La mise en oeuvre du plan de prévention de l'illettrisme au cours préparatoire en 2003-2004
À lire sur le site du ministère (rapports de l'IGEN http://www.education.gouv.fr/syst/igen/rapports.htm) le rapport ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/syst/igen/rapports/plan_illetrisme_CP.pdf (mai 2004, 116 ko) dont vous trouverez ci-dessous quelques extraits. [pp. 9 - 10] Les problèmes de la conscience phonique Il est désormais clair pour les chercheurs que l'accès à la lecture passe par le développement de la conscience que l'énoncé peut être décomposé en unités sonores non significatives. Cela suppose que le travail sur l'assemblage de la syllabe écrite, caractéristique des méthodes traditionnelles (qui commencent au b, a, ba), soit précédé d'une phase où l’élève apprend à reconnaître dans les énoncés oraux les unités sonores qui les constituent. Les premières méthodes publiées dans le commerce qui ont présenté des exercices de ce type sont relativement récentes. Pour la langue française, elles apparaissent dans les années 1970 d’abord au Canada et en Belgique, plus tardivement en France : la première méthode française systématisant cet abord est élaborée par Charles Touyarot en 1975 sous le titre J’aime lire (Nathan). Ces méthodes se caractérisent par la distinction entre des activités d’audition (J’entends) et des activités de reconnaissance visuelle (Je vois). Elles sont à la base de leçons récurrentes mais non systématiques pendant lesquelles on aborde, dans un ordre très variable, les phonèmes de la langue française mais aussi les graphies spécifiques (la progression va d’une réalité à l’autre). En fait, la conscience phonique, qui doit se travailler à l’école maternelle, se fonde sur un travail systématique de la syllabe plutôt que du phonème. Les recherches actuelles montrent en effet que l’épellation phonologique est une conséquence, plutôt qu’un pré-requis, de l’apprentissage de la lecture. En revanche, elles insistent toutes sur le nécessaire travail oral de la syllabe (reconnaissance de syllabes en différentes positions, combinaisons de syllabes pour reconstruire un mot, recherche de mots contenant une syllabe donnée, interposition de syllabes dans un mot donné, soustraction de syllabes dans un mot donné, etc.). La construction du principe alphabétique L’opacité de l'écriture du français, dans lequel la relation entre graphèmes et phonèmes n'est pas univoque, suppose de la part de l’élève un réel effort de compréhension et de mémorisation. Elle handicape fortement les élèves ayant des troubles dyslexiques. Il est donc essentiel d’y consacrer le temps nécessaire pour que chacun comprenne que, dans notre système alphabétique, ce sont les phonèmes qui sont codés par des signes écrits, simples ou complexes, dont la valeur peut changer en fonction du contexte. Il appartient à la grande section et au CP de construire ce principe. La phonétique et le déchiffrage Bien des maîtres n'ont pas réellement intégré l'approche recommandée par les programmes de 2002. L’observation de la compétence phonologique des élèves menée pendant nos visites montre la très grande hétérogénéité des compétences acquises à l’entrée du CP et l’articulation insuffisante entre le travail fait d'une part en maternelle, d'autre part au début du cours préparatoire. La découverte de la liaison phonème / graphème n'occupe toujours pas la place nécessaire. Dans bien des cas, on s'attache à travailler sur des albums, qu'il s'agisse de méthodes de lecture constituées d'une série de petits albums écrits à cette fin, ou d'albums de littérature de jeunesse. Le plus souvent, et notamment dans les albums de littérature de jeunesse, les mots rencontrés obéissent aux contraintes du récit et du style de l’auteur et ne se prêtent pas à une progression structurée des sons étudiés. Les observateurs ont pu assister dans la très grande majorité des CP à des séances associant, comme il se doit, reconnaissance de sons, discrimination visuelle de lettres et lecture à haute voix par déchiffrage. Toutefois, quelques classes ont laissé transparaître des failles importantes