
UNE FILIÈRE S VRAIMENT MATHÉMATIQUE.
Pour éviter que des littéraires ne s’engagent dans la filière scientifique, il faut bien évidemment que celle-ci le soit vraiment. Un renforcement des mathématiques en S, en horaire et en contenu (et non pas l’optionnalisation de l’histoire-géographie…), remédierait à l’absence de goût de bien des élèves de S pour les sciences, et permettraitd’orienter intelligemment les élèves sans les faire se précipiter dans cette série S devenue invertébrée par la force des choses … et des dérives. Si le fonctionnement de L n’est pas satisfaisant dans le second cycle, celui de S lui donne aisément la réplique pour le supérieur. Il faut donc envisager conjointement l’avenir des deux séries.
UNE FILIÈRE L AFFIRMÉE ET DIVERSIFIÉE, AVEC UNE TROISIÈME MATIÈRE VALORISÉE ET BIEN COEFFICIENTÉE
Tous les établissements dont les classes de L fonctionnent bien sont ceux où une politique volontariste d’affirmation d’un ou plusieursenseignements spécifiques ont permis d’avoir dans cette série une structure équivalente à celle de la série scientifique, en faisant bénéficier les élèves d’UNE troisième matière forte en dehors du français et de la philosophie, sur le modèle du triptyque de S mathématiques/ physique/ SVT, bien coefficienté à l’examen, et sur le modèle de la série A antérieure, valorisée soit en langues, soit en mathématiques, soit en arts.
UNE FILIÈRE OPTIONNELLE « LANGUE EUROPÉENNE »
La série L est la seule où les élèves de « sections européennes » peuvent valoriser en coefficients importants l’enseignement reçu, au lieu de devoir se contenter comme dans les séries ES et S soit d’un faible coefficient, soit de la simple « mention européenne » indiquée sur le relevé de bac. Il faut donc ouvrir le plus possible ces sections dans les lycées et faire valoir la formation linguistique qu’elles donnent, en contrecarrant l’effet catastrophique des baisses d’horaires en langues (que les « groupes de compétence » semblent n’avoir que peu de chances de pallier) , et en équilibrant les coefficients importants de la philosophie (7) et du français (9) par un coefficient de 8 (épreuves de LV1 et de langue de complément) complété par un coefficient 2 pour les points au-dessus de 10 offerts par l’épreuve orale de DNL (discipline non-linguistique). Tous les reproches indus de trop grandes exigence et discrimination faits au français et à la philosophie tombent d’eux-mêmes, dès lors qu’on établit une troisième discipline répartie sur trois épreuves.
UNE VRAIE FILIÈRE OPTIONNELLE " MATHÉMATIQUES "
La reconstruction est simple : une vraie « spécialité mathématiques » partout, ce qui suppose de redensifier le programme puisque les élèves qui choisissent les mathématiques sont bien évidemment de bon niveau dans la matière, et de lui donner soit le coefficient 4 qu’elle avait avant les mesures erratiques de 1999-2003, soit le coefficient 6 accordé aux arts. Additionné au coefficient 2 des mathématiques-informatique obligatoire, le coefficient de la matière atteindrait ainsi 6 ou 8, ce qui lui donnerait lestatut de troisième discipline " forte " de la série, et l’équivaudrait à celui de la langue " européenne " ou à celui des arts.
UNE FILIÈRE OPTIONNELLE « ARTS »
Les filières arts plastiques, histoire des arts, théâtre, cinéma sont bien connues. En général leur existence assure effectifs et pérennité aux classes de L dans les lycées où elles figurent. Il faut donc lesfaire connaître davantage, et interdire aux rectorats de les fermer. Leur coefficient 6 fondé sur deux épreuves permet à ces matières d’être la troisième discipline forte de leur série. Avec les « arts « en option facultative, il peut être de 8
UNE FILIÈRE OPTIONNELLE " LETTRES CLASSIQUES "
Les deux langues latin et grec seront offertes dans cette filière optionnelle, à raison d’un coefficient 4 pour chacune de ceslangues. Leurs coefficients cumulés donneront le coefficient de 8, semblable à celui de la « langue européenne ». Sur le modèle des « arts » ou de la « langue européenne » qui peuvent bénéficier de trois épreuves, une épreuve facultative de traduction pourrait avoir le coefficient 2.
3. UNE VOLONTÉ ADMINISTRATIVE.
LA CLASSE DE SECONDE.
Elle sera organisée de façon à permettre aux élèves un choix motivé de l’une ou l’autre des filières générales, en enseignant suffisamment d’éléments significatifs des matières principales de chaque série.
