Communiqué de presse du 4 mai 2008
Si la version définitive des nouveaux programmes de maternelle supprime heureusement les ambiguïtés de la première mouture, il n’en est pas de même pour celle du primaire, qui marque un recul dans les contenus de français prévus dans la première version du 20 février soumise à consultation (1). Que ce soit en lexique, en grammaire de phrase ou en morphologie, des savoirs importants par leur fréquence d’utilisation, par leur logique, ou pour l’expression d’une pensée complexe, ont été supprimés. Par exemple, l’apprentissage systématique du lexique est moins net, l’apprentissage de verbes aussi courants que " boire ", " rendre " et " savoir " disparaît, l’apprentissage systématique des correspondances entre temps simples et composés est abandonné, livrant à nouveau les élèves à la confusion par impossibilité de comprendre l’organisation cohérente de la conjugaison, l’apprentissage des conjonctions de coordination et subordination, si nécessaires à l’articulation de la réflexion, est supprimé, ainsi que celui des compléments de manière et de cause pourtant propice au développement de la logique, tout comme les comparatif et superlatif des adjectifs et adverbes. Des incohérences sont créées de toutes pièces : ainsi, alors que l’élève doit en cycle 3 procéder au " repérage de la différence entre voix active et voix passive ", l’étude du complément d’agent est supprimée des programmes. L’apprentissage lui-même est amoindri, par le refus de mécanismes pourtant nécessaires à l’établissement de repères sûrs pour tous les élèves, surtout les plus défavorisés, et favorables à l’émancipation de l’esprit et à une expression aisée : ainsi, les termes " activités spécifiques " et " mécanismes " ont été soigneusement gommés pour être remplacés par des formules vagues : " repérage ", " l’élève acquiert… ". Une fois de plus, l’élève devra, péniblement et dans le flou selon la mode pédagogiste comptable des échecs actuels, continuer à " acquérir son savoir… par sa propre activité " et non par un apprentissage rigoureux et sécurisant. Enfin, des disparitions fixées par les programmes de 2007, mais corrigées en février 2008, sont à nouveau confirmées, comme celle de l’apprentissage du subjonctif, pourtant très fréquent lui aussi dans le langage. Le collectif Sauver les lettres dénonce donc ce recul précipité sur les programmes et les concessions à l’idéologie constructiviste, propre à différer sans cesse et à fragiliser les apprentissages les plus nécessaires aux plus démunis. Il regrette aussi que le ministère, par sa décision antérieure d’une baisse nocive des horaires hebdomadaires de l’école primaire, ait fourni si facilement aux détracteurs de l’instruction des arguments de condamnation de programmes plus solides et plus rigoureux. Enfin, on ne peut susciter l’adhésion des personnels dans le moment même où, par politique libérale, l’on ferme leurs classes ou supprime les postes de leurs collègues du secondaire. Le collectif Sauver les lettres rappelle que seule une maîtrise de la langue la plus riche et la plus précoce possible, et des horaires suffisants et réguliers, permettent de réduire l’inégalité scolaire. L’effort de reconquête de cette maîtrise vient d’être stoppé net par des coupes maladroites, incohérentes, ou idéologiques. Afin que l’occasion de voir adopter des programmes plus favorables aux élèves ne soit pas gâchée, Sauver les lettres appelle le Conseil Supérieur de l’Education qui va être consulté à rétablir les contenus amputés, et à restaurer les apprentissages précoces nécessaires aux élèves les plus fragiles. Collectif Sauver les lettres (1) Un tableau comparatif complet des deux versions, pour la maternelle et le primaire, figure sur le site du collectif :