Lettre à l'inspection sur l'évaluation de seconde


Les enseignants de Lettres
du Lycée Martin Luther King
Bussy-Saint-Georges

          A Madame L'inspectrice de Lettres
          sous couvert de Madame Le Proviseur
          Bussy, le 4 octobre 2001

 

Madame L'Inspectrice,

Nous tenons à vous faire part des différentes préoccupations de l'équipe de Lettres du lycée.

Tout d'abord, nous vous informons que nous avons, d'un commun accord, décidé de ne pas faire passer cette année l'épreuve d'évaluation qui nous a semblé particulièrement critiquable et tout à fait incohérente.

Il y a en effet incohérence dans la première partie entre les questions d'observation du corpus de textes et les questions d'interprétation. Les premières sont soit ridiculement simples, demandant aux élèves d'effectuer des prélèvements ponctuels, en dehors de tout rapport au sens du texte, et faisant appel à des notions supposées maîtrisées depuis longtemps comme, par exemple, la question c (Relevez un pronom personnel…) ou encore la question d (Repérez le temps verbal dominant.), soit trop guidées (Repérez les connecteurs dans les parties grisées.). Les secondes sont trop vagues, invitant à une analyse impressionniste et psychologisante qui ne peut s'appuyer ni sur des indices précis ni sur l'observation de l'écriture. Ne parlons pas de la difficulté à évaluer ce genre de réponses, ce qui est en parfaite contradiction avec la fonction même de l'évaluation.

L'exercice d'écriture lui aussi présente une contradiction entre une forme accrocheuse, démagogique et infantilisante et des consignes beaucoup trop contraignantes faisant appel à des procédés méconnus des élèves (utiliser une anaphore…) qui stérilisent complètement l'expression des idées, d'autres ridicules, (terminer par un refrain…, utiliser un français courant…) avec le risque de dériver vers une langue parlée. D'autres, enfin, sont trop difficiles comme le point 4 qui demande un discours humoristique. Bref, un ensemble complètement incohérent et inquiétant quant à l'idée que se font les auteurs de l'exercice sur le processus de création. Notons encore une contradiction entre les deux parties de l'évaluation, un questionnement très vague ne faisant jamais appel à des procédés d'écriture alors que la seconde partie invite à les utiliser !

Cette évaluation nous a semblé fausser en début de seconde la représentation que l'élève pourrait se faire de notre discipline, en lui donnant l'illusion que le français est une matière peu rigoureuse et surtout, - nous insisterons sur ce point -, incohérente dans ses exigences.

C'est d'ailleurs la même impression d'incohérence qui se dégage des textes officiels définissant la nouvelle épreuve anticipée de français.

Nous ne parlerons pas de la date tardive à laquelle, malgré nos demandes réitérées, ces textes ont été publiés. Nous déplorons de devoir attendre si longtemps les annales zéro qui nous permettraient de mieux cerner les différents sujets et en particulier le sujet 3 à propos duquel nous sont proposées (Annales Hatier, manuels scolaires) des épreuves apparemment non conformes aux instructions.

En ce qui concerne l'écrit, - sans revenir sur le sujet 3 auquel, vous le savez, les enseignants sont majoritairement hostiles -, nous critiquons la longueur des questions générant un problème de gestion du temps au détriment de la qualité de l'écriture, ce qui peut inciter les élèves à se détourner des exercices longs comme le commentaire ou la dissertation. Serait-ce le but poursuivi ?

En ce qui concerne l'oral, nous sommes dans l'angoisse la plus absolue devant le flou complet des textes sur la première partie de l'épreuve qui prévoit de laisser l'examinateur choisir dans le descriptif d'activités entre un texte travaillé en classe et un texte simplement lu en lecture cursive. Nous partageons tout à fait l'analyse de Jacques Vassevière (Ecole des Lettres, Août 2001, photocopie jointe). Les questions qu'il pose correspondent complètement à nos préoccupations et nous vous demandons instamment d'y apporter des réponses claires.

L'épreuve tant écrite qu'orale pose de graves problèmes qui inquiètent tant les professeurs que les élèves. Le risque d'injustices, d'inégalités entre les élèves est accru et la suppression du jury de français, à cet égard, est particulièrement répréhensible.

A l'écrit, quels seront les critères d'évaluation du sujet 3 ? Ne risque-t-on pas de privilégier des critères formels au détriment du contenu ? Faussement attractif, ce sujet peut lourdement pénaliser les élèves qui n'en verront pas la difficulté.

L'oral, en laissant une trop grande liberté à l'examinateur dans le choix des textes et de la question posée, présente des risques de dérive et, répétons-le, accentue les inégalités entre les candidats.

Nous sommes très demandeurs d'informations précises et complémentaires. Dans l'intérêt de nos élèves, nous souhaiterions que vous organisiez et présidiez une réunion inter établissements le plus rapidement possible.

Nous vous prions d'agréer, Madame L'Inspectrice, l'expression de nos sentiments respectueux et dévoués.

 

L'équipe de Lettres