dans l'un ou l'autre domaine, sans qu'il soit toujours possible de dire s'il s'agissait là d'une constante de la classe ou d'une démarche adoptée pendant les moments où la classe bénéficie d'un soutien. L’écriture L'apprentissage de l'écriture est apparu très généralement insuffisant et trop souvent indépendant de la lecture, évoquant davantage, comme on l'a déjà souligné, la calligraphie qu'un travail de fixation des relations graphèmes-phonèmes. La copie et la dictée de mots et de syllabes demeurent aussi rares dans les classes que l’écriture inventée (recherche de la manière de coder un mot), qui constitue pourtant un moment intéressant de réflexion sur la langue. Les maîtres peinent à conduire une analyse des méthodes qu'ils suivent. Certains juxtaposent des méthodes différentes sans en être conscients. Ils peuvent ainsi être certains de se situer dans la logique des programmes actuels et en être fort loin. Souvent ils hésitent à faire usage d'un manuel, sans doute sous l'effet des incitations de certains IUFM à privilégier les albums de littérature de jeunesse. De nombreux enseignants débutants se trouvent ainsi démunis, et ceci apparaît extrêmement regrettable. Au total, quelques propositions peuvent être formulées dans deux domaines : Organisation du système - ne pas interrompre, mais ne pas étendre l'opération 3500 CP ; l'utiliser comme laboratoire des évolutions pédagogiques et didactiques attendues ; - inciter les académies à rationaliser le dispositif : revoir les implantations en fonction des besoins des élèves, de la volonté des enseignants à s'inscrire dans le dispositif et de leur capacité à travailler autrement ; contractualiser les moyens, en particulier en liaison avec la politique ZEP ; mettre en place un suivi régulier et solide des équipes ; - mieux mobiliser l'ensemble des moyens disponibles, en associant les IUFM à l'opération et en s'appuyant sur les compétences des membres des réseaux d'aides aux élèves en difficulté, en incitant à réduire le plus possible les interventions en dehors des classes ; - mieux articuler les trois années du cycle des apprentissages fondamentaux (grande section de maternelle, CP et CE1) en mettant l'accent sur les attentes à l'égard de l'école maternelle et en prolongeant le travail mené au CP par des expériences de prise en charge soutenue des élèves de CE1 ne maîtrisant pas le déchiffrage ou le sens de la lecture, ce qui peut conduire à laisser aux académies plus de souplesse dans l'utilisation des moyens entre les trois années du cycle. Sur le plan didactique - inviter fermement les enseignants, en particulier les débutants, à utiliser un manuel ; inciter les circonscriptions à aider les maîtres à faire le choix d'un manuel adapté, en prenant appui par exemple sur l'ouvrage récent d'analyse des manuels publié par l'ONL ; - encourager les enseignants à augmenter la part de l'enseignement de l'écriture (graphisme et codage), qui doivent être des activités régulières et pluri-quotidiennes ; - demander aux IEN de porter une attention renforcée à l'ensemble des éléments qui conduisent à une lecture autonome aisée, en ne négligeant ni l'acquisition du code, ni le travail sur le sens, en particulier par une familiarisation avec l'univers de la littérature de jeunesse et le développement du lexique disponible ; - produire à l'intention des éditeurs un cahier des charges pour les manuels de lecture, qui
serait aussi largement diffusé auprès des prescripteurs et des centres de formation ; - procéder à une évaluation de la formation initiale des maîtres dispensée en IUFM ; - inciter les équipes de circonscription à concevoir des programmes d'animation
pédagogique centrés sur les questions pédagogiques et didactiques fondamentales, en
évitant les programmes catalogues qui permettent d'éluder l'essentiel ; - développer une formation continue également mieux centrée sur les constats faits par les
IEN dans les classes ; - veiller à ce que les programmes de formations des enseignants spécialisés (CAPA-SH)
prennent bien en compte le repérage et la prise en charge des troubles du langage écrit.