Un décloisonnement raisonné
Un décloisonnement raisonné et intelligent de l’enseignement du français au collège est possible. A cet égard, les manuels publiés chez Nathan sous la direction de M-F Sculfort sont un modèle du genre : ambitieux, riches de textes littéraires de bonne facture, intelligemment structurés. Ils ne dissocient pas artificiellement l’observation du fonctionnement de la langue et l’étude des textes mais ne sacrifient pas au zapping permanent des " activités ", à l’esbroufe et aux contenus extra-light auxquels aboutissent le plus souvent ces " livres uniques " bâclés qu’on voit fleurir partout : un seul livre qui mélange souvent dans une confusion étonnante, un peu de grammaire, un peu d’orthographe, quelques notions de conjugaison ou de vocabulaire, le tout assorti de quelques textes indigents. M-F Sculfort, elle, et d’autres éditeurs sérieux, continuent de faire deux livres distincts. On relira d’ailleurs avec profit un extrait du livre du maître* de 1996 (conçu en 94-95) où M-F Sculfort, en militant pour la pratique d’un " décloisonnement raisonné ", dénonçait déjà en filigrane (belle clairvoyance !) les conséquences fâcheuses de la pratique d’un décloisonnement dogmatique qui deviendra même, par la suite, frénétique. A l’instar de certaines méthodes de lecture douteuses expérimentées dans le primaire on peut dire, plus de dix ans plus tard, que cette frénésie déconstructrice a causé beaucoup de dégâts chez nos élèves. Ayons le courage de le dire : entre les mains de professeurs inexpérimentés ou dont le zèle à appliquer les nouvelles méthodes ne s’embarrasse pas toujours d’essayer d’en comprendre l’esprit et le but et qui de surcroît s’en remettent parfois à des manuels indigents culturellement et scientifiquement, la séquence didactique et le décloisonnement sont devenus trop souvent de formidables machines à fabriquer du chaos dans la têtes de nos élèves. Ne serait-il pas temps d’évaluer cette vieille doctrine (sa version radicale n’est en effet plus tenable), même si elle trouve encore quelques féroces ultra-partisans parmi l’inspection générale ? Il faut jeter les bases d’une nouvelle didactique du français au collège, attachée au principe du décloisonnement mais plus soucieuse d’ordre, de cohérence et de qualité. M.P. * Livre du maître, 1996 à 1999 de la collection Du côté des lettres, Nathan (deux manuels : Textes et expression et grammaire et expression). **Au départ, le décloisonnement (faire un peu de tout à l'intérieur d'une séance d'une heure) est apparu en 1986, exactement au moment où le ministère Chevènement baissait l'horaire de français au collège de manière très brutale (passage de 6H hebdomadaire à 4 H 30 en 6e). M-F Sculfort, 1996 : " Un décloisonnement raisonné En matière d’enseignement du français, les avantages du décloisonnement ne sont plus à énumérer. Cette pratique, recommandée par les Instructions Officielles, est largement répandue maintenant, et elle a souvent conduit les professeurs à faire le choix d’un manuel unique. Une pratique rigoureuse 2. L’absence d’une véritable progression. Nous pensons que l’enseignement de la grammaire doit viser deux objectifs différents mais solidaires : le premier est centré sur le savoir-faire de l’élève, ses compétences en expression orale et écrite ; le second vise la connaissance que l’élève peut et doit avoir du système de la langue et de son fonctionnement pour en accroître la maîtrise. Seul le fait d’avoir atteint ces deux objectifs permettra aux collégiens d’accéder à une maîtrise suffisante de la langue écrite. Liens : Séquence et désarroi
03/2004
La réédition entièrement revue est sur le même principe. Ces livres ont eu et continuent d’avoir en France un succès amplement justifié. Par ailleurs, c'est cette collection qui a été choisie dans plusieurs cantons Suisse où les élèves bénéficient d’ailleurs de … 6 heures hebdomadaires de français.
