La constitution "vendue" en Terminale
Censurer un numéro de " Textes et documents pour la classe " (TDC) destiné à 70 000 profs de lycées et collèges n’a pas suffi à François Fillon. Comme l’a déjà écrit " Le Canard " (13/4/05), le ministre de l’Éducation craignait qu’un débat – pourtant organisé à sa demande – entre deux profs de droit portant un regard divergent sur la Constitution européenne ne tourne à l’avantage du non. Une nouvelle fois, Fillon s’est surpassé : il a tout bonnement fourni les fichiers de l’Éducation nationale à la Commission européenne pour lui permettre de diffuser avec profit une brochure en faveur du oui. Chaque proviseur d’établissement du second degré a ainsi reçu du bureau français de la commission une lettre, datée du 17 mars, le priant de transmettre " à l’ensemble des lycéens de classe terminale " ce texte sans ambiguïté. Après le poids des mots, le choc des images : dans une seconde missive, qui leur fut adressée en avril, les proviseurs ont reçu pour consigne de répandre une nouvelle arme de conviction massive, sur le ton " Ah, qu’elle est belle, ma Constitution ! ", présentée cette fois sous forme d’une cassette vidéo de quinze minutes. Une association d’avocats s’étonne auprès de le Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) de ce que cette façon de " cibler " de jeunes électeurs potentiels n’ait fait l’objet d’aucune déclaration. Nul doute que le parrainage de la sous-ministre aux Affaires européennes (dans le cadre d’un partenariat entre Paris, le Parlement de Strasbourg et la Commission de Bruxelles) aura suffi à légitimer l’opération. Les élèves de terminale peuvent désormais s’attendre à tout : pourquoi pas une option " Europe " dans les prochains bacs " blancs " ? L. G.