Dans cette optique, le français et les mathématiques seront renforcés chacun dans leurs programmes et dans leur horaire, à raison d’une heure hebdomadaire supplémentaire, en intégrant dans l’horaire l’heure d’aide individualisée actuelle de leur discipline afin que l’une et l’autre de ces matières soient assez discriminantes pour faire choisir soit L, soit S en connaissance de cause. La série S y gagnerait d’avoir de meilleurs scientifiques, plus motivés par leur spécialité.
Cette classe devra comporter des matières d’appel de chaque série. Les sciences physiques et de la terre obligatoires jouent cerôle pour S, l’option SES pour ES. Une langue ancienne, latin ou grec, sera la matière d’appel de L, obligatoire en Première. Car le profil actuel de L est trop optionnel pour résister à la pression administrative et gestionnaire, avide de supprimer toute classe dite « à faibles effectifs ». La langue ancienne pourra être soit continuée du collège, soit enseignée en grand débutant.
La langue ancienne serait un complément de formation pour la filière « mathématiques », un complément de culture générale pour la filière « arts », et le complément de langue de culture pour la filière « langue européenne ». Cette langue ancienne obligatoire sera en harmonie avec la réforme des CPGE littéraires [13], qu’elle rendra parallèle à l’organisation des CPGE scientifiques, dont toutes les matières sont représentées dans les enseignements obligatoires du second cycle.
ECJS et TPE
Pour libérer des heures, les emplois du temps et les locaux, l’ECJS en seconde, l’ECJS et les TPE en 1ere seraient supprimés, la LV2 étant incluse dans les enseignements obligatoires.
LES CLASSES EUROPÉENNES, LES ARTS ET LES LV garderaient l’organisation qui était la leur avant la réforme Chatel. La langue ancienne deviendrait une matière facultative en S et en ES. L’aide individualisée serait facultative.
Par ailleurs, une présentation de la PHILOSOPHIE pourrait avoir lieu au cours de l’année de 1ere, en utilisant une partie des dix heures de « vie de classe ».
Nous voudrions enfin insister sur le caractère nécessaire d’un certain nombre de mesures qui, en collège comme en lycée, ne coûteraient pas grand-chose et donneraient un peu d’oxygène à nos enseignements : dans les emplois du temps, des créneaux horaires corrects pour les langues anciennes, qu’il ne faudrait plus voir reléguées le vendredi à 17 h ou entre midi et deux à l’heure de la cantine. Une facilitation, comme disent les khuistres (j’adore « facilitation ») des voyages scolaires en Grèce et en Italie, quand trop de chefs d’établissement ou d’intendants mettent des bâtons dans les roues aux collègues qui les organisent. Arrêter d’imposer des regroupements acrobatiques entre seconde, premières, terminales, débutants, confirmés : la pédagogie différenciée a tout de même ses limites !... Bref, ne plus considérer les Humanités comme le parent pauvre de l’établissement.
C’est dire – et ce sera le mot de la fin – que le collectif SLL, tout en prenant acte d’un mieux pour ce qui concerne les nouveaux programmes de français, ne se satisfait aucunement de la réforme Chatel des lycées, et tiendra toute sa place dans la protestation qui ne manquera pas, du moins nous l’espérons, de s’organiser sous peu.
Françoise
Guichard
Collectif
« Sauver les lettres »
2. Je ne vais pas répéter tout ce qui a été dit sur les IEP, les concours littéraires des écoles de management ou les écoles d’interprétariat.
3. Je vais également vous épargner le traditionnel couplet sur les « héritiers » dont les parents possèdent à la fois du langage et une bibliothèque... Il est parfaitement pertinent.
4. … et les IUT ou grandes écoles scientifiques instaurent des cours de remédiation en orthographe ou en grammaire, et font passer la « certification Voltaire »
5. Afin de gagner un peu de temps, je vais me dispenser d’attaquer plus longuement le constructivisme, d’autant qu’il a été, m’a-t-on rapporté, fort bien descendu hier par l’un des intervenants – grâces lui soient rendues.
6. Seraient-ils d’anciens écoliers de la semi-globale « à hypothèses » ???
7. Voir http://www.sauv.net/horaires.php et http://www.sauv.net/horcomp.php
8. Agnès Joste, «Contre-rapport sur la filière littéraire », http://www.sauv.net/filiereLcr.php
9. Ibid.
10. http://www.sauv.net/horaires.php En 1998, Jean Ferrier, Inspecteur Général, publiait un rapport, « Améliorer les performances de l’école primaire » qui indiquait : « la qualité des apprentissages et les progrès des élèves sont en relation directe avec le temps consacré aux apprentissages, diverses études en attestenten France et à l’étranger »
13. Depuis la réforme de 2007, tous les élèves d’hypokhâgne, y compris les HK Lyon, suivent un enseignement obligatoire de langue ancienne, à raison de 3 heures au minimum par semaine : 2 heures de langue minimum + 1 heure de culture antique.