Cependant, nous avons voulu nous garder, dans notre démarche, des inconvénients qui apparaissent très vite :
1. l’émiettement des activités de français au cours de la même séance de cours : quinze minutes de lecture, trois minutes de vocabulaire, cinq minutes d’orthographe, quelques remarques de grammaire, dix minutes d’expression orale, et le reste du temps (?) pour l’expression écrite. Nous proposons ici une démarche raisonnable qui permet aux élèves de savoir quel jour, à quelle heure, ils apportent l’un ou l’autre livre, quel jour de la semaine est fixé pour faire les exercices de grammaire et rendre la rédaction. La tenue d’un classeur comportant des intercalaires est gardée ici, avec tous ses avantages. Les élèves, et leurs parents, ont besoin de repères, ce qui n’est pas du tout incompatible avec une pratique intellectuelle et didactique incontestable du décloisonnement.
L’inconvénient majeur du décloisonnement, quand il est mal maîtrisé, est celui de subordonner trop étroitement l’étude de la langue à l’étude des textes ou à la pratique de l’écriture, et de réduire l’enseignement de la langue à certains point ponctuels, indispensables, mais souvent répétés dans l’année scolaire et d’une année à l’autre, au détriment d’une progression véritable. Ce danger, réel, a conduit le Québec, après quinze ans, à reformuler des objectifs précis d’apprentissage de la langue (1995).
Pour l’enseignement de l’orthographe, nous avons privilégié la même démarche d’observation et de découverte mise en oeuvre pour la grammaire et en étroite liaison avec celle-ci. L’enseignement de l’orthographe, particulièrement de l’orthographe grammaticale, dépasse de beaucoup l’enseignement de règles ; la maîtrise de l’orthographe exige des élèves, en plus de la connaissance des règles, un travail d’identification des classes de mots et des fonctions syntaxiques au moyen de procédures rigoureuses de révision de leurs écrits. Aussi proposons-nous, à partir d’exemples concrets, des clefs pour amener les élèves à maîtriser les règles qu’ils savent parfois mais qu’ils n’appliquent pas toujours quand ils écrivent. Nous mettons ici en place une pédagogie active qui associe étroitement réflexion, pratiques d’écriture et pratiques de révision et de correction des textes.
Nous avons donc résolument choisi, tout en gardant les atouts précieux du décloisonnement, de nous attacher à la tâche difficile de présenter conjointement une série de séquences homogènes et ordonnées et une progression cohérente dans chaque domaine de l’enseignement de la langue : orthographe, vocabulaire, grammaire.
Profondément persuadés que les élèves de collèges doivent prendre conscience de la spécificité du système de notre langue, que ce système mérite un enseignement qui ne saurait être réduit à des visées utilitaires, nous nous sommes donc attachés à ménager à la fois une progression horizontale et une progression verticale pour l’ensemble de la collection (voir pp. 18 à 31).
À l’issue de chaque séquence, dont nous avons déterminé les objectifs principaux, nous proposons à nos collègues des exemples d’évaluation des acquis sous la forme de " carnets de bord " comportant quatre rubriques : acquis, non acquis, en cours d’acquisition, à renforcer, qui permettent un véritable enseignement individualisé.
Le manuel Grammaire et expression comporte en outre six bilans d’acquisition à la fin de chaque partie.
Ce Guide de découverte et les Livres du professeur de chaque manuel présentent des exemples de fiches de suivi d’orthographe, conjugaison, expression écrite, de fiches d’évaluation, des " carnets de bord " qui permettent de rendre chaque élève conscient de ses apprentissages. L’expérience a démontré que ces instruments sont des atouts précieux pour renforcer leur motivation et mesurer leurs progrès. "
(sur la difficulté pratique de la mise en œuvre de la séquence)
Séquences et simagrées
http://www.sauv.net/seq.htm
Quand notre doyenne s’illumine
http://www.sauv.net/kwvolta.htm
Proposition de séquence didactique : le presse-purée :
La séquence, un sujet qui fâche ?
Deux nécessités et deux priorités pour l'élève : l'orthographe et la grammaire de phrase
On est payés pour ça
Évolution des horaires du français